Well, that's a beautiful, beautiful flat." fait remarquer une voix inconnue sur sa droite, tandis qu'ils sortent de l'ascenseur. il n'a aucune idée de qui est cette fille — mais il ne s'en formalise pas plus que ça, parce qu'il sait que neomä connaît tout velaris. c'est comme ça qu'il est, insupportable et du genre à papilloner, faire semblant de se souvenir et de se soucier. soleil, lui, ne prend plus cette peine depuis longtemps ; il se fout globalement des gens. de leurs noms, de leurs histoires, de qui ils sont. seuls importent deux faits : il a moisi en prison, et sous sa masse de cheveux bleus se cachent deux dents trop affutées.

la soirée passe à toute vitesse. au milieu des basses assourdissantes on y découvre les multiples pièces du tout nouvel appartement de neomä snyder, un verre à la main et un air intéressé sur les traits. tout est prétexte à faire la fête, pour snyder ; surtout une acquisition comme celle-ci. on s'extasie dans tous les coins mais soleil ne remarque qu'à moitié les immenses baies vitrées, la cuisine marbrée, les très longs canapés. il remarque plutôt qu'à un moment de la soirée neomä a les yeux rouges, peut-être à cause de la fumée, peut-être à cause de la drogue, peut-être à cause de la discussion qu'il vient d'avoir avec jazz, car ils sortent tous les deux de la même pièce avec un air moyennement festif.

soleil ne va pas vers lui tout de suite — publiquement, ils ne sont personne l'un pour l'autre. juste d'anciens amis ayant eu un accident de voiture un jour, il y a quelques années. publiquement il ne s'est rien passé entre eux aux bains de celestia, neomä ne l'a pas blessé en l'appelant quickie et soleil n'a pas réclamé une attention à laquelle il n'est pas sensé avoir droit. alors il attend les heures de la fin de nuit, quand l'appartement commence à se vider, quand deux vagues d'invités sont déjà parties, il attend que le soleil vienne presque poindre dans le ciel offert par les baies vitrées.

snyder est sur le balcon, accoudé à la rambarde ; arkham jette un dernier regard en arrière pour s'assurer que personne ne les voit avant de se faufiler à ses côtés. la musique se tait presque lorsqu'il ferme la porte vitrée derrière lui — on l'entend différemment, comme assourdie. "rough night?" qu'il demande en venant s'accouder à ses côtés, l'air de rien. ils regardent devant eux, les immensités de celestia où ils ont tous les deux été jetés gamins, loin de chez eux. celestia qu'il a détesté au premier regard, au premier sentiment, à la première aura, réclamant à arkham père un retour express à midrias — mais neomä est plus matrixé que lui, et sans doute qu'il a appris à aimer ce qu'il voit devant lui. ce quartier où ils ne sont pas chez eux.

Il a troqué les rires et l'insouciance contre un raz-de-marée d'émotions déboussolantes. a renoncé à son indolence, fait rare, pour plonger dans les vieilles souffrances dont il a fait son lit ; celles-là même qu'il s'applique à taire aux autres et à lui-même aussi longtemps le lui permet son habituelle carapace de déni. mais déni ce soir a volé en éclat, compagnon-traître ayant signé son abandon à l'instant même où sa mère est entrée en scène, éternelle comédienne. le passé l'a rattrapé, terrassé, et de l'échange qui en a découlé avec elle puis avec jessamine, neomä ressort vidé. vide d'énergie mais pourtant gorgé d'un élan d'espoir, celui d'avoir peut-être retrouvé une sœur ce soir. rough night? intervient une voix derrière lui et le witcher sursaute presque : sens altérés par la boisson et attention rivée ailleurs, il ne l'a pas entendu approcher.

sa masse se recroqueville comme pour le rendre invisible, peine perdue ; confronter soleil lui fait toujours le même effet, celui d'un coup de poing dans le ventre, et ce soir il est plus vulnérable qu'à l'accoutumée. ce soir son âme est à nu, les relents de la fête l'ont quitté depuis longtemps. même le sourire qu'il peint sur ses traits sonne faux, s'évanouit aussitôt, et son regard se perd à nouveau sur cet horizon qu'il adore, celui qu'il a hâte d'embrasser du regard chaque matin. sa maison ou, du moins, ce qui s'en rapproche le plus pour un gosse venu d'ailleurs et de nulle part à la fois. ses lèvres se pincent en une moue pensive, il y songe réellement. hard one. but not that bad i guess. ses yeux basculent sur l'heure qu'affiche son téléphone. la fête est morte plus tôt qu'à l'accoutumée, vers les petites lueurs du jour, faute d'un hôte pour la raviver jusqu'au jour. tant mieux, cependant ; les fêtards sont coutumiers de ses mood swings et on sait que chez neomä, certains jours sont joyeux et d'autres destructeurs, high highs et low lows. personne ne prétend s'en soucier, les pas migrent ailleurs lorsque la source se tarit, tout prêts néanmoins à revenir ravivés à la prochaine opportunité. c'est ainsi qu'il aime son cercle : superficiel et vain. did you have fun, demande-t-il poliment ((de ses habituelles interrogations sans intonations)), sincèrement curieux également : il n'a pas souvenir d'avoir vu soleil s'amuser à l'une de ces soirées depuis— une petite éternité. depuis que la prison et zaun l'ont changé, à vrai dire, et au souvenir des crocs que masque l'allure délicate il ne peut contenir un frisson, appréciation. un coup d'œil par-dessus son épaule et il se penche brièvement pour laisser contre l'oreille de soleil la chaude trace de son murmure : want me to make it better? un sourire wicked s'installe à ses commissures, mais n'atteint pas ses yeux. il joue son rôle habituel dans le théâtre qu'est sa vie, sans bien savoir s'il sera réellement capable d'endosser le costume cette nuit. essayer est plus facile que l'inverse, cependant, alors sur un clin d'œil il ajoute : gimme like, ten minutes top. s'arrache à la balustrade et se détourne pour se glisser à l'intérieur, sans plus d'explication— car c'est une vieille habitude qui il le sait, trouvera un écho chez soleil, celle de disparaître ensemble dans une chambre et de faire taire les bruits du monde.

il trouve le chemin de la sienne cette fois ; pour la première fois depuis qu'ils ont commencé ce jeu-là. laisse la porte à peine entrouverte, pas assez pour que quiconque l'aperçoive mais suffisamment pour que soleil sache où le retrouver. les volets clos pour barrer les premiers rayons de l'astre diurne, neomä se laisse tomber sur le matelas et ferme les yeux le temps que le down lui pourlèche les entrailles. il ne se rend pas compte du temps qui passe, légèrement assoupi peut-être — réveillé par le mouvement du lit lorsque l'autre s'y assoit, un peu mal à l'aise. un regard lui assure que la porte est à présent bel et bien close et il tend une main pour l'inviter à approcher, l'attire sur ses genoux sans se redresser. ses paumes trouvent les cuisses de soleil lorsqu'elles s'installent de part et d'autre de lui ; la caresse est lente, de haut en bas, de bas en haut. hi, il souffle, un sourire fatigué creuse une fossette au creux de sa joue. didn't think you'd stay that long. missed me? s'efforce de plaisanter, le cœur n'y est pas. remet une mèche bleue derrière l'oreille d'arkham, plus tendre et moins pressé qu'à l'accoutumée. ce soir il chérit ceux qui restent. ce soir, l'ombre des larmes borde ses yeux rougis sans qu'il ne les autorise à s'échapper.

Hard one. but not that bad i guess. did you have fun?" demande neomä sans y mettre le ton, et un instant soleil se demande s'il ressentirait quelque chose s'il lui répondait que non. "yeah" qu'il admet finalement d'une voix traînante, comme par automatisme, à deux doigts de hausser les épaules. "want me to make it better?" murmure alors le celestien tout contre lui, et arkham ne peut empêcher son sourire de le gagner — c'est qu'il aime le jeu, surtout avec neomä. mais son sourire meure bien vite, car déjà il est l'heure de retomber dans leurs anciens travers : se retrouver dans la même chambre mais n'être surtout pas vus ensemble, obligés de gagner la pièce chacun de son côté, à plusieurs minutes d'intervalles pour ne pas éveiller les soupçons. "gimme like, ten minutes top. — ok." le ok est plus boudeur que résigné ; mais il lui a déjà trop lancé de piques à ce sujet, alors il jette son regard sur celestia qu'il a la chance de dominer. se rappelle combien il était intimidé, gamin, lorsque la voiture de burns arkham l'a déposé là pour la première fois. se rappelle de la taille des immeubles, plus grands encore que ceux de midrias, plus chatoyants encore que ceux de midrias. celestia, sa magie, sa technologie, sa verdure et ses néons. déjà neo s'en va, rejoindre cette chambre où ils dormiront pour la première fois.

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toute frustration, tout agacement s'évapore à la vue de neomä endormi. il le réveille sans le faire exprès, en se glissant à côté de lui. "hi. — hi." qu'il répond, essayant en vain de cacher son amusement. "i bet you fell asleep in like, ten seconds. — didn't think you'd stay that long. missed me?" soleil ne répond rien, se laisse bercer par les caresses de neo, son étrange douceur inhabituelle, ses yeux éreintés dans l'obscurité de la pièce. il y a quelque chose de triste chez snyder, ce soir. soleil ne sait pas exactement quoi. il prépare le terrain, doucement : "i saw you laughing with some friends when i arrived. then you disappeared. you reappeared kinda mad, brushed it out of your face, tried to laugh again. drank too much. then you disappeared again. and now you look sad." le constat les laisse tous les deux silencieux quelques secondes. les mains de neo n'ont pas arrêté de lui caresser les cuisses, et il n'a pas pu s'empêcher de lui caresser les cheveux en retour. il n'y a personne pour les voir ce voir — le monde entier s'en est allé. "something's off. something's wrong." qu'il constate encore. les disparitions de snyder au cours de la nuit le lui ont soufflé. son instinct de voyant le lui a soufflé aussi. "what is it?" qu'il chuchote alors, s'approchant de son cou pour y déposer un baiser avant de s'installer contre son torse, posé sur ses avant-bras qui portent son poids et entourent le visage de neomä.

«ok, murmure le midriais ; mine bougonne tirant à neomä un rire impénitent, tandis que l'accord fait courir un frisson d'anticipation le long de son échine.

la fatigue l'emporte pourtant, psychologique plus que tout — et le witcher s'effondre durant la brève attente qui le sépare du soleil, seulement pour se ranimer lentement à son arrivée. l'attirer contre lui, cajoler ses hanches du bout des doigts, épouser de ses paumes l'arc de ses cuisses ; et si pourtant le désir est toujours au rendez-vous, l'envie et la force n'y sont pas ce soir. ressenti que neo s'efforce de faire taire par la force de l'habitude, si accoutumé à étouffer ses émotions dans ses travers qu'il n'imagine même pas d'alternative. jusqu'à—

i saw you laughing with some friends when i arrived. then you disappeared. you reappeared kinda mad, commence l'autre, et neomä se crispe en l'entendant énoncer le déroulé de sa propre soirée. watched me closely didn't you, commente-t-il d'un ton taquin dont l'amusement n'atteint pas ses yeux, plus forcé que sincère. soleil continue sur sa lancée quoi qu'il en dise, et snyder est pris d'une irrépressible volonté de fuir. pourrait user de sa nature pour le repousser, lui échapper, mais fond lorsque les lèvres picorent son cou d'un baiser, que la silhouette se love contre la sienne. fond sous les attentions, les contacts, l'inquiétude qui sonne sincère quoi qu'il ne puisse s'empêcher de la remettre en doute. something's off. something's wrong, conclut-il et neomä se racle la gorge. what is it? et à cet instant, incapable de demeurer immobile, neo inverse lentement leurs positions jusqu'à se retrouver au-dessus de soleil, délicieusement entouré de ses jambes, de ses bras, de sa présence tout entière.

no chick-flick moment, rétorque-t-il, un sourire faux au coin des lèvres. it's nothing, il ment, se reprend, nothing big, s'efforce de relativiser, se cale correctement sur un coude tandis que le bras libéré s'étend pour laisser courir une main jusqu'à celle de soleil. les doigts se croisent, se raccrochent avec juste un peu de désespoir savamment nié, mais que la tension de ses membres dénonce. neo se régale du spectacle de ses cheveux bleus lâchés sur ses couvertures. but feel free to comfort me if you're keen on doing so, il y a quelque chose d'insupportable dans son rictus et de distant dans ses yeux, regard qui se durcit alors que soleil effleure ses vulnérabilités. why do you care anyway, et comme toujours avec lui l'interrogation est dépourvue d'intonation. la tendresse des gestes précédents est avilie par l'impulsion qui le pousse à attirer la main de soleil entre ses cuisses, illustrant ses dires de la plus crue des façons.