En général, elle avait l’oeil.
Dans le domaine, on pouvait même la qualifier d’experte.
Mais aujourd’hui, de toute évidence, elle avait commis une erreur, et une erreur de taille. Dans tous les sens du terme….
Ok, de première impression, Elan Pankratz était plutôt beau gosse. Sans compter son cul menton absolument séduisant.
Mais de seconde impression, dans une cabine d’essayage - comprendre ici un peu dévêtu- et après avoir pété un bouton de chemise par excès de muscles…. Clairement, s’il fallait se montrer honnête, elle avait sous estimé sa masse musculaire.
Agréable surprise, ne mentons pas non plus là-dessus, voilà qu’elle ressortait des prétextes vieux comme le monde pour les tailleurs dans le seul but de le mater.
… même si, pour ce point-là, elle préférerait garder la version d’un grand professionnalisme.
Les marques de naissance, la taille, tout ça.

« Pas tout le temps. Mais pour les trucs avec ma famille si. » une tenue trop décontractée et sa belle-mère essaierait de monter la tête de ce cher papounet contre le promis. Un manque de cravate et on risquait un fiancé imposé pas vraiment fun avec lequel elle se ferait chier pour le reste de ses jours.
Du coup, c’était mieux un faux ?
… carrément !
Le chaos n’avait pas de logique, par conséquent n’en cherchons pas.
« Moi je sais. Je pourrais toujours te les faire quand t’auras besoin. » de s’habiller ou de se déshabiller ?
Non coupable votre honneur, son âme innocente aurait même pu se lire ensuite  « Ou je t’apprendrais. C’est comme tu préfères. T’as jamais eu besoin d’enfiler une cravate ? »

Elle en avait croisé beaucoup des hommes en costards cravates à Ketterdam ?
Tout bien réfléchi, non.
« T’inquiètes, je vais emprunter un mètre. » … quoique… mesurer à mains nues, simplement au toucher, elle était convaincue d’en être capable !
…
Ok… elle confesserait son âme, quelque chose du genre, promis elle se repentirait plus tard des pensées impures qu’elle avait eues au cours de cette séance d’essayage !
Au moins une seconde ou deux… elle pouvait monter jusqu’à dix avec des efforts !
Ce n’était pas entièrement de sa faute après tout. Le fiancé était beau gosse. Le fiancé était plaisant. Elle ne pouvait que renouveler sa demande plus officiellement et accueillir un accord d’un sourire ravi.
Le projet “fin du monde” était lancé, et les défenseurs de Velaris n’étaient même pas au courant.

« C’est l’idéal. » non Menya, ce n’est pas l’idéal. Tu devrais avoir honte de mentir à une âme innocente.
… Bah il n’était clairement pas si innocent de vue.
Pensée qu’elle aurait ensuite, quelques secondes plus tard, après avoir taxé un mètre au vendeur assommé et être revenue auprès de son promis.
…
Il faisait un peu chaud dans ce magasin ou ce n'était qu’une impression ?
Est-ce que la clim’ était en panne ?
Est-ce que c’était permis de flirter avec un vrai fiancé au delà du mensonge et de la comédie imposés par leur contrat ?
… ok, elle s’égarait un peu. Mais douce vision face à elle, le mètre en main, le regard égaré… elle allait se reprendre « Ah oui ? Etrange, moi si. »  sans passer la chemise ?
C’était la vision qui était orgasmique… il faisait du sport, il s’entretenait. Impossible autrement.

Elle adorait son travail.
Ou plutôt sa connerie.
Avoir à prendre les mensurations d’un Pankratz, ça faisait partie des petits avantages que la vie plaçait sur notre route.
Mètre tendu, la patronne faussement professionnelle s’était rapprochée de son employé pour commencer à prendre les mesures avec soin.
D’abord des bras à la mention tout à fait honorable, un tour de poitrine plaisant, un autre de hanches sympathique… quelle gêne inexistante que la sienne que d’avoir à frôler sa peau au passage.
Compliqué de faire autrement version en caleçon, certes, mais elle aurait pu faire l’effort de rougir ou de s’excuser non ?

Mémorisant les informations au fur et à mesure, elle avait fait une pause aux sympathiques abdos pour les noter sur son téléphone.
« Tu veux boire quelque chose, je commanderais bien une boisson fraîche.  » juste revanche que sa connerie la fasse se sentir réellement un peu fiévreuse. Le Pankratz valait bien la maladie, et un presque progrès avait été en route ensuite « Au fait, c’est peut-être un peu gênant pour toi et je ne voudrais pas passer pour une patronne problématique. Pour le tour de bassin tu veux le faire tout seul ou ça ne te dérange pas que je continue ?  » c’est sûr que mesurer un cul… c’est peut-être un problématique pour une première journée de travail Menya.

Il fallait le voir se décomposer tandis que Menya lui annonçait qu’il devait porter une cravate. Non parce que, c’était une grande première dans son existence ? Il n’était pas tout à faire certain que son père lui-même en avait déjà porté une. En tout cas sur les rares photos de mariage de ses parents, ce dernier se présente complètement torché (sur toutes) et sans cravate aussi du coup … Mais cela ne devrait pas être bien compliqué, pas vrai ? Et auquel cas, il y a bien un con qui en aura inventé des prêtes à enfiler ?
Il était plutôt rassuré en entendant Menya lui dire qu’elle la lui nouera ou lui montrerai comment faire. Il avait quand même songé à regarder des tutoriels sur internet mais il connait son potentiel. On commence sur une vidéo de Jean Guy qui vous montre comment faire, sauf que Jean Guy il sait pas bien expliquer du coup on dérive sur Edouard et son titre pute à clique avant de terminer sur une vidéo d’un type qui construit un abribus. Internet, ce trou noir gigantesque …
« Non, j’vois pas pour quelle occasion j’aurai dû en mettre une ? » Baptêmes ? Entretiens ? Date ? Mariage ? Rien du tout, il s’est toujours présenté cou nu à ce genre d’évènement.

Quoi qu’il en soit, si aujourd’hui le temps du cou nu était désormais révolu, c’est presque cul nu qu’il allait finir. Ouais ! Vous comprenez, quelque millimètre de tissus pourraient complètement fausser les calculs de la pauvre jeune femme. N’en avait-il pas eu justement la preuve ? Si. Alors au-delà du fait qu’il est aussi naïf qu’un gosse pour avaler un bobard pareil, laissons-le plutôt croire qu’il rendait service à l’humanité et à ses boutons de chemises. … Bien sûr, c’est évident que tout les super-héros ont dû un jour se mettre à poil pour sauver le monde !

Ajoutons à cela un Elan qui n’est absolument pas pudique et presque l’inverse de complexé, et le voilà qu’il se déshabille sans rechigner. Une absence de gêne totale qui persiste habillé et à poil, sachez-le ! De toute façon … en avez-vous réellement douté ?
J’imagine que non.
Par contre, il commençait à douter de la fameuse promesse d’orgasme dû au contact des chemises. Personnellement il n’avait rien senti ? C’était peut-être dû à sa fameuse maladie diagnostiquée par Nyel ? … Il fronçait légèrement les sourcils, un peu perdu. « Ah c’est orgasmique pour ceux qui nous voit mais pas pour nous ? » Non, laisse tomber Elan …

Il la laissait prendre ses mensurations bien sagement et innocemment. Il se laissait guider comme un mannequin, levant et baissant les bras lorsqu’elle lui demandait. Néanmoins, au fur et à mesure qu’elle notait, il s’inquiétait soudainement.
« Alors ça donne quoi ? » Comment ça, ça donne quoi Elan ?
Cette série de mesure lui avait foutu la pression. Il avait l’impression que tout se jouait là maintenant, tout de suite. Mais qu’est ce qui se jouait ? Absolument rien mais il avait besoin de savoir si ça allait. Imaginez qu’elle lui détecte une maladie par la mesure ? Il n’en sait rien ? Savez-vous combien les maladies peuvent être invisibles ?

Et puis de nouveau, le choc culturel. Ce pauvre Elan ignorait les services offerts par cette boutique de Celestia. C’est donc tout naturellement qu’il demandait. « Mais tu veux commander ça où ? » Là d’où il vient, les boutiques sont juste des boutiques ? Pas de toilettes, pas un petit verre d’eau, rien du tout. De ce fait, il imaginait Menya le planter soudainement pour aller s’acheter une boisson.
Et puis son air béat n’était pas près de s’arrêter lorsqu’elle lui demandait si il voulait se mesurer lui-même le bassin de peur de paraître problématique. Attendez, le bassin c’est où ? Enfin attendez, il sait vu qu’il en a déjà donné des coups mais il fallait mesurer où précisément ? « Non va y fait-le, j’suis même pas sûr que je saurai le faire ? » Non, il ne voulait surtout pas se foutre la honte. « De toute façon, c’est pas problématique si j’suis consentant ? » Oui, au cas où vous en doutiez, cette phrase était littéralement à double sens. L’aurait-il prononçait aussi sereinement si un vendeur avait fait ses mesures ? Absolument pas. … Bah quoi ? C’était de sa faute si il n’est qu’un pauvre homme sans défense face à une patronne canon ? Et puis, on ne sait jamais ? Sur un malentendu, une montée en flèche de l’échelle des gestes intimes … au moins elle savait non ? Bon, pour ça, il fallait au moins savoir si elle avait compris la subtilité de ses paroles. Il était bien passé à côté de toutes celles qu’elle a pu lui faire alors …

De là d'où elle venait, pour ce qui concernait les hommes de sa famille en tout cas, savoir nouer sa cravate était une base au moins aussi peu esquivable que celle de savoir faire ses lacets.
Trop de cocktails. De nombreuses petites sauteries. De nombreuses occasions pour les hommes de dégainer la cravate ultimement assortie à leur tenue du soir.
Mais Elan, lui, il les faisait les cocktails. Dans son bar de Ketterdam.
Est-ce qu’une vie sans “nouage” de cravates était si étonnante que ça ?
Hum… elle n’en savait rien, mais en ce qui concernait son père, elle était persuadée qu’il aurait adoré ça….
A voir la manière dont il défaisait toujours sa cravate avec le soupir ultime du bonheur, elle avait en tout cas l’impression que l’accessoire n’aurait pas manqué à la vie de Morgan Lovàas s’il avait pu s’en passer.

« J’continuerai à te passer la corde au cou alors. » range ce clin d’oeil Lovàas, c’est même pas amusant !
ça l’amuserait en tout cas bien moins si un jour la plaisanterie venait à être partagée avec toute la petite famille Lovàas.
Au moins, on ne pourrait pas lui retirer qu’elle avait choisi avec goût le sujet principal de sa supercherie.
« A priori, dans ton cas, oui. »  si le tissu n’avait aucun effet sur son prétendu fiancé, l’absence de ce dernier sur sa peau ne manquait pas de faire son petit effet de son côté.
Perversion. Bien loin du couvent, sa vie avait fait le choix de s’orienter.

Inutile de lui lancer la pierre… l’homme était vraiment pas mal. Son travail génial. Et avoir un mètre dans les mains à présent, face à lui, ce serait sans aucun doute possible le meilleur moment de sa journée.
Un moment qui réchauffe définitivement.
Important de briser la glace entre eux ?
Des excuses bancales du genre, on en doutait pas, elle devait en avoir pas mal.
Même du genre à se servir de la dernière question du promis pour nous sortir qu’elle ne faisait qu’un simple bilan de routine.
« Tes mensurations ?  » c’était le sujet non ? « Je dirais bien que t’es embauché, mais c’est le genre de réponse problématique entre un employé et sa patronne…  » … ouais, évidemment, le genre de trucs qui vous foutait un avocat sur le pas de votre porte le lendemain.
Sa défense était en béton. Pas besoin d’embaucher son propre avocat pour répondre.
Elle avait trébuché sur un mètre qui s’était retrouvé malencontreusement dans sa main. Atteinte alors d’une maladie incurable qui l’obligeait à prendre les mesures de tout homme à demi-nu qui se trouvait sur sa route, elle s’était alors trouvée face à un Elan qui, comme par hasard, ne portait que trop peu de tissus sur lui.
Ouais, dans le fond, elle n’était que la victime de l’histoire…
… et de sa connerie.

Actuellement davantage victime de la vision imposée par son fiancé, il avait été urgent de commander un rafraichissement « A un vendeur. » … vendeur appelé, boissons fraiches commandées, le tout comme si la scène était normale… décalage évident, elle ne s’imaginait pas que la même scène était difficile à jouer à Ketterdam.
En même temps, venant de celle qui hochait la tête pour prendre le tour de bassin d’un homme qu’elle ne connaissait que depuis quelques jours…
… même à Celestia, Menya Lovàas pouvait passer comme l’habitante d’une planète lointaine, très lointaine.
« Tout juste !  » si… ça reste problématique « Et puis, c’est strictement professionnel.  » est-ce qu’elle était capable de jurer ça ?
…
…
C’était strictement professionnel. Mais le problème des gens de nos jours, c’est que beaucoup ne savait pas mêler plaisir et travail. Dans son cas, elle adorait son métier !
… prendre les mensurations d’un bel homme auquel elle était faussement fiancée c’était…
… comme son bonus ultime du mois ?
… en quelque sorte… mais en mieux… malgré ce cul moins rebondi que prévu ?
Leurrée. Elle était leurrée par la vue du jour. Mais tandis que le vendeur revenait avec un plateau, elle n’avait pas commenté l’absence de centimètres en notant les mesures sur son téléphone « J’aurais dû prendre un fiancé moins beau gosse, c’est sûr que tu vas me déconcentrer. » plait-il ?
Rien. Elle n’avait rien dit.
Pro. Toujours aussi pro. Et prête à piller les rayons après un verre dont la fraicheur était clairement salvatrice.

Jusqu’alors, les cravates étaient signe d’une élite dont il ne faisait clairement pas parti. Cependant, les choses ont changées. Qu’il le veuille ou non, il allait bien devoir se plier aux règles pour rentrer parfaitement dans son rôle. Vu les bénéfices à clé, est-ce que c’est un pauvre nœud de cravate qui allait lui barrer le chemin ? Certainement pas. D’autant plus que sa patronne est plutôt conciliante. L’aider à faire ses nœuds de cravate ? Chaque jour de sa vie ? Sans qu’il ait à fournir le moindre effort ? Est-ce un rêve éveillé ?
Il fallait voir son sourire complètement con en l’écoutant dire qu’elle continuera de lui passer la corde autour du cou. Non parce que dans son imaginaire des rois des débiles, il s’imaginait être un grand étalon sauvage qu’elle cherche à dompter. … Quelqu’un se porte volontaire pour lui expliquer qu’il sera juste un joli petit toutou qui remue la queue ?
En parlant de queue, il commençait sérieusement à s’inquiéter de l’absence d’orgasme. Non parce qu’elle lui avait promis des sensations de dingue en portant ces vêtements mais jusque-là, il n’avait encore rien eu … Avait-il été trompé ? Evidemment que non ! D’après Menya, c’est visiblement selon la personne ! Elle, elle les sent quand ils sont sur elle et lui, il le fait sentir aux autres ! Elan, homme de partage, une bonté sans précédent ! « J’suis un peu déçu en vrai … mais bon, si au moins tu l’as senti, c’est le plus important ! » Même si bon, il aurait aimé sentir cette jouissance textile lui aussi …

Ce n’était clairement pas le moment de se lamenter sur son sort. Ses mensurations prises, il avait hâte de connaître sa conclusion d’experte. Il en avait même un léger stress, un peu comme si il attendait le diagnostic fatidique d’un médecin sauf que au lieu d’entendre : vous êtes malades, il pouvait potentiellement entendre un truc du genre : le haut de ton corps est trop musclé comparé au bas, tu as la même morphologie qu’un criquet. A-t-il envie d’être un criquet ? Non. Connaissez-vous quelqu’un qui a envie d’être un criquet ? Non plus … Alors c’est bien évidemment sans grand étonnement que l’idiot du village qu’il est, poussait un soupir de soulagement lorsqu’elle lui confirmait qu’il était embauché. Pas de corps de criquet du coup ? « Tu sais, je trouve qu’il y a rien de problématique depuis le début. J’vois même pas ce qu’on pourrait faire de problématique en vrai. » Est-il aveugle ou complètement con ? La deuxième, évidemment, sans aucun doute. « On s’assure de la sécurité de tous et que chaque trachée reste indemne après mon passage. » Bien sûr …

Une nouvelle fois, ce vide profond dans ses yeux. Un vide qui s’approfondissait davantage lorsqu’elle lui annonçait qu’elle comptait demander à un vendeur. Non mais il avait bien compris, un vendeur de boisson mais où ? … Qu’est-ce qu’elle fait ? Pourquoi est-ce qu’elle demande ça a un vendeur de magasin ? Figé, les yeux fixés, il ne comprenait absolument rien. Est-ce qu’elle a perdu la tête ? Attendez, pourquoi est-ce qu’il lui répond par la positive ? Il aurait presque pu rester là, comme un con sans bouger jusqu’à ce que le vendeur revienne si elle ne l’avait pas ramené à la réalité. Si elle pouvait lui mesurer le bassin ? Evidemment, on laisse les professionnels faire. Cette scène aurait très certainement pu gêner le doux commun des mortels mais pas le Pankratz. Pour la simple et bonne raison qu’il est le Pankratz originel. Le seul. L’unique.  Il ajoutait même : « Je te trouve vraiment très pro d’ailleurs ! » Professionnelle. C’est le mot. Evidemment. Même lorsqu’elle le qualifiait de beau gosse ? Evidemment. Toujours pro. « Moi ? Te déconcentrer ? C’est vraiment pas mon style. » Alors là, c’est absolument pas son genre ouais. … « Je pense plus que c’est toi qui me déconcentreras de mon jeu d’acteur incroyable. » Incroyable, sans aucun doute … « Parce que toi, tu m’auras déjà vu dans mes tenues, vu que tu les auras choisies, alors que moi je vais avoir la surprise à chaque fois. » Il s’imaginait déjà la mâchoire tombante. « Pis en plus, on a ce qu’on mérite. Tu aurais choisi un mec pas ouf, personne n’y aurait cru. » Ah ? La modestie a disparu de la terre ?

Toutes ses mensurations notées, il était de nouveau prêt à faire encore quelques arrêts cardiaques à la vue des prix et à apercevoir ce nouveau style qui allait être le sien. « Je me rhabille tout de suite du coup ? Je remets mes fringues de bases ou on rentre direct dans le rôle ? » Non, va donc te balader à poil Elan, super idée Einstein. « Mais au fait, tu veux acheter combien de tenue ? Celle-là tu gardes ou pas ? » Trop de paroles, pas assez d’action Elan, rhabille-toi !  Il enfile les vêtements en cinquième vitesses, remarquant finalement le vendeur revenu avec les verres. … Un vendeur de vêtement. Revenu avec des verres. Dans un magasin de vêtements. « Attend, ils ont un mini bar ici ? » Attendez, il a de la concurrence même ici ?

Rien de problématique
Est-ce qu’Elan Pankratz était l’employé parfait ? Son employé du mois ? Celui qui aurait une belle prime au moment des fêtes alors qu’il venait seulement de rentrer dans l’entreprise, déclenchant ainsi la jalousie des autres ? L’homme à abattre en somme.
Hum. Il était sur le bon chemin. Clairement, à cette heure précise, Menya Lovàas ne regrettait toujours pas son choix de fiancé malgré un assassinat par bouton envolé qui venait de laisser filtrer un rire par ses lèvres.
« C’est vrai, il n’y a rien de problématique à être les protecteurs des boutiques de Celestia.  » même quand l’un d’entre eux était la raison du danger ?
Qu’importe. Tant que rien n’était problématique dans cette situation ! Retenons l’essentiel, la technique faisait toujours gagner un temps précieux.

Pour recevoir une introduction des compliments qu’elle aurait plus tard de ses jolies tenues ?
Hum, ce temps était effectivement tellement précieux. On ne lui disait bien sûr jamais assez qu’elle était jolie sauf dans quelques cas dont la liste complète serait établie et transmise plus tard. Mais en guise d’exemples, on retrouvait dans ces lignes : le fait d’être un individu peu charmant rempli de lourdeur, ou de lui dire pour la rabaisser … comportement facilement résumable par un sois belle et tais-toi.
Bref, l’un comme l’autre, ils semblaient savoir ce que leur reflet valait dans un miroir. Des points communs, ça semblait leur en faire pas mal. Et si ces points-là en désespéreraient certains en pensant à leur association, celui dont on parlait maintenant avait fait hocher à la tête à la future mariée « C’est vrai que la totalité de ma garde robe sait me mettre en valeur. » c’était pas plutôt elle qui mettait en valeur sa garde robe ?
Si. Mais dans la vie, il fallait savoir faire preuve d’un peu de modestie !
…
« Tellement ! On aurait murmuré des “mais qu’est-ce qu’elle fout avec ce mec-là ?” » alors que les gens se contenteraient de fuir en déplorant le jour où ils s’étaient rencontrés.
Brad aurait été mieux. Pour la paix dans le monde, il aurait été mieux.

Mais l’air sceptique était ensuite passé… « Tu veux remettre tes fringues à toi après avoir porté ça ? » Menya, s’il rentre chez lui, faudra bien qu’il re-rentre dans son rôle de Pankratz non ? « T’as pas envie de profiter de la journée pour montrer que ce pantalon te f… » fait un cul d’enfer ? Ah oui… ça c’était peut-être réellement problématique si on le disait tout haut ! Complètement vrai, mais pas moins problématique ! « … ne forme qu’un avec toi tellement tu le mets en valeur ! » pas si mal rattrapé que ça. Mais rattraper sa connerie, c’était un sport quotidien chez la Lovàas « Oh bébé, on est loin d’avoir terminé. On va piller cette boutique, t’es pas prêt. » non, ça clairement, il n’était pas prêt. Pas plus qu’il ne l’était  à se faire servir à boire pendant qu’il faisait du shopping … « Non, pourquoi ? » parce que ça lui fait de la concurrence !! Demain les libraires allaient se lancer dans la charcuterie, et puis quoi encore ?

Mais après avoir fait tinter son verre contre celui de son fiancé, et avoir bu quelques gorgées. Après avoir confirmé qu’il gardait cette tenue… « Donne la au vendeur il va la mettre de côté pour nous. » … elle était partie vers les rayons pour revenir quelques minutes plus tard, accompagnée du même vendeur, les bras chargés d’un tas de vêtements digne des plus hauts sommets… une petite séance de “On prend ça, et ça aussi. Faut qu’il essaie celui-là, et ce haut ira parfaitement avec. Vous l’avez une taille au-dessus ?” s’était jouée de toute évidence « Tiens mon coeur, j’ai trouvé plein de tenues pour toi. » … fallait-il vraiment qu’il essaie tout ça ?
Depuis quand c’était une corvée d’essayer des vêtements à la coupe si parfaite et au tissu de qualité ?
C’était un rêve éveillé. Elle ne voulait rien entendre.

Il ne fallait pas avoir un QI extrêmement élevé pour savoir que ce plan était une catastrophe. Les conversations étaient lunaires, il n’y en avait pas un pour rattraper l’autre. Alors on pourrait penser que ce départ un peu boiteux était simplement dû à une différence de classe sociale qui pourrait rapidement s’estomper mais … vous avez vu le néant dans les yeux de Elan ? Non parce que je veux bien concevoir que son cerveau ne brille pas de mille feux par habitude mais alors là, c’est une nuit sans étoiles. Des vêtements plus chers que son loyer, un pauvre vendeur qui bien que blessé vous ramène à boire dans une boutique et des tissus apparemment orgasmique … Il est complètement perdu le type, l’innocence de Callen a pris possession de lui.
Mais malgré ça, malgré le présage de madame Irma qui dit, je cite : c’est la merde, il reste persuadé qu’il va être à la hauteur. Le monde a beau douter de Elan Pankratz, mais sachez qu’il ne doute jamais de lui. A-t-il raison ? A-t-il tort ? Je pencherai davantage pour la deuxième mais là n’est pas le sujet. Alors dans sa connerie incroyable, il s’élance dans des petites blagues comme quoi elle aurait pu tomber sur un vieux type. … … … L’inconscience le fait rire à ses paroles, ironie en sachant qu’il n’est pas le fameux bon plan recommandé …

Ce n’est pas tout, mais une seule tenue n’a été sélectionné pour le moment. Alors quelques temps avant de s’interroger sur une potentielle concurrence dans les boutiques de Celestia, il voulait connaître la suite du programme. Etait-ce déjà la fin de leur session shopping ? Non. Ce n’était que le début. En fait, le mot parfait sortait de la bouche de la jeune femme : Pas prêt. « Bah, ma tenue est pas si horrible que ça ? » Il fronce un peu les sourcils en enfilant ses vieux vêtements, histoire au moins de ne pas se balader à moitié nu. « Si ? » Pour les gens de Ketterdam, ses fringues sont sûrement ok. Pour ceux de Zaun, sûrement encore plus géniaux mais pour les gens comme Menya, ils sont plutôt … Euw.

Et puis, le choc. Tout est allé très vite. Une boisson commandée dans un magasin et c’est le monde qui s’écroule. Dans un premier temps, depuis quand on peut commander à boire dans un magasin ? Ensuite, raccourcis rapides : s’ils ont à boire, ils ont un barman. Bah oui parce que vu l’opulence du lieu, ils ne devraient avoir que le meilleur. Sauf que le meilleur c’est lui. Qui est cet homme ? Est-il prêt à l’affronter dans un duel de cocktail ? Non. Parce que sa fiancée brise rapidement le mythe en répondant à la négative à sa question. Il n’y avait pas de bar, calme toi Elan. « Ouais c’est bien ce que je me disais. » Bah oui, t’as quand même pas réellement cru qu’il y avait un bar caché derrière un étale de vêtement. « Sinon ils m’auraient appelé. » Ah … Ce n’est vraiment pas parce que tu t’es dit que ça avait aucun sens … « Je suis le meilleur barman du pays, ils ne seraient pas passés à côté de moi quand même. » Ouais, évidemment ….

Le verre réceptionné, déjà vidé après avoir trinqué avec sa fiancée, trop habitué aux shooters, il refourgue les vêtements au vendeur. Honnêtement, cela ne lui a prit que quelques secondes pour effectuer cette action mais peut-être, des secondes de trop ? A peine retourné, Menya avait déjà disparu. Et franchement, c’est bien parce que le vendeur qui l’accompagnait était plus ou moins grand sinon il aurait juré l’avoir paumé dans le magasin. Encore un peu et il aurait fait un message audio : la petite Menya est demandée à l’accueil. Enfin, la tête du type faisait office de marqueurs donc il pouvait la retrouver. Mais seulement, que devait-il faire ? L’attendre bien sagement ici ? Certainement, elle n’avait pas l’air d’avoir besoin de ses conseils en matière de mode … Alors en attendant, il reste planté là. Les mains posées sur ses hanches, regardant le marqueur se déplacer avant de tourner finalement la tête vers le vendeur posé auprès de lui. Quelle erreur ce dernier n’avait-il pas fait en rester à ses côtés ? Être sociable qu’il est, Elan se mit alors à lui taper la discussion en attendant. Le visage du type est indescriptible. On ne sait pas réellement si il est surpris d’avoir été remarqué ou complètement saoulé par ses paroles. En tout cas ce qui est sûr, c’est l’expression de soulagement qu’il s’est affiché sur son visage lorsque la jeune femme est revenue. « Bah, il est où le vendeur avec qui tu es partie ? » Il cherchait un léger instant avant de comprendre qu’il est dissimulé derrière la tonne de vêtement se mouvant juste à côté d’elle. « Ah. » Bah ouais, une pile de vêtement ne peut pas se déplacer toute seule. Bien joué Pankratz.

Alors il commence à enchainer les essayages. Enfile, avis de Menya, retire. Next. Enfile, avis de Menya, retire. … Autant vous dire que au fur et à mesure du temps, il venait à se demander si il ne fallait pas en faire une catégorie olympique. Il en essayait tellement qu’il ne savait même plus. « Mais je l’ai pas déjà essayé ça ? » Non Elan, là c’est un vert empereur et l’autre c’était un vert canard … NUANCE. Il en était presque à bout de souffle. En plus, avait-il son avis sur la question ? Absolument pas … « Mais du coup, ça c’est les fringues pour toute l’année non ? » Non parce qu’il y avait plus de vêtement que de place dans tout ses meubles … « Ils peuvent pas changer la musique au fait ? J’sais pas moi, mettre des trucs qui bougent genre Franky Vincent ou j’en sais rien. J’vais m’endormir, on dirait la musique d’attente chez le dentiste. »