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Eliott n'aimait jamais, quand son ordre le convoquait, car bien souvent cela voulait dire qu'on avait besoin de lui, de son don. Et s'il était maintenant beaucoup plus serein à l'utiliser, il n'en restait pas moins que s'il pouvait éviter de le faire, ça l'arrangeait. Et cette fois-ci encore, on lui demandait de l'aide, mais ce n'était pas comme les autres fois, où il restait confortablement dans les locaux de son ordre, non. Cette fois-ci, il se rapprochait du terrain, du lieu où les combats faisaient rage et ça, ça ne l'enchantait pas. Le musicien ne serait pas non plus à l'épicentre des combats, après tout il n'était pas un guerrier, juste une aide pour les armes et autres demandes. On avait besoin de lui seulement trois petits jours, pour soulager ses anciens camarades de classe. Trois jours, ce n'était pas grand-chose, même s'il devait bien avouer qu'il avait la boule au ventre, Eliott, quand il est arrivé dans les tentes à l'extrémité du champ de bataille. Mais tout allait bien se passer, ici, il était en sécurité, n'est-ce pas ? Ce fut assez vrai les deux premiers jours, il y avait bien eu quelques petits incidents mais rien d'alarmant, mais lors de sa dernière nuit passée à rêver, une intrusion avait eu lieu, l'ennemi avait réussi à gagner du terrain, au grand malheur des alliés du musicien. Tout avait été si rapide, si angoissant, avant qu'une vive douleur ne lui écorche une partie du dos, que son épaule gauche lui fasse si mal qu'il finit par perdre connaissance. Et la suite, Eliott n'en sait trop rien, il se souvient de quelques voix lui parlant, quand il reprenait un peu connaissance, se souvient qu'on tentait déjà de le soigner alors qu'il était rapatrié en urgence à Célestia, ici, les soigneurs étaient épuisés. Alors quand on lui demande si sa famille dispose d'un healer personnel, un seul nom lui vient en tête. "Nao". Il ne voulait personne d'autre, il voulait que Nao soit là, le rassure, l'aide alors que son esprit est encombré par la douleur par la peur des derniers évènements et dans l'état actuel, il ne voyait que son ami pour cette tâche, de toute façon, est-ce qu'il aurait accepté quelqu'un d'autre ? Absolument pas, pour une raison que le musicien se refuse encore d'admettre totalement. Enfin en sécurité dans les bâtiments des ordres, Eliott attend patiemment que son ami vienne le rejoindre. Les blessures sont toujours là, mais elles ne sont plus mortelles, juste douloureuses et très peu esthétiques, les healers avaient fait ce qu'ils pouvaient avec leurs énergies et le nombre de blessés et comme de toute façon, l'ordre avait prévenu le fameux Nao, tout irait bien, bientôt. Quelques instants encore et il finit par voir la porte s'ouvrir, sur son ami qui semble un peu essoufflé. Rien que de le voir rassure en une seconde le dreamer, qui lui offre un sourire qui se veut rassurant, après tout, il était toujours vivant. "Tu as fait vite..." qu'il ose prononcer, avec une pointe de soulagement, voulant le remercier sans trop savoir comment de ne pas le laisser souffrir pendant de longues heures.

Pourquoi n'avait-il pas parlé du fait qu'il allait passer trois jours près du fold ? Peut-être pour inquiéter personne, peut-être parce qu'il avait oublié, trop prit dans sa propre angoisse d'y aller, peut-être parce qu'il n'avait pas eu le temps de le faire aussi. Tant de réponses, d'excuses qui fusent dans l'esprit d'Eliott sans qu'il puisse réellement trouver de réponse adaptée à la situation, il ne peut être que désolé, d'avoir causé autant de tort à son ami. Son cœur se serre, quand il entend la voix brisée de Nao se faire entendre dans son dos. Qu'avait-il crû ? Que lui avaient-ils dit, lorsqu'ils l'avaient eu au téléphone ? Si seulement il l'avait prévenu avant, peut-être que le healer ne serait pas dans cet état, peut-être qu'il ne serait pas aussi essoufflé, si apeuré. "Désolé..." Qu'il se contente de souffler dans un murmure alors qu'il ne peut s'empêcher de regarder ses pieds, la mine bien base, le cœur bien lourd, sans trop comprendre pourquoi. Finalement, son ami reprend son rôle de soigneur alors qu'il lui dit de retirer son t-shirt et ça fait tiquer Eliott, quand Nao vient lui dire qu'il aurait dû faire plus vite, il ne pouvait pas aller plus vite que la musique, il était arrivé ici en très peu de temps, comment aurait-il voulu faire mieux ? Mais le musicien ne dit rien, se contente de bouger doucement les bras, pour venir enlever avec précaution le reste de son haut, non sans quelques grimaces. Mais il tient bon, Eliott, essaye de ne pas trop montrer à quel point il a mal pour éviter à son ami de s'inquiéter encore plus.Cependant, la réflexion du Healer ne cesse de tourner dans sa tête, il n'aurait pas pu aller plus vite, ce n'était pas humain, et puis il la sent, cette culpabilité qui commence à le ronger, il ne lui avait rien dit, et s'il lui était arrivé malheur ? Si l'attaque avait été plus sévère ? Il n'avait prévenu personne, ses amis et sa famille auraient tout simplement découvert tout ceci avec son corps froid et sans vie. Ce n'était vraiment pas malin de sa part, c'était même horrible. Ses pensées continuent de s'enfoncer, sans même qu'il ne puisse les arrêter, son cœur s'alourdit encore et toujours plus alors qu'il imagine l'après, à quel point ses proches seraient sous le choc, surement en colère et emplit de tristesse. Tout ça parce qu'il n'avait pas pensé bon de dire les choses, qu'il avait totalement oublié, comme bien souvent. "J'étais persuadé de t'avoir prévenu... toi ou quelqu'un d'autre... J'aurais dû faire plus attention, m'en assurer avant de partir... J'essayerai d'y penser la prochaine fois, désolé..." sa gorge est serrée à cause de l'émotion, il est fatigué, blessé, il n'était absolument pas prêt pour se rendre compte de sa négligence, c'était beaucoup trop pour lui, mais pourtant, il tentait de rester digne, de ne pas faiblir, même si Eliott n'avait qu'une seule envie s'était de se terrer à tout jamais au fond de son lit.

Eliott retient son émotion mais ne peut empêcher un petit sursaut de se faire quand une main vient se poser sur la sienne. Son regard lâche alors le bout de ses chaussures, se pose sur sa main droite. Nao était beaucoup trop bien pour lui.... Le brun se mord la lèvre, quand Nao lui dit que ce n'était pas grave, qu'il ne lui en voulait pas. Comment est-ce qu'il faisait pour ne pas avoir du ressenti pour tout ça ? Pour ne pas être en colère, alors que l'information était tout de même importante. Pourquoi est-ce que Nao était si incroyable comme ami ? Là où lui, était un piètre personnage, incapable de penser aux autres. Doucement, le musicien vient tourner sa main, paume vers le ciel, pour venir serrer celle de son ami. Nouveau petit sursaut, alors qu'il sent la douleur se raviver, au contact de la main droite de son ami, et c'est finalement comme s'il revivait le moment, quand le don du healer se réveille. Eliott serre les dents, se concentre sur sa respiration alors que les picotements continuent de parcourir sa peau, sa blessure, ce n'est pas un moment agréable, et il se doute que pour son ami, c'est la même chose. Le pianiste est si désolé de faire vivre tout ceci à Nao, il aurait préféré revenir sain et sauf, il aurait préféré ne pas être blessé, il aurait préféré ne pas l'inquiéter. Mais force est de constater que c'était malheureusement fichu. " Non, ne t'en fais pas, tout va bien." Il ment, bien évidemment, enfin à moitié, physiquement, ça n'allait pas, mais le simple fait de sentir la présence du healer avec lui l'apaisait, le rassurait  et venait lui donner assez de force pour supporter tout ça. "Et si jamais c'est trop pour toi, on peut faire des pauses, d'accord ...?" Eliott se souvient d'un coup que le don de soin n'est pas sans répercussions et il ne veut pas que Nao se retrouve sans aucune énergie, à cause de lui, c'était hors de question, il ne voulait pas l'épuiser.  Le musicien se perd ensuite, quand la question sur les derniers évènements se fait entendre. Le regard dans le vague, Eliott ne dit plus rien, comme dans un autre monde, un monde rempli de chimères et de cauchemars. Son cœur trésaille alors que la peur vient reprendre possession de lui-même. Eliott aimerait tellement se recroqueviller sur lui-même à cet instant précis, mais il est totalement figé, par les souvenirs qui dansent de nouveau dans sa tête, mais aussi parce qu'il se souvient des plaies ouvertes dans son dos et de son ami qui met tout en œuvre pour le soigner. Plusieurs minutes s'écoulent, sans qu'Eliott ne réagisse à quoi que ce soit, seule sa main, venu serrer délicatement celle de Nao quand cette dernière s'était crispée, semble avoir agi pendant ce laps de temps. Main qui s'accroche maintenant à son amie, comme si sa vie en dépendait, comme si elle était la dernière chose qui maintenait Eliott dans le monde réel, l'empêchait de partir dans ce monde de terreur. "J'ai eu si peur." qu'il ose enfin dire, dans un nouveau souffle alors que le pouce de sa main libre vient rencontrer ses lèvres, avant que ses dents ne viennent commencer à ronger l'onglet et les peaux avoisinantes. "Il y a eu plusieurs petits accidents, mais rien de trop méchant, juste quelques créatures, souvent seules, qui semblaient égarées..." Et en y réfléchissant bien, peut-être que ces démons étaient juste envoyés en tant qu'éclaireurs pour voir si le camp était bien habité. "Mais cette nuit..." Cette nuit ultime, tout avait basculé, à son grand désespoir. "Je n'ai pas su au début, j'étais dans un sommeil guidé pour quelques armes..." Et puis il y avait eu les voix, les secousses alors que son monde éphémère s'effondrait. On lui demandait de se réveiller, de revenir au plus vite. C'est en ouvrant les yeux que le brun comprit pourquoi tout s'était tant obscurci autour de lui : c'était tout simplement le chaos, l'ennemi était tout autour d'eux, les combats faisaient rage, on ne lui demandait plus qu'une chose : courir, fuir, le plus loin possible, pour retrouver les alliés appelés en renfort, pour se mettre en sécurité. Mais il avait échoué, il n'avait pas été assez rapide, ou bien les créatures avaient bien prévu leur coup, qui sait, peut-être avaient-elles deviné, que les différents êtres vivants partiraient par ici pour s'enfuir, peut-être était-ce juste la faute au destin, qui avait voulu le voir périr sous les griffes d'une chimère, ou qui avait voulu lui donner une bonne leçon. Eliott n'en sait rien, se terre encore dans le silence, alors qu'il repart de nouveau dans son monde intérieur.  C'est si épuisant, de passer du réel à l'irréel... "Désolé, c'est juste que je ne sais pas comment réagir à tout ça..." Enfin si, il savait ce dont il avait besoin : se laisser aller, laisser partir toute cette peur. Mais il se retient, il retient les larmes au bord de ses yeux, il empêche sa voix de sangloter alors qu'il tente de contrôler sa respiration, parce qu'il ne veut pas craquer devant Nao, il ne veut pas l'inquiéter et surtout, il ne veut pas le gêner alors qu'il use de son énergie pour le soigner.

Est-ce qu'il avait bien fait de lui parler de tout ça ? Eliott se demande, alors que les mots commencent à s'enchainer. D'un côté, il fallait qu'il parle de tout ceci, c'était violent, traumatisant, ce n'était pas quelque chose qu'il devait garder pour lui, bien au contraire, parce qu'il ne voulait pas recommencer comme à une certaine période de sa vie, c'était hors de question. Mais d'un autre côté, parler de tout ça venait poser des mots sur ce qui s'était passé, venait rendre les évènements réels, et est-ce que c'était vraiment quelque chose que le musicien voulait ? Il n'était absolument pas sûr. Cependant, la douce caresse du pouce de Nao sur sa peau lui fait sentir qu'il avait fait le bon choix, même si c'était tout de même compliqué de gérer le flot d'émotion qui le traversait. Le potionniste ne tarde d'ailleurs pas à se faire entendre, venant le rassurer comme a chaque fois qu'il le pouvait. Nao avait ce pouvoir, celui de soigner le corps et l'esprit et c'était tout bonnement incroyable aux yeux du brun. Peut-être pouvait-il se relâcher un peu maintenant, après tout, son ami n'était pas face à lui, s'il contrôlait assez bien ses sursauts, peut-être qu'il pourrait laisser aller quelques perles salées. Sa réflexion est brutalement interrompue par le healer qui demande une pause, Eliott panique : avait-il fait quelque chose de mal ? Sa blessure était si affreuse pour qu'au bout de quelques minutes à peine, Nao n'en puisse plus ? Tant de questions qui continuent de fuser dans son esprit alors que le musicien regarde son ami s'installe devant lui. Instinctivement, Eliott prend la main maintenant orpheline dans son autre main, parce qu'elle a si froid maintenant que Nao s'en est aller. Et alors qu'il s'apprête à lui demander ce qui ne va pas, s'il va bien, les mots tombent, le fige sur place, ça se voyait donc autant qu'il n'allait pas bien ? Et en plus ça empêchait le soigneur de travailler correctement ? Eliott était vraiment pitoyable, c'est le premier mot qu'il entend dans son esprit alors que sa vision se brouille. Il ne veut pas hurler, il n'est même pas sûr de vouloir pleurer, il veut juste oublier les évènements oublier la peur qu'il a ressentit, oublier la douleur fulgurante dans son dos après avoir entendu du bruit derrière lui, oublier les cris, les secousses, oublier ce qu'il a pu voir, là-bas. Il veut juste s'endormir, quelques heurs au moins, pour se réveiller ensuite, en prétextant que tout ceci n'était qu'un cauchemar.  Il veut juste se rouler en boule et s'évader, au moins quelques heures dans son monde bien à lui, fais de coton et de douces notes de musique. "Désolé, je suis lamentable... " Les dernières barrières de son esprit se brisent, tout comme sa voix, alors qu'un torrent de larmes se déverse sur ses joues. Toute la peur accumulée s'extériorise d'un coup, le voici aussi tremblant qu'une feuille alors que ses mains viennent cacher son visage.  Enfin le dreamer s'autorisait à se laisser aller, il avait prévu de le faire plus tard, quand il serait seul, au fond de son lit, mais force est de constater que Nao est beaucoup trop perspicace pour lui et le connait que trop bien, alors à quoi bon se cacher ? Crise de larmes qui commence à se transformer en crise d'angoisse alors qu'il revoit une nouvelle fois les images se jouer dans son esprit, et comme un enfant, Eliott se recroqueville, vient prendre ses genoux contre sa poitrine alors que tout autour de lui semble disparaitre, le laissant seul accompagné de ses peurs.