abandon
2009 • 13 ans,, il se souvient. la chaleur de sa main dans la sienne ((qu'il voulait à peine tenir, ivre de liberté, assoiffé de découvertes)), son parfum entêtant, la plus belle de ses tenues pour un rendez-vous important. il se souvient. du haut mur serti de grilles immenses, ouvertes sur cet autre monde gorgé de mystères que représentait la haute-ville pour l'enfant qu'il était. il se souvient. l'excitation de fouler le sol pavé des grandes avenues ((la crainte latente de briser quoi que ce soit parmi les merveilles hors de prix qui s'étalaient à perte de vue)), les transports pris pour traverser midrias et achever la course à celestia. fais-toi beau, fais-toi irréprochable, avait-elle jubilé en recoiffant une mèche invisible, et il avait voulu la rendre fière— adorait l'éclat de satisfaction dont brûlaient ses paupières lorsqu'elle disait : bénie des dragons, j'ai donné au monde un gifted. don, offrande, c'est ce qu'il était bel et bien. débordant d'une telle confiance qu'il n'a que trop tardé à cerner la cruelle vérité que masquait cette déclaration. il se souvient— la manière qu'elle a eu de le vendre sous son meilleur jour, à ses 13 ans, avant de lâcher sa main à jamais, à le sacrifier sans remords sur l'autel de ses ambitions.

rivalité
2010 • 14 ans,, à chaque réprimande dont écope jazz, neomä ne cache pas sa jubilation. jouit de l'éternelle compétition établie par son « père adoptif » entre les trois gifted récupérés dans l'espoir d'agrémenter de magie une lignée mourante. met toute sa force dans des lancers brutaux qui confèrent à la belle une force telle qu'elle est imparable — et pourtant il ne les déteste pas, ses nouvelles sœurs. ne sait simplement ni partager ni tempérer, gosse né unique avant d'être plongé dans le déséquilibre d'une fratrie reconstituée. il y a du désarroi quand elle le rejette, de l'incompréhension face à l'attitude de jazz : incapacité à cerner les insécurités qu'éveillent en elle la récente adoption. elle rêve un monstre qui manque de peu de le tuer ; volontairement ? s'il suppose que non, la question le hante, pernicieuse. entre eux, la tension monte sans qu'il ne perçoive tout à fait comment il l'alimente, infernal et rageant sans l'avoir prémédité. jusqu’à un soir, où les mots de leur « père » se font tranchants à l’égard de jazz. sentence aux accents de finalité, qui hérissent neo d'un sentiment étrange, tétanisant. il songe : c’est la fois de trop. ils vont l’abandonner, et ça le frappe en plein cœur. parce que lui aussi a été bazardé, évalué, acheté ; lui aussi se sent en sursis, constamment, lui aussi craint d’être à nouveau utilisé puis jeté. il ne sait pas ce qui lui prend, l’aveu erroné s’impose à lui : elle n’est pas à elle, la drogue. quelqu’un l’a mise dans mon sac à l’académie, sans doute pour me nuire. jazz l’a récupérée pour me couvrir, quand ma classe a été fouillée à l’improviste. le mensonge bat délicieusement au creux de sa cage thoracique. père snyder demeure dubitatif et neomä écope, bien que moins sévèrement. la drogue est saisie, jazz épargnée, et quand ‘père’ s’éloigne, elle le remercie d’un léger coup de poing dans l’épaule. par contre, tu mens trop mal. en ma qualité d’aînée j’ai le devoir de t’y former, elle soupire en levant les yeux au ciel ; trêve tacite énoncée à l’aube d’un recommencement.

alliance
2010 • 14 ans,, et si les entrainements le passionnent, la pression l’étouffe. l’étau est serré à les étrangler ; mais ce n’est jamais assez. les snyder adoptent une nouvelle gifted, une healer en laquelle il place d’incommensurables espoirs, reléguant les deux autres au second plan. par instinct de survie face à mieux lotie qu’eux, la trêve entre jazz et neomä évolue : from enemies to partners in crime, from partners to friends, from friends to sibling — simple question de nécessité, clameront-ils, alors même que leur dynamique se charge d’atomes crochus et d’autant de loyauté que de coups d’éclat.

osmose
2012 • 16 ans,, un bruissement suspend ses mouvements. non qu'il puisse passer inaperçu, ainsi à moitié hissé à travers la fenêtre par laquelle il a déserté des heures auparavant — s'il s'est fait prendre, il est déjà trop tard pour s'essayer à la moindre subtilité. pourtant ce n'est pas la porte qui s'ouvre dans un grincement menaçant, mais une silhouette qui émerge des rideaux dans un souffle bas : bouh. il sent l'exclamation exploser dans sa gorge, la ravale de justesse avant de se glisser prestement à l'intérieur de la pièce. are you crazy?? you scared the shit out of me dumbass ! jazz s'étouffe presque de rire derrière la paume qu'elle s'est plaquée sur les lèvres. porte encore ce sourire hilare lorsqu'elle s'assoit sereinement sur le lit de neo, bras entourant ses jambes, pour demander : tell me yours and i'll tell you mine. habitude adoptée, entre secrets bien gardés et promesse tacite de se couvrir mutuellement. il lui flashe un rictus carnassier en s'extirpant du haut dans lequel il est sorti, pour enfiler quelque chose de plus confortable. i brought back something you might like, indique-t-il mystérieusement, sachet opalescent extirpé de la poche arrière de son jean abandonné.

déca((danse))
juin 2013 • 17 ans,, elle sourit et rit et virevolte, et autour de la coupe pleine la main se serre. coup de pression — le verre frémit. mais leurs regards se croisent et neomä comprend. s'aperçoit que la tension tire à sens unique, qu'elle se porte sincèrement bien et vit sa meilleure vie.
mais lui ne va pas bien, à chercher l'oubli en enfouissant dans les limbes ses souvenirs. lui ne va pas bien, depuis qu'elle l'a jeté, refourgué, oublié, non, il ne va pas bien. les mêmes questions toujours : n'était-il pas assez ? et l'évidence lui tire un rire qui détonne avec la conversation au cœur duquel il se perd — bien sûr qu'il n'aurait jamais pu être assez. ne saurait combler de la façon dont le font les perles et l'or et les égards d'une haute société en laquelle sa mère s'est immiscée en l'échangeant contre une position. bien sûr qu'il n'était qu'un joker tout ce temps, une carte chance pour un nouveau tour de roue, un passe vers la fortune. on le dévisage ; d'une traite il descend le verre. on le dévisage ; d'un geste brusque il s'empare d'une nouvelle coupe. on le dévisage ; une autre encore. are you alright? stop- stop looking at me, qu'il crache avec une brusquerie qu'on ne lui connait pas, à lui, le précieux enfant de la nation ; lui dont les statistiques au hoverball se font délice, lui que l'on clame promis à un brillant avenir. il ne faudrait pas qu'un scandale vienne bousculer tout ça, non, il ne faudrait pas, pourtant il la voit rouge tandis qu'elle s'installe comme au spectacle, main sur la poitrine en le fixant comme si elle ne savait pas ce qui le met dans cet état.
il y a longtemps elle le nommait trésor, il y a longtemps elle était son monde et lui le sien. elle l'est toujours, mais lui n'est plus rien. fuck you, il clame, détache les mots, le regard dans le sien et la foule oubliée : fuck. you. tend un énième verre comme pour le lever à son honneur, puis le bascule, bulles de champagne courant au sol avant que leur contenant ne les suive dans un éclat bruyant.

déclin ((high highs and low lows))
2014 • 18 ans,, cw usage de drogue à des fins récréatives elle est un terrible étau, la douleur. se glisse vicieusement sous les chairs, ronge l'esprit, pollue l'épiderme ; et si l'affaire a été réglée en privée, planquée sous le tapis, oubliée, elle n'en revient pas moins le hanter, neomä, constamment. lui colle à la peau. il revoit son sourire épanouit et se hait, de s'en vouloir d'avoir voulu briser son bonheur. se déteste de s'apercevoir qu'il care, encore, toujours, profondément, qu'il se soucie de celle qui l'a abandonné. les pensées se noient dans les excès ; de basse, d'ambiance, de boisson, de soirées et d'autodestruction. ne pas rester seul, ne pas se laisser le temps de songer à sa mère. et le petit prodige du hoverball de choir de son piédestal, lorsqu'un test de drogue revenu positif l'exclut du terrain, l'erreur de trop.

apogée
2020 • 24 ans,, durant les périodes sombres, jazz est là pour le plonger dans l'oubli. ils ne parlent pas, non, ils n'ébruitent pas les plaies béantes qui hantent leur sourire un peu croche, tournent autour de l'éléphant au milieu de la pièce sans jamais en reconnaitre l'existence. ils se perdent dans les sorties et la musique et leur toile de mensonges, eux qui toujours se disent frère et sœur de sang pour mieux gommer le passé qui les ronge. mais six ans plus tard, neo touche à nouveau le succès du bout des doigts — pour s'en saisir fermement cette fois. consécration lorsque les partenaires et sponsors se multiplient, que la carrière reprend forme sous l'égide raide de son 'père'. les entraînements débutent au petit matin, se déclinent en difficulté croissante, ne cessent que lorsque la fatigue lui déchire les muscles, à le laisser pantelant, vacillant, presque incapable de se mouvoir. et il aime ça, neo, tout ressentir intensément, se sentir vivant. si vivant qu'il laisse derrière la partenaire d'autrefois, jazz qui, aux yeux des siens, demeurera l'unique désillusion.

sommets
2022 • 26 ans,, on dit que le succès change un homme. aux frasques qui reprennent dans l'ombre, au gouffre qui se creuse entre lui et jazz à présent qu'il se faufile dans les grâces de leur 'père', l'adage semble se vérifier. il est le cheval de course dont on se vante des exploits, neomä, faits et gestes monitorés avec attention. et quand les projecteurs s'éteignent, dans ses travers il s'enferre et sombre, énergie sombre.

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superstitions outre le fait de tourner un dé avant une décision importante, neo a ses rituels, son labyrinthe précis d'habitudes propices au calme, à la sérénité et au mindset nécessaire avant chaque match, pour favoriser la victoire.

. · .. • la première lettre du nom de l'équipe adverse gravée sur une pomme qu'il fait croquer à soleil arkham avant d'entrer sur le terrain ((nb. depuis qu'il l'a croquée avant lui pour l'agacer et que le match s'est soldé par une victoire)) ; manie étouffée durant les 2 années d'incarcération du midriais, habitude rompue ayant déséquilibré l'ensemble de ses rituels.
. · .. • la gorgée bue à chacune de ses deux bouteilles d'eau avant de les aligner devant sa chaise, étiquettes placées perpendiculairement aux buts ;
. · .. • les chaussettes ajustées à la même hauteur, avec le logo de son équipe retourné parallèlement au terrain.
. · .. • blinding lights ((à plein volume avant d'entrer sur le terrain)). WOW. ((à plein volume avant une course)).
on les remarques, on les note, on les met en gros plan, on les questionne, on les trouve marrantes — il déteste en parler, ne tente pas de les expliquer. sait que ces manies sont irrationnelles, mais est incapable de s'en défaire. comme un besoin d'induire une part de contrôle, de quiétude et de sérénité dans un moment de pression intense, et dans l'univers d'incertitudes qu'est celui des compétitions sportives.

mode de vie tendance à sombrer dans les drogues pour retrouver les sensations qui le stimulent. ••• d'abord il est ce mec populaire et coureur et mystérieux auquel la réussite sourit — puis soudain il chute et chute et sombre dans le vortex de la perte de contrôle et des musiques psychédéliques et des rails snifés jusqu'à s'exploser le nez — et enfin, se redresse en titubant, jusqu'à la prochaine fois. une boucle sans fin, un cercle vicieux dont il ne parle pas, dont on ne parle jamais, parce que c'est mieux de prétendre que les travers n'existent pas. pas de problème = rien à régler. ••• il ne fume pas de cigarettes normales, ne fume pas au quotidien, ne fume pas quand il va bien. s'il en réclame une, c'est que la chute n'est pas loin et que les suivantes seront des joints, puis pire. pourtant on ne lui dit jamais vraiment non ; on tente un « neo… you really shouldn't, you know that right ? » et puis on le regarde faire. la déchéance a la beauté morbide de l'art torturé. ••• une cicatrice lui striant le front : elle court de la naissance du sourcil gauche jusqu'au creux de la paupière, due à une rencontre avec le sol durant un match de hoverball particulièrement violent.