Sur la ville se déverse un crachin persistant, gracieuseté d'un bien froid printemps. morne et triste, un petit rien pourtant en comparaison de l'averse désemparée qui étreint le domaine des wicke. car au-dessus de leur toit l'agaçante bruine se fait féroce, véritable déluge répondant aux émotions de l'allégorie du désespoir : à la tempête nommée misty.

darling, make it stop, plaide nebula pour l'énième fois, sans succès. sa sœur est rongée par un mal aussi profond que l'est son impact sur le temps : une culpabilité sans nom mêlée de peine, celle d'avoir essuyé un échec au goût de tragédie. d'avoir manqué causer la mort d'une sœur, seulement pour découvrir que le frère qu'elle cherchait n'avait peut-être jamais été transformé comme elle le pensait.

de leurs doutes les deux sœurs conservent pourtant le silence, mutisme dicté par nebula : elle veut être certaine, retrouver trace de cette silhouette aperçue des mois plus tôt avant d'en souffler mot à quiconque. et l'idée la hante : shade, shade, shade ! partout dans ses pensées, envahissant jusqu'à ses songes. shade en vie, seul, de l'autre côté du mur, et son humeur s'accorde au temps : démunie.

alitée depuis la débâcle de la chapelle, nell subit le lent passage des heures, espérant qu'une distraction vienne percer les ténèbres, égayer la nuit. à cette date, à cette heure, une ombre devrait déjà s'être faufilée à l'intérieur— mais rien. rien depuis des semaines, rien depuis presque un mois, et si elle s'est d'abord offensée et murée dans un agacement borné, c'est à présent la déception qui crépite sous son épiderme brûlant. 

le pas est encore fragile, le souffle pénible, vestige de côtes brisées — mais l'air frais lui donne l'illusion d'être à nouveau en vie lorsqu'elle se faufile dans sa voiture, son chauffeur personnel réveillé en pleine nuit en vue d'une escapade interdite. c'est avec réticence qu'il s'exécute, d'autant plus dubitatif à la vue de l'adresse qu'elle lui tend : celle d'un nightclub réputé décadent, et si elle préférerait mourir qu'y être surprise, la voilà pourtant qui s'y rend. sa jambe bat nerveusement la cadence tout au long du trajet, à l'arrivée son nez s'est cent fois plissé de dédain. it can't be here, souffle-t-elle en souffrance, prenant un instant pour se résoudre à sortir lorsque la portière lui est ouverte. wait for me, ordonne-t-elle et il proteste, mais nebula est intransigeante et n'accepte guère qu'on lui oppose le moindre refus.

— et comment ose-t-il alors, cet énergumène, cet odieux vampire, pénétrer dans sa vie telle un ouragan, tout y bouleverser puis en disparaitre ? elle serre les poings, d'outrage et de quelque chose d'innommable, dont le goût s'apparente à de la déception, peut-être une once de manque. avec dégoût elle dépasse un corps allongé au sol, basculé sur le côté, baignant dans ses relents d'alcool, et les odeurs agressent son odorat habitué à rien d'autre que la délicatesse des fragrances celestiennes. avec mépris elle analyse les corps entremêlés, suivant les directives du voyant de reine pour mener sa quête. avec stupeur elle le reconnaît à son bras maculé de tatouages — son bras apposé contre le mur, près du visage d'une conquête dont il est plongé dans le cou. la respiration ne s'en fait que plus pénible, lourde, difficile, nebula se sent des envies de meurtre. d'avoir fait ce trajet, incertaine, pour le trouver là, dans les bras d'une autre. am i interrupting? lui crache-t-elle par-dessus la musique, et son regard est de feu.

C'est dans les murmures inaudibles de l'esprit que le tourment persiste. celui qui ne laisse aucun répit pour l'homme et la bête. ils avaient goûtés l'ivresse ; du parfait, de l'unique. celui offert par la nymphe aux cheveux ébène. cette reine de l'horrible mais du délice. traître étaient les envies, les désirs - depuis ces rencontres tardives et ces échanges loin des regards. lui vulgaire moins que rien, se faisait malmener par des sentiments inconnus - désagréable se trouvait être les sensations, la dualité de sa raison. car tout était bancale en son sein, pourtant le fantôme de l'amazone résidait encré dans son esprit à chaque nouvelle lampé d'inconnu, à chaque tragédie qu'il commettait. aux corps balancés dans le fold depuis la dernière rencontre, une amertume, une frustration singulière pouvait se voir dans le geste, le regard.

tenu en écart par les rayons du soleil, c'est à tourner en répétition dans son lit de fortune pour trouver le repos mais à quoi bon, quand ses pensées troublantes n'arrivent à être passées sous silence. la décision les soirs venus n'était guère joyeuse. à courir après l'oubli de cette dernière. elle qui résidait plus haut, là où tout le mépris qu'il possédait ne pouvait être contenu. c'est pourquoi il y avait tant de méfaits plus bas. aux corps sans vie de ces malfrats ainsi qu'à ceux de ces demoiselles utilisées comme substitut sans une once de regret.

hanté, voilà ce qu'il était et sur le cadran affiche l'heure des fléaux. minuit pile pour s'engager dans une nouvelle danse de décadence. c'est sans notice qu'il s'embarque dans un voyage aux relents de déjà-vu. en quête de tuer l'espoir, le désir, la passion. des habitudes malsaines, le playground était le terrain de jeu parfait. pour ces âmes éclatées, ces êtres vidés. raven n'échappait pas à cette règle ; lui qui se pensait démunis de ces émois - pourquoi fallait-il qu'il se fasse prendre en guet-apens par le destin. était-ce là, une manière sarcastique de lui faire payer ses croyances et ses affronts ? encore une fois, toujours autant troublé et cela malgré les minutes qui défilent, c'est pourquoi, ce soir encore, le carnage se dessinait en gage de représailles face au destin.

aux vices latents ; c'est emprisonné par sa carrure que l'inconnue réside ; celle qui n'avait rien en commun avec l'être envié. niché dans son cou, le parfum lui donne envie de vomir. c'est quand la main frêle de l'anonyme se dépose sur son torse, qu'il a envie de lui briser le cou. sonne désastre de plus, car depuis elle, il n'arrivait plus à assouvir n'importe quel désir primaire. flamme infernale avait tout brûlée sur son chemin, maudit même dans ses plus simple instinct. am i interrupting ? résonne parfaitement par dessus la musique, presque à le faire sursauter. ce timbre de voix, qui fait trembler, compresser l'acier qu'était son battant. c'est peut-être pour ça, que le corbeau a un certain temps avant de finalement délaisser sa piètre distraction, sa maudite drogue du dévergondage. you kind of are, yeah. crache le seigneur du terrible sans chaleur, cachant la surprise de la savoir ici, en ces lieux. leave us. congédie celle qui fût sauvée par la peste qu'était nommée nebula wicke.

était-il capable de se battre ce soir ? contre ses désirs, ses frustrations ? si il se devait d'être honnête, il savait que c'était perdu d'avance. it's true then, you've met him. miroir de bonheur, celui qui pourtant, l'avait embusqué en dévoilant sa cachette à l'ennemie. se retournant enfin pour lui faire face ; à celle qui faisait perdre pied. my twin. prononce l'indéniable, aux seules différences, les tatouages et le regard. car ses bourgeons étaient délaissés de toutes lueurs quelconques. karma is the nice one, the smart one even. but he, sometimes, likes to create a little chaos here and there. sosie avait toujours possédé la malice, seulement, il ne pensait plus vraiment être sujet ou victime de cette dernière. ' must run in our blood. car après tout, savage n'était pas qu'un nom ; à ses yeux, c'était une manière d'être, une sorte d'héritage putride bon qu'à n'amasser chaos.

faisant quelques pas en arrière, il laisse son dos épouser le mur sordide. à ce rictus infernal qui se forme ; l'amertume est frappante. missed me ? bras se croisent, en même temps que lui se ferme à toute éventualité d'être cordial. or you wanna get your fix, hm ? au poison qui dégouline des palabres, c'est une arrogance mal placé qui dicte les mots - car ses maux le martèlent depuis trop de nuits à errer en quête d'un semblant d'elle. retranscrit ses propres actions pour les lui attribuer. elle, vandale du fléau. me leaving your life was a gift for both of us. reconnaît alors l'indéniable, celui qui lui avait hurlé de fuir car le danger lorgnait dans ses sillons, à vrai dire, il était le danger.

aux regards vadrouillant, il laisse ses iris voyager sur ceux qui dévisageaient l'astre contraire. they're all staring at you, princess. just like me. car elle envoute, la royale, de ses formes, de ses traits délicats, de sa luxure. au collier de perles qu'il voulait arracher tant était qu'il bloquait l'accès au cruor tant convoité. if shit goes down, what am i supposed to do, huh ? demande le voyou alors qu'une farandole d'avortons s'imaginent déjà en faire leur jouet pour la nuit. délivre ses bras pour attraper le cellulaire - en quête de maudire le jumeau qui avait rendu possible cette nouvelle rencontre. save you again, like a good pet ? tout est noirci en ces lieux, ce genre d'endroit qui n'était réservé qu'aux dévergondés, à ceux qui n'étaient friands que d'un peu de bon temps. and get thanked by getting spit on ? car de leurs échanges, il ne se voyait qu'ainsi - madame l'avait bien fait remarqué mais, il jurerait ne pas désirer plus de cette dernière mais, ce serait mentir après tout, ne venait-il pas de l'avouer à demi-mot ?

c'est peut-être pour cela qu'il s'énerve seul, de là où il se trouve. car son corps se contracte et lui ordonne de briser le néant qui les sépare - lui, trop orgueilleux pour se voir être refusé, ou bien trop peureux de tomber encore plus dans l'abysse qu'était la malédiction de l'avoir rencontré et de ne plus désirer personne d'autre. au dernier message échangé avec l'identique, il range l'objet dans sa poche. you truly are getting on all of my fucking nerves. clinque dans l'air alors que le regard s'assombrit en même temps qu'il se dépose sur la belle. il n'arrive pas à comprendre, toutes ces choses qu'elle a engendrée - par juste sa voix, son parfum. ses armes, aussi basique qu'un bout de bois avaient réussies à rendre un fléau des bas-fonds qui collectionnait les crimes comme ci de rien n'était, en simple gamin qui s'attelait à faire attention à chacun de ses gestes, à chacune de ses paroles. être quelqu'un d'autre, c'était bien cela qui le rendait furieux. you are a prey here. fuck, if you didn't pay attention, you've always been one. il ne musèle pas sa parole, au contraire, fléau gronde de sa vérité - car la bête est las de ces mises-en-garde et l'homme lui, arrive à terme avec les faux-semblants. and still, you come running straight to the lion's den. vient cacher ses mains dans les poches de son pantalon. au ton dégradant, le regard jugeur quand la robe blanche pur ne colle pas à l'endroit impur - 've always been nice enough with you to not go on my merry fucking way of doing things, i'm done playing pretend. my patience is at his end, so fuck off before we both regret it. le monde ne tournait pas rond, car raven encore une fois, préférait ne pas faire face aux évidences bruyantes qui lamentaient sous ses yeux. celle qui portait un futur avec la reine de l'incroyable.

He takes his damn time, constate-t-elle tandis que lentement il se redresse, que lentement il se détache d'une compagne dont les traits se déclinent dans les jeux d'ombres et de lumières qui confèrent à la salle une dimension particulière. du haut de son piédestal bâti sur privilèges et mépris, nebula la juge terriblement quelconque, mais surtout vulgaire — c'est dans son port, ses moues, sa démarche offensée —, tout en elle est cheap, allégorie des bas-quartiers. so that's your type of girl, constate-t-elle, forcée de crier par-dessus les basses assourdissantes, dont les vibrations résonnent douloureusement entre ses côtes encore bleuies. il n'y a pas de satisfaction à la sécheresse avec laquelle il la congédie — pas de pardon au fait qu'elle ait été là à l'origine : c'est lui qu'elle blâme. it's true then, you've met him. my twin. avant la précision elle avait arqué un sourcil, il retombe lorsque se dessine l'être évoqué dans ses pensées — le voyant de reine, trop insignifiant pour qu'elle ait pris la peine de le nommer autrement toutes ces années. elle souffle avec dédain à sa mention, au souvenir d'une chute dont il l'a aidée à se relever, comme si son support pouvait être considéré approprié. non. pas alors que la voyance lui coule dans les veines et qu'elle, recèle quelques secrets qu'elle ne souhaite voir découverts. et il a suffi qu'elle y songe — à son miroir, son jumeau, pour que karma perçoive et déchiffre cette parcelle de mystère. elle songe à la terreur dont elle s'est sentie éprise à l'idée qu'il puisse la dénoncer, à la rage éprouvée, l'envie de le détruire. i had this displeasure, confirme-t-elle. karma is the nice one, the smart one even. but he, sometimes, likes to create a little chaos here and there. et s'il a ses raisons de l'affirmer, elle a les siennes pour répliquer : you don't say.

missed me ? ce n'est pas tout à fait vrai, pas tout à fait erroné, elle croise les bras et réplique en moquerie que contredisent ses actes : you wish. — or you wanna get your fix, hm ? touché.

((ses yeux rivés à ses lèvres pour déchiffrer les mots qui se perdent dans l'atmosphère saturée de sons — nulle autre raison))

me leaving your life was a gift for both of us. — you don't get to decide for both of us, décrète-t-elle avec un agacement à la hauteur de son addiction au contrôle. car elle déteste le changement, nebula, déteste que ses nécessités et sa routine basculent ; alors elle l'a blâmé de s'y frayer un chemin, avant de le blâmer d'en partir, toujours à lui donner tort quoi qu'il entreprenne, pétrie d'insatisfaction — à peine le temps de construire de nouvelles habitudes que déjà tout bascule. sa hantise.

they're all staring at you, princess, reprend-il en parcourant les lieux du regard, lieux au cœur desquels elle détonne sans s'en émouvoir, piétinant la plèbe de sa suprématie ((à nier que chaque pas se mue en torture, convalescence avortée plus tôt que prévu par caprice : la vérité étant qu'elle n'a rien à faire ici)). if shit goes down, what am i supposed to do, huh ? save you again, like a good pet ? and get thanked by getting spat on ?

ow, did you want a treat maybe?, ose-t-elle le tourner en dérision. il a l'audace de s'attarder sur l'écran de son téléphone et elle ne manque de lui faire remarquer que : that's rude. de frustration elle engloutit en quelques pas la distance qui les sépare. et : you're either talking to your phone or to me, claque-t-elle en écartant avec aplomb la main qui tient le téléphone — geste risqué. car peut-être le veut-elle plus enragé que flegmatique, peut-être veut-elle son attention rivée sur elle, peut-être le veut-elle incapable de se détourner d'elle.

you truly are getting on all of my fucking nerves.
l'aura bascule. la victoire a des accents de danger qui lui font frémir l'échine. well, that's a mood. — you are a prey here. fuck, if you didn't pay attention, you've always been one. — i certainly am not. i came with a bodyguard, indique-t-elle avec arrogance, comme si les bras d'un seul mortel suffiraient à contrer la haine de tous les ennemis qu'elle est apte à se dégoter en l'espace de quelques minutes d'insolence brodée de prétention. relève le menton face à la mise en garde, au lieu de se faire petite. and still, you come running straight to the lion's den. — i'm not scared of you. — 've always been nice enough with you to not go on my merry fucking way of doing things, i'm done playing pretend — and what's your way of doing things? — my patience is at its end — all i see is you shying away from our agreement. i shouldn't be surprised, you and your kind have no word. — fuck off before we both regret it. — excuse me?

mots qui s'entremêlent, ton qui monte, et la frustration qui croît tandis qu'ils s'échauffent, s'écoutent à peine. elle l'entend néanmoins — la congédier comme il l'a fait pour l'autre, un instant plus tôt. did you just tell me to fuck off?? first of all, language. also, i'm not your spineless doll from earlier, you can't dismiss me when you think you're done with me. son index au creux de sa poitrine comme une accusation : i'm not taking orders from you. et la main de raven qui se noue alors autour de son poignet en une prise qui pourrait faire mal, qui pourrait briser, qui lui rappelle qu'il est létal, qu'il est danger. let go of me, persifle-t-elle alors qu'il se redresse et que leurs corps s'entrechoquent et s'aimantent et se tournent autour ; alors qu'une part d'elle crie l'inverse ((touch me)).
sa main libre trouve appui sur son torse, pour le repousser ou retrouver l'équilibre elle ne saurait le dire, et il n'y a pas de haut sous sa veste ; souffle qui s'étouffe alors que se dessine l'épiderme sous ses phalanges, peau immaculée contre celle maculée de dessins. those are awful, ment-elle, fascinée sans vouloir l'avouer, attirée sans accepter de l'admettre. why would you do that to yourself? il a la mort tatouée sur les côtes et elle ne comprend pas. ses sourcils se froncent de désapprobation, ses doigts dansent sur les arabesques, retracent les lignes qui se sont courbées sous les coups de l'aiguille, elle y arrache son attention et relève les yeux pour retrouver son regard venimeux. il y a un temps de battement, un instant suspendu, un silence, bataille de regards qu'elle mène avec arrogance, jusqu'à ce que ses prunelles traitresses chutent à nouveau sur ses lèvres, elle jurerait les avoir vues bouger mais le sang et la musique tambourinent si fort à ses tempes qu'ils la laissent sourde. why are you here? demande-t-elle comme si sa présence à elle n'était pas la plus inattendue. why did you stop coming? ((i waited.)) se penche à son oreille et y souffle : i thought you liked the way i taste.