Pourquoi devrait-elle se rendre à cette cérémonie ? Dans ce qui s’apparente de près ou de loin à un bureau, elle récupère un bout de papier où figure une liste d’excuses. Les petites croix à côté des noms correspondent aux prétextes déjà utilisés pour éviter Elan. Malheureusement, depuis la dernière utilisation, la demoiselle n’a pas pris le temps de rajouter des idées et elle se trouve donc à court d’inspiration quand celui-ci lui force la main. Une fois de plus. Si maintenant elle sait gérer sa malédiction correctement, il y a bien une raison qui lui interdit de se rendre à Midrias : le concept même de l’évènement. Zylith ne veut pas voir ce cristal de souvenirs éclater dans le ciel. Le principal concerné ne pourra jamais prendre connaissance de ce message au même titre que celui qu’elle comptait lui dire ce soir-là. Alors, quand les autres auront le regard rivé vers le ciel, devant ce beau spectacle, la jeune femme ressentira une nouvelle fois un coup de poignard dans le cœur. Et pour le coup, elle n’a pas besoin de se rendre dans ce quartier pour garder en mémoire son ami disparu. Est-ce qu’elle n’arrivera jamais à faire son deuil un jour ? Est-ce qu’un jour quelqu’un lui dira ce qui s’est passé ? Et si la secte l’a retrouvé, est-ce qu’ils ont gardé son corps ? Si la demoiselle se considère comme un monstre, eux étaient bien pires.

Comment pourrait-elle expliquer à Elan toutes ces questions qui se posent sans cesse dans sa tête ? Son ami est aussi optimiste que lui. Elle, ça n’a jamais été son truc. Il aurait peut-être dû lui partager son secret avant de disparaître pour toujours. Zylith pose son regard noir sur le barman avant de lâcher un soupir. Elle ne peut pas être en colère contre celui qui avait eu la bonté de les aider. Elle le sait mais la shymer n’est plus la même. “ J’espère que ça en vaut le détour, ton truc. “ Pas de larmes ce soir, se répète-t-elle en boucle alors qu’ils se retrouvent tous les deux, plus tard, à la place d’Ozela. C’est bondé de monde avec des pacifieurs sous tension. Zylith prend sa respiration et attrape la manche de la veste de son camarade. “ Ralentis. J’ai peur de te perdre. “ On dirait presque voir un cerf ébloui par les phares d’un véhicule.

La vie n’était plus vraiment la même depuis que Callen avait disparu. Elan se retrouvait dans un appartement beaucoup trop grand, beaucoup trop calme et beaucoup trop vide. Zylith avait fini par mettre les voiles, elle aussi et c’était un peu comme si tous les prétextes étaient devenus bon pour qu’elle puisse l’éviter. Dans un sens, il la comprenait. Certainement qu’il prendrait tout aussi mal le fait de se sentir impuissant et abandonné face à la disparition soudaine de l’être aimé. D’un autre, leurs états d’esprit étaient complètement différents. Pour lui, Callen était en vie. Il n’en doutait pas une seule seconde. Jamais cette hypothèse ne lui avait traversé l’esprit et elle n’était certainement pas prête à prendre place dans son cœur. Peut-être que finalement Zylith avait raison et qu’il avait tord sur toute la ligne. Mais il était fort probablement que quand bien même le cristal venait à exploser sous yeux qu’il n’y croirait pas. Un complot, un putain de complot. Voilà ce que c’était si cela venait réellement à se produire.

Par chance, la jeune femme n’était pas parvenue à lui offrir une excuse digne de ce nom pour se débarrasser de lui. Quand bien même elle en aurait trouvé une, il l’aurait très certainement trainée de force. Non pas que ces festivités l’emballent au point de vouloir amener tout ses potes contre leurs volontés. Non ça, il a déjà essayé avec Nyel mais il n’est pas sûr que ça ait fonctionnés. Il n’était pas non plus motivé à l’idée de voir des souvenirs qu’un potentiel ancêtre aurait pu vouloir lui transmettre. Non mais, qu’on se le dise. Pourquoi faire ? La famille Pankratz n’est pas de celles qui a milles et une histoires à raconter. A vrai dire, il ne serait même pas étonné d’avoir le droit à tutoriel : Comment réparer un lavabo, en guise d’héritage familial. Enfin, peu importe.

Se frayant un chemin parmi la foule, il levait légèrement les yeux au ciel. « Mais oui ! Attend. » Il s’arrêtait brutalement, se tournant vers elle. « Je t’ai déjà donné une occasion de douter de moi ? » Il n’attendit même pas de réponse qu’il poursuivait son chemin. A peine avait-il terminé sa phrase qu’une liste interminable d’idée ayant tournées au vinaigre prenait place dans sa tête. Oui non, laissez tomber.

Il s’arrêtait finalement dans un petit coin, pas trop encombré par la foule et plutôt tranquille. Non parce que en temps que être sociable, Elan aime les gens. Mais dans cette situation en particulier, la Nathalie, 35 ans, deux enfants, qui raconte sa vie, il veut pas l’entendre. « T’as ce qu’il faut ? Tu sais comment ça marche toi ? J’ai jamais fait ça de ma vie moi. Tu crois ça fonctionne même si j’ai pas de pouvoir ? » Il fronçait légèrement les sourcils. Bah ouais, attendez, comment il va envoyer la super compilation de dance spécialement ressassée dans sa mémoire pour être transmise à Nyel dix ans plus tard ? Mais le plus important n’était pas là. Il n’avait pas besoin de pouvoir pour remarquer que Zylith était à cran. « Eh, ça va bien se passer … Moi j’suis persuadé qu’il va l’avoir ton message. » Tentait-il alors de la réconforter un peu maladroitement en lui posant une main sur l’épaule.

" Plus d’une fois. “ murmure-t-elle. Elan a déjà le dos tourné et n’entendra pas sa réponse compte tenu de l’agitation autour d’eux. Elle a beau adorer, par moment, sa personnalité décadente, elle ne comprend pas pourquoi il l’oblige à venir ici. En tant que père, il devrait apprendre à protéger son enfant. Mais, est-ce que cet événement n’est pas l’occasion pour elle d’ouvrir les yeux ? Serait-ce un mal pour un bien ? Elle se demande si son camarade a pris le temps de réfléchir à toutes ces interrogations. Elle se rappelle quelques secondes plus tard d’un fait. Dans leur trio, Zylith était le cerveau ou en tout cas, elle essayait de l’être pour la survie de ses amis. Mais en attendant, la belle vient de mentir ouvertement à Elan. Ce truc ? Elle a déjà eu l’occasion de le vivre une fois, l’an passé en compagnie de Callen. Malheureusement, elle ne garde pas que des bons souvenirs. Elle se souvient de cette brûlante dispute entre eux.

La shymer pose son regard sur l’humain, qui s’installe dans un coin sans lui demander son avis. Peu importe. Sa mauvaise humeur ne pourra pas lui permettre de lui donner un avis favorable même si elle se situerait dans un hôtel cinq étoiles. Comme quoi, le serveur a beaucoup de courage. Malgré ses nombreux refus, il ne s’est pas encore lassé d’elle et n’a pas coupé le contact. Oui, ce bon vieux Pankratz est un homme bien. La demoiselle n’en a jamais douté. Elle écarquille les yeux de surprise. “ Tu n’es jamais venu ici ? ” Finalement, il y a bien une première fois pour quelqu’un ici. Elle se concentre un instant et tente de se souvenir des conseils d’utilisation. Zylith, une notice ambulante. “ Tout le monde peut l’utiliser. Tu as juste à penser à ton souvenir en tenant le cristal de cette façon. Et après, tu souffles dessus comme sur une bougie d’anniversaire. “ Elle ferait un bon professeur, n’est-ce pas ? “ Si tu reçois un cristal, tu n’auras qu’à le briser pour voir le souvenir. “ Est-ce qu’elle en recevra un ? Elle ne se fait pas d’illusion bien que la demoiselle a eu l’occasion de faire de jolies rencontres dans le passé. Zylith sait juste qu’elle a de grandes chances d’en recevoir dans neuf années. C’est beaucoup trop loin. Tirée de ses pensées par un geste maladroit, elle esquisse un timide sourire. Il a tort et il ne devrait pas contribuer à des faux espoirs mais ce n’est pas le moment pour se disputer. “ Nous sommes venus ici l’an dernier, tous les deux. C’était notre première fois. “ Qui sera présent l’année prochaine ? Seront-ils toujours en vie ? “ Je pensais qu’on serait tous les trois aujourd’hui. A défaut, ça le saura dans mon souvenir. Enfin, si je me décide. “ Elle n’est pas complètement convaincue mais la belle étant à fleur de peau, elle finira par rendre hommage à son ami. Elle devrait réfléchir à un souvenir plus sérieusement mais en attendant qu’elle termine de peser le pour et le contre. “ Raconte-moi le tien. “  

Il les avait entendus, les mots de Zylith. Ceux qui lui signifient qu’il lui avait donné plus d’une fois des raisons de douter de lui. Elle n’avait pas tout à fait tort. Non pas que Elan ne soit pas quelqu’un de confiance, au contraire mais c’est plutôt en ces bons plans qu’il fallait douter. Il se laisse facilement embarquer, par ses sentiments, par ses pulsions et surtout, par sa connerie. C’est plus fort que lui, on ne le changera certainement jamais quoiqu’il en soit. Alors il ne relevait pas, se contentant de s’arrêter dans un coin légèrement isolé pour poursuivre son plan. Il était persuadé que cela allait fonctionner, elle allait enfin pouvoir l’écouter et cette partie de lui dans lequel un minuscule doute persiste allait enfin pouvoir sortir de son cœur. Il ne remettait aucunement en question l’aboutissement de son plan, néanmoins, la pratique était davantage à revoir. Comment ça fonctionne ? Sa protégée semblait surprise de l’entendre dire qu’il n’était jamais venu. « Bah ouais ? » Jusqu’alors, cela ne l’avait jamais réellement intéressé. Lui, il était davantage hypé à l’idée que tout ce bon monde allait sûrement vouloir aller festoyer avec ça. Et puis, il faut l’avouer, il y avait cette petite réticence à l’idée de ne pas recevoir de souvenir en retour. Donc quoi, venir pour être le seul plouc qui ne reçoit rien ? Non merci. Alors il l’écoutait très attentivement lorsqu’elle se mit à lui expliquer. Ok, cela à l’air plutôt simple, il ne devrait pas se louper. Il ne devrait pas. « J’suis pas certain d’en avoir un mais on verra. » Allez, peut-être un message de son oncle Rodolphe, complètement explosé qui s’est trompé de personne ? Il n’y a un monde où cela pourrait arriver, que des mess ambulants chez les Pankratz de toute façon.

Et puis, dans un geste maladroit, il tentait de la rassurer. Il n’était pas le meilleur pour ça, ce n’est pas l’envie qui manque évidemment mais davantage la manière de la faire. Pourtant Elan est le genre de type à briller socialement mais lorsqu’il s’agit de réconforter, il ne sait plus faire de peur de mal faire. Pourtant, il lui ôtait un léger sourire, une petite victoire ! Il hochait doucement la tête en l’entendant se remémorer ce moment l’année passée et eut un léger pincement au cœur lorsqu’elle mentionnait qu’elle aurait espéré qu’ils soient tout les trois cette année. Lui aussi, il aurait aimé qu’ils soient tous les trois. « On le sera l’année prochaine ? Au pire si tu veux, je le fais. Ou alors tu ne regardes pas ? » Il avait bien du mal à prendre en considération son point de vue tant les choses étaient logiques pour lui. Quand bien même le cristal venait à exploser, il refuserait d’accepter quoique ce soit. Mais il le sentait. Callen était toujours là, son fiston était toujours là. Il haussait légèrement les sourcils lorsqu’elle lui demandait quel souvenir il avait prévu. Immédiatement, un sourire se dessinait sur ses lèvres. « Moi ? J’ai prévu un souvenir pour Nyel. » Il laissait échapper un léger rire, rien qu’à imager la tête qu’elle ferait en découvrant ce dernier. « Je vais lui envoyer une compilation de mes meilleures danses devant le miroir. Je l’imagine déjà soupirer. » Il n’osait pas le dire, de peur qu’elle se mette à de nouveau penser dans ses tristes pensées mais au moins, si le pauvre humain qu’il est meure d’ici là, elle se souviendra de lui. « Bon t’es prête ? Moi j’y vais. » Il suivait toutes les directives qu’elle lui avait données. Il se remémorait tous les pas incroyables qu’il a pu faire devant son miroir, il donnait toute l’énergie qu’il pouvait à l’intérieur avant de souffler dessus. Doucement, le cristal se mit à s’élever. Par simple précaution, il vérifiait qu’il n’éclatait pas. Ce ne fut pas le cas. Redirigeant ses yeux vers elle, il ajoutait. « Tu peux prendre le temps qu’il te faut Zizi. »

Son indélicatesse lui provoque un grincement des dents. Elle ne sait pas pourquoi il persiste autant à se nourrir de faux espoirs. Son optimisme le rend stupide et ne lui permet pas de faire son deuil. Continuer cette phase de déni obligera la plus jeune à lui donner un coup de main plus tard, à condition qu’elle ne s’enfonce pas dans les ténèbres. Egarée sans cet homme qu’elle pense avoir connu depuis toujours, la blonde voudrait pouvoir suivre les conseils de son aîné mais elle s’interdit de voir cette lumière dans le ciel. Pourtant, briller alors que la nuit est tombée serait un parfait hommage pour leurs escapades tardives, main dans la main, dans leurs gloussements d’adolescents égarés. Son cœur pèse lourd et risque de se briser encore un peu plus quand tous les signes seront réunis pour briser, une bonne fois pour toutes, les espoirs d’Elan. Elle relève légèrement son menton et tente de le déchiffrer. Est-il aussi naïf ? Est-elle en capacité de le protéger de la triste réalité ? Elle n’en sait rien mais une once de son égoïsme ne serait pas contre une petite compagnie. “ Non c’est à moi de le faire. “ Volontairement ou non, le barman la pousse un peu plus dans ses réflexions. Son excitation d’envoyer son cristal est presque communicative, au même titre que son talent en danse. Zylith se détend et échappe un rire. “ Dans dix ans, tu seras trop vieux pour les exécuter à temps réel. Elle pourra se rappeler de ta souplesse. “ Et qui sait ? Nyeleka finira par arrêter de soupirer un jour. C’est qu’à force, la demoiselle pourrait avoir des difficultés respiratoires. Enfin, peut-être qu’elle pourrait utiliser un autre souvenir : voir Callen exécuter la chorégraphie de leur père adoptif. En attendant, la shymer s’amuse à regarder le visage de son camarade. Sa concentration manque de lui provoquer un rire qu’elle contient pour ne pas ruiner ce moment d’exception.  Elle observe quelques minutes plus tard le cristal s’échapper de ses mains masculines avec une pointe d’envie. Zylith s’efforce de l’applaudir et d’alléger son cœur. “ Pas de casse ? Bravo ! “ Elle devrait profiter d’Elan, maintenant qu’ils n’ont plus l’occasion de se voir autant qu’avant. Le jeune homme revient à la charge et elle murmure sans le lâcher du regard. “ Tu comptes rester là jusqu’à ce que je me décide, pas vrai ? “ Il ne la force pas, il l’encourage. Elle baisse la tête et scrute son cristal. Pour lui, elle peut faire cet effort. Lui, il l’aurait fait à sa place sans hésiter mais elle n’a jamais eu son courage. Son estomac se noue au fil des minutes et d’une série de contradictions qu’elle garde privées.  Elle pourrait s’inspirer de l’idée de son ami pour compenser cette déclaration d’amour manquée. La boucle serait bouclée et son plus grand regret s’envolerait en même temps que le cristal. Mais au lieu de se contenter d’une répétition foireuse et d’un je t’aime trop bancal, la blonde se lance dans un autre projet. “ C’est parti. “ Zylith espère les rendre fier tous les deux. Elle mordille sa lèvre inférieure, témoin de sa nervosité avant de fermer les yeux à son tour. Elle lui offre, dans un mirage, ce souvenir si précieux, quand elle a réalisé l’importance de Callen dans sa vie par la présence de son cœur bondissant un peu plus fort. Si elle tente de garder la tête haute, c’est finalement une larme qui naît dans le coin de son œil avant de glisser le long de sa joue quand le monstre lâche le cristal. “ Regarde pour moi, s’il te plaît. “ Ne pas éclater en sanglots, répète-t-elle en boucle, ignorant royalement les voix étranges qui s’élèvent à son tour.

Le jeune homme répondait par un simple haussement d’épaule lorsqu’elle lui signifiait qu’elle voulait le faire par elle-même. Il s’en doutait. A vrai dire, cela avait davantage pour but de l’encourager plutôt que de la presser. Alors en attendant qu’elle trouve finalement le courage de faire son vœu, la conversation déviait sur ce qu’il avait prévu pour son propre cristal. Un membre de sa famille ? Non. A vrai dire, il n’y avait même pas pensé. Nyel était tellement parue comme une évidence comme n’y avait pas réfléchie davantage. Il aurait pu sortir les violons et faire une grande déclaration à ses parents mais non, il préférait faire le con et sortir ses meilleurs pas de danse pour sa meilleure amie. Ecoutez, chacun ses priorités dans la vie.

Si jusqu’alors, l’humain avait un sourire idiot et fier à la fois dessiné sur les lèvres, les traits de son visage se transformaient en une mine outrée par les mots de la shymer. « Mais quelle audace. » Comment ? Lui, plus assez souple dans dix ans ? « Dans 10 ans j’aurais QUE 35 ans, enterre-moi pendant que tu y es. » Le culot de la jeunesse ? « Et d’ailleurs, les Pankratz ont des très bons gènes. » C’est complètement faux mais écoutez, personne n’a envie de constater de nouveaux que toutes les maladies héréditaires de merde ont décidés de faire un meet up dans votre ADN. Non, partez de son esprit diabète, arthroses et cheveux blancs précoces ! Personne ne vous aime !

En attendant que les lois de la génétique ne fasse des siennes, le jeune homme se concentrait dans son vœu. Il y mettait toute l’énergie qu’il pouvait, comme si de cette manière elle allait avoir une meilleure qualité ou il ne sait pas trop. Et puis, lorsque ce dernier s’envolait, il vérifiait bêtement que ce dernier n’éclatait pas. Ce ne fut pas le cas et il n’en fut pas du tout surpris. Si vous voulez mon avis, c’est davantage les autres cristaux qui devraient se méfier avec une Nyel dans les parages … « Bien sûr que non pas de casse ! T’as perdue la raison ? On parle de Nyel là ! Elle tue des monstres avec les dents, elle est indestructible, un roc ! » Bon, il en faisait très certainement des caisses … Lorsqu’il dit qu’elle est indestructible, un roc, pas quand elle tue des monstres avec les dents … Ca il y a un monde où c’est vrai …

Le tour de Zylith était arrivé. Dans un silence qu’il ne lui ressemble pas, il se plongeait. Intérieurement, il priait parce que … on ne sait jamais ? Le temps semblait être au ralenti, le moment entre son vœu et le cristal quittant ses mains lui semblait interminable …
Il fallait avouer, très honnêtement, qu’il eut une réellement montée de stress en le regardant léviter. Il ne le quittait pas des yeux, histoire d’être certain de ne pas le confondre ou le perdre de vue. Et puis … « Oh ! OH ! OOOOOOOOOOOH ! » Il n’en avait jamais douté, pas une seule seconde même. Mais c’était la consécration de ses pensées. Il n’y avait aucun doute possible. « IL EST VIVANT ! » Hurlait-il à plein poumon ne quittant toujours pas néanmoins le cristal des yeux. « ZIZI ! » Il avait l’air d’un vrai taré à hurler comme cela partout mais cela l’importait peu, au-delà du fait que les mauvaises langues diront qu’il a l’habitude, il était bien trop heureux pour se contenir. « CALLEN EST VIVANT REGARDE ! » Le regard se tournant vers elle, il la saisissait par les épaules pour la secouer. Pourquoi ? Parce qu’il est idiot et surtout pour qu’elle réalise. Il se laissait même aller à des petits sauts de joie. Cela redonnait une énergie du feu de Dieu à celui qui n’en manquait déjà pas. Il était prêt à reprendre ses recherches ici et maintenant. Il se serait certainement mis à hurler Callen partout dans la foule si cette dernière ne s’était pas mise à s’agiter subitement. Bah, qu’est-ce qu’ils ont ????

Honorer son camarade avec un geste si simple, et pourtant, faire envoler ce cristal la surcharge d’émotions. Elle aurait aimé avoir l’aisance des autres. Elle a pris cette mauvaise habitude de se comparer aux autres, laissant son mal-être la ronger peu à peu depuis qu’il avait disparu de sa vie. Il était sa seule force et elle se moquait pas mal de son avenir, tant qu’il était à ses côtés. Mais maintenant, il ne lui reste que les souvenirs. Ce rappel fait naître une nouvelle larme qui suit le chemin de ses ancêtres avec brio. Ses mains tremblent quand le cristal s’élève vers le ciel. Elan tient ses engagements et semble poursuivre ce dernier du regard sans changer de comportement. Si elle n’est pas forcément en adéquation avec sa vision de la vie, sa façon de sourire pourrait la contaminer. Si elle osait le regarder lui aussi. Pas de cristal, ni d’ami en vue. Juste ses yeux embrumés qui se ferment pour se rappeler le sourire de son prince charmant. Est-ce que les années finiront par lui faire oublier son faciès ? Aurait-elle dû acheter un autre cristal dont elle serait elle-même la destinataire ? Impossible, pas vrai ? En attendant, il n’est pas question de voir le visage de son camarade se décomposer quand il comprendra qu’elle avait raison. Zylith s’abstiendra de cette fameuse réplique : je te l’avais dit, par politesse.

Malheureusement, Elan semble vouloir continuer son cirque. En réalité, elle ne l’entend pas très bien avec l’agitation autour du duo jusqu’à son cri perçant lui transperce son cœur. Vivant ? Est-ce qu’il avait suivi le bon cristal ? Ses mains continuent de trembler mais cette fois-ci, poussées par une autre émotion. Doute t-elle encore de ses paroles ? Comment expliquer l’inexplicable ? Comment pourrait-il être en vie ? Est-ce qu’il avait décidé de l’abandonner, volontairement ? Ça serait presque marrant vu que Zylith a passé presque sa vie entière à fuir les autres. Elle relève la tête, donnant enfin de la crédibilité à Elan quand il pose ses mains sur ses épaules. “ Qu’est-ce que … “ Tu fabriques ? Son regard se perd dans le ciel, comme cette fois, quand ils étaient perdus dans les bois, aux alentours de la secte, dont il était maître, au même titre que le royaume de son cœur. Bon sang. Elle se met à pleurer, encore, mais de joie. Dans l’excitation, elle bondit sur Elan pour le serrer dans ses bras. La blonde a toujours un lot de questions à poser. Mais il était encore là, sur cette terre. Peu importe ce qui a pu motiver ses choix, elle s’imposera dans sa vie. Comme le jour où elle a fait ses premiers pas dans un domaine bien trop dangereux pour quiconque.

“ Il est vraiment vivant ? C’est quoi ? Un miracle ? “ Ses sanglots vont bientôt tâcher le t-shirt d’Elan. Elle est perdue entre les rires et les pleurs. Une crise d’hystérie dans laquelle ils se plongent tous. Mais si la peur envahit leurs voisins, Zylith n’en prend pas conscience pour le moment. Elle recule d’un pas. “ Où il est allé ? Pourquoi il ne nous a rien dit ? “ Elle mordille sa lèvre inférieure et regarde les alentours, à la recherche d’une réponse. Mommy. Son échine se dresse et ses yeux s’écarquillent. “ Non. Ne me dis pas qu’il est là-bas. “ Il le torture ? Est-ce qu’il va bien ? Elle se met à hurler. “ Il faut qu’on aille l’aider, faut qu’on le retrouve. “ Mais comment pourrait-elle donner son nom aux pacifieurs ? Ils seraient insouciants, voire suicidaires. Et ils ont intérêt de se bouger très vite s’ils veulent aider Callen. Mommy. Elle a déjà entendu ce mot, mais d’où. Malheureusement, avec sa petite taille, Zylith ne peut donner aucune identité à l’ennemi, qui s’approche à grand pas. Sa main se resserre sur le poignet du garçon. “ COURS ! “ La shymer s’essouffle très vite, se mettant à hurler le nom de Callen, en total désespoir de cause.  

Même si il avait continué de vivre avec la certitude que Callen était toujours en vie, le jeune homme ne pouvait contenir sa joie. Extraverti étant un trait de caractère très marqué chez le Pankratz, il ne cherchait pas à se modérer. Non, on en entendait littéralement que lui. Tellement, qu’il en secouait la pauvre Zizi dans tout les sens, continuant de hurler à cause de cette foule devenue soudainement trop bruyante. Ils sont tous devenus fou ma parole ! Mais qui était le plus timbré dans l’histoire, celui qui sautille comme un demeuré et ne voit pas la horde de monstre ou ceux qui s’agitent pour leur propre vie ? « Je te l’avais dit ! » S’exclamait-il, toujours aussi bruyamment en serrant Zylith dans ses bras. Et rien à faire qu’elle allait très certainement tâcher son tee shirt préféré de morve, il était même prêt à l’arracher dans une imitation très réussie (ou pas) de l’incroyable Hulk pour exprimer sa joie. « Miracle ou non peu importe, l’important c’est qu’il soit toujours vivant ! » A son sens, c’était juste logique en fait mais il ne voulait pas gâcher le moment de la pauvre jeune femme. « Quoi ? » Il fronçait légèrement ses sourcils, n’ayant pas entendu sa première phrase et ne comprenant pas où elle venait en venir dans la seconde. « Mais tu veux qu’on aille où Zizi ? » Non mais franchement, déjà qu’il n’est pas une lumière mais alors avec ce brouhaha incessant, il ne s’entendait même plus réfléchir ! Et puis c’est quoi, toutes ces bousculades-là ? Ils sont vraiment tous ravagés ma parole !

Et puis, la lumière. Celle d’une mort prochaine ou juste une ampoule qui s’est allumée dans son cerveau ? Mommy ? Ses yeux se tournaient vers la provenance de ces mots et … OH PUTAIN DES MONSTRES ? Son cœur se mettait alors à battre la chamade et au même moment, Zylith qui lui attrapait le poignet en lui ordonnant de courir. Merde, merde, merde ! Qu’est-ce qu’ils foutaient là tous ces monstres ? Celestia n’était pas censé être l’endroit le plus sûr de la ville ? Alors Elan courrait comme si sa vie en dépendait, parce que c’était le cas, en s’assurant de ne pas lâcher Zylith. Franchement, après avoir perdu Callen, perdre Zizi serait une catastrophe. Il ne serait même pas sûr de s’en remettre un jour … D’une main, il fouillait rapidement ses poches pour en sortir deux potions. Un bref regard jeté à ces dernières, yes ! C’était les bonnes. Et vu le nombre de potions qu’il gardait sur lui, c’était vraiment un coup de chance immense. Il en tendait alors une à la jeune femme, difficilement, puisque geste appliqué sans s’arrêter de courir pour autant. « TIENS ! C’EST UNE POTION DE VITESSE, PREND CA ! » Si au moins ils n’étaient pas en mesure de combattre ces monstres, ils avaient au moins l’espoir de pouvoir s’enfuir.

Cette remarque a le don de faire grincer des dents mais elle résiste à l’idée de céder. Il marque un point avec son éternel optimisme mais un problème de taille forme une nouvelle barrière devant la shymer. Pour quelle raison ? Pourquoi n’est-il pas venu ce soir-là quand elle patientait, son sac rempli de maigres affaires sur le dos ? Elle n’ose pas croire qu’il ait pu lui poser un lapin. Par fierté, par confiance mais n’est-ce pas une nouvelle désillusion ? Zylith s’en veut de penser ainsi. Les pincements au cœur s’enchaînent avant d’être torturée par la force de son camarade. Celui-ci est peut-être un agité du bocal mais ce n’est pas pour une raison pour la secouer dans tous les sens. C’est bientôt elle qui va mourir sur place s’il ne se calme pas aussitôt. Malgré tout, elle se laisse perdre entre ses rires et ses pleurs. Toute cette panique n’est pourtant rien face à ce qui les attend. Le retour à la réalité les pousse à prendre leur clic et leur clac, abandonnant tout principe de festivité, au même titre que leurs voisins. Ces derniers ont déjà la poudre d’escampette depuis quelques minutes. La stupeur l’empêche de répondre au barman quand il ne semble pas comprendre où elle veut en venir. Alors, elle indique les monstres d’un signe du menton avant de prendre sa main pour courir vers une issue de secours, prise d’assaut. “ Je ne sais pas où on doit aller ! “ La jeune femme a parcouru de nombreux kilomètres depuis sa naissance mais elle a mis les pieds une seule fois ici. Un temps plus tôt, en compagnie du nouveau mort-vivant. Elle n’a pas su regarder le plan, ni l’agencement des rues, elle qui pourtant, fait attention à ce genre d’éléments. Callen l’avait tellement tiré dans tous les sens et cette année, la foule était encore plus importante. Zylith regrette instantanément cette erreur, elle qui se considérait le cerveau de l’équipe, un peu malgré elle. La belle ne peut pas prendre cette responsabilité et surtout, elle reste quand même une gamine qui ne sait pas garder son sang-froid quand ses émotions sont trop intenses. Comme aujourd’hui. Interceptant non sans mal la potion, elle en boit le contenu sans rechigner. Pourtant, quelques minutes plus tard, ils se retrouvent coincés. Ils ont peut-être pu doubler plusieurs personnes mais il n’y a pas 36 000 sorties. “ Où on va ? ELAN ? “ Elle se remet finalement à lui, le cerveau de l’équipe n’étant pas connecté. C'est là qu'elle réalise qu'elle a peut-être un instinct de survie et qu'elle apprécie peut-être la vie, à sa façon. “ Il faut peut-être grimper ? “ Elle tourne la tête dans tous les sens à la recherche d’une solution mais un gros costaud lui donne un coup de coude dans son estomac affamé. Se pliant en deux à la douleur, l’inconnu se met à l’insulter. “ Ça c’est pour nous avoir doublé, salope. “

Ca y est, c’est peut-être le grand jour pour Elan. Déjà, prenons tous en considération que si Zylith n’avait pas été là, il y serait déjà passé. Bon après selon l’effet papillon, il ne serait peut-être pas à la fête non plus mais peu importe. Ils devaient se barrer et vite. Pour le coup, il n’avait pas cherché midi à quatorze heures, ce n’était clairement pas le moment pour jouer les héros. Dans chaque combat contre des montres qu’il a pu faire dans sa tête depuis sa plus tendre enfance, la simulation est toujours sans appel : il perd. Pourquoi ? Manque de pouvoir, de don, de fléau ? Ce n’est malheureusement pas la détermination qui va décapiter la tête de ces fléaux. Alors pour compenser, il a toujours un maximum de potion sur lui. Cela relevait même du miracle qu’il ait réussi à piocher les bonnes pour Zizi et lui …

Assuré que la jeune femme l’ait bien réceptionnée, il avalait la sienne avant de tracer à toute vitesse. … Pour aller où ? C’est une question qu’il aurait pu se poser au préalable mais qui ne traversa son esprit qu’une fois bloqué parmi tant d’autres. Ses yeux cherchaient désespérément une sortie, une issue, une cachette, n’importe quoi ! Peu importe sa taille ou son confort, il lui fallait au mois de quoi cacher Zylith et il se débrouillera plus tard. Il envisageait donc l’idée de la jeune femme, celle de passer par-dessus le mur. Et puis alors qu’il tournait la tête pour la regarder, il vit cet homme lui donner ce coup de coude dans le ventre et entendit les paroles qu’il lui adressait.

Oh.
Mon.
Dieu.

Vous savez, Elan est super gentil. Franchement, c’est ce chouette type un peu relou mais avec une bonne patience. Sauf que là, s’en était déjà trop pour lui. Venait-il vraiment de frapper sa progéniture devant lui ? Oui, oui, absolument. Et honnêtement, cette vision ne lui plaisait absolument pas. Son sang n’eut même pas le temps de faire un tour qu’il voyait déjà rouge. Sal quoi ? Sans prendre en considération la carrure large du type, il le rattrapait fermement pour le forcer à se retourner. Ni une, ni deux, il le saisissait par les épaules pour lui assener un coup de tête d’une force qu’il ne soupçonnait même pas. Franchement, Nyel aurait été super fier de lui là ! 8 sur 10 pour la force, 9 sur 10 pour la méthode, 14 sur 10 pour l’ASMR du nez du type qui craque sur le coup et 7 sur 10 pour la chute du type qui s’écroule sur le sol. Encore inconscient de la douleur que son front lui assènera le lendemain matin, il attrapait la main de la jeune femme pour la guider vers la sortie. « Viens, dépêche-toi ! » En dépassant tout le monde. QUI VEUT SE BATTRE MAINTENANT ?