journées sans fins s'alignent sur un calendrier qui n'appartient qu'à l'arcadia; l'a compris l'équipage qu'y avait des phases de plat comme y'en a en mer. bateau planté comme un plomb sur le sable trop chaud des lands éloignés (mais jamais assez). s'ennuient un peu mais profitent de l'accalmie pour régler ce qu'ils n'ont pas le temps de faire d'ordinaire. cordage caressé du bout des doigts râpeux, noeuds plus appliqués pour préparer les imprévus futurs, puis les pieds dans le vide qui balancent au rythme inexistant d'une marée qui l'est tout autant. silencieux perché à l'attention attirée parfois par ceux qui montent et descendent, ou ceux d'en bas qui gueulent trop fort. ça s'accroche pour des broutilles avant de finir par rigoler comme les bourrés. l'ambiance d'un équipage qui te rappelle que ça valait l'exil dangereux. puis les bruits bestiaux qui la nuit parfois font tiquer l'équilibriste sur le mât; jettes toujours un coup d'oeil vers la cabine avant de retourner à morphée. mais cette fois-là qu'on sait reconnaitre l'arrivée imminente du capitaine, et la fourmilière s'active nerveuse, les gars alignés approximativement à attendre des ordres (désordre). et il tarde pas, le feu vert donné tacite avant que le faux-calme ne se brise encore sous les pas brusques des matelots qui reprennent leurs positions. toi qui t'apprête à remonter mais qu'es coupé dans ta course quand sans prénom tu comprends pourtant que c'est à toi qu'il parle. merde, pensé fort, pas spécialement envie d'être au centre de l'attention du pirate à cet instant. mais le gosse qui s'exécute, annules d'un pas en arrière le détour que tu allais faire et fais face à l'homme, mains dans les poches pourtant, trahissent l'anxiété d'une nonchalance feinte. et là te questionnes sur la réponse à apporter. ouais, y'a trois jours déjà, qui ne semble pas tellement approprié au vu de l'humeur qui déborde du gradé. ça, le bout nord, le mât ciré là où le sable le ronge, et les attaches que t'as commencé à traiter. mais bouche ouverte aux mouches, et les sourcils qui enchainent un haut-bas pour contrôler l'insolence, y'a finalement qu'un oui capitaine qui s'exprime. j'm'en suis occupé. points croix et bandes. ça a séché. l'exécution et le résultat exprimés concis puisque c'est sûrement ce qui est demandé. savoir s'ils peuvent partir maintenant sans risquer d'endommager la voilure. et certainement que ça suffirait, qu'y a pas à attendre pour disposer et monter là où est ta place, mais y'a l'habitude difficile à gommer d'être le chouchou de l'ex capitaine mort qui hante encore tes songes et qui s'exprime parfois. comme cette fois. j'sais que... vous avez beaucoup dormi, tenté maladroit, les mains qui s'enfoncent encore plus. mais vous avez l'air d'en avoir encore besoin. peuvent bien décaler le départ d'une journée de plus - y'aura toujours à s'occuper. c'est pas le travail qui manque ici.

traits pincés pour retenir la moue contrariée qui voudrait s'inviter comme elle le faisait des années plus tôt, à chercher encore à tâtons où se situe ta place; à croire que tu ne l'as toujours pas trouvée. mains sorties du futal rapidement pour poser devant le capitaine une posture plus rectiligne, et l'échine moins affaissée épaules sorties insolence rangée, le ton s'exprime d'un ... oui capitaine résigné sans la moindre trace de rébellion - trop habitué à te faire recadrer. c'était pas encore arrivé, fallait bien y passer. demi-tour gauche poussé d'une main ferme dans le dos, et porte claquée courant d'air impose un silence bruyant. ça te rend nerveux. aucun bruit ne te parvient, ni pas ni voiles battant le vent. la proximité de l'équipage te manquerait presque, soudainement. pied s'avance timide, avant que le deuxième ne suive, et que l'ordre soit appliqué. bordel sans nom qui règne ici, à pas savoir par quel bout attaquer. alors les doigts jettent leur dévolu sur un bouquin, puis un autre, posés sur un meuble. ramasser ce qui encombre le sol en priorité. jusqu'au sursaut craignant l'arrivée redoutée. parce que tu sais pas, jan, ce qui t'attend à être enfermé ici avec lui. et t'aimes pas vraiment toi, être enfermé. encore moins quand t'es accompagné. mécaniquement, le corps arrête ses mouvements scrutent les sorties potentielles; fenêtres porte jusqu'à s'échouer sur le dos du pirate avant qu'il ne s'installe nonchalamment et que t'en détournes l'iris. c'est la question qui réactive l'action, préfères te noyer davantage dans le nettoyage dégradant pour un gabier, que de laisser les souvenirs venir mouiller le myocarde. le genre de pont où j'avais pas ma place, mots méticuleusement choisis avant que les épaules ne se lèvent de concert, alors je me cachais sur le mât. voilà comment d'un gamin du fond des rues, on devient l'acrobate d'un navire volant. parce que deux têtes de plus n'aide personne à escalader; et y'en a aucun qui a jamais réussi à venir te chercher. puis maintenant, y'en a plus aucun pour essayer de le faire. ...mais il existe plus. aucune nécessité de le nommer, déjà effacé de la mémoire de tous. ne reste rien de la sacristie, sinon toi - éternel rejeton qu'a chopé le pied marin si profond que t'arrives pas à tourner la page. et tes mois d'errance terrestre n'y auront rien changé. le bras se lève pour caler sur une étagère ce qui occupe ta main, avant de reprendre, d'un récit qu'il n'a pas demandé, je rangeais souvent la cabine du capitaine, mais que tu offres quand même, écrasé par le poids de ses yeux qui trainent et du silence de la pièce, parce que je lui demandais toujours comment il allait. ou que tu l'envoyais chier. mais l'aveu se contentera de l'erreur que tu continues de répéter. il n'y a que les idiots qui s'en inquiète - il avait raison. et tu pourras même pas lui dire. y avait le même genre de livres, papiers-poussière effleurés avant que l'ongle ne parcourt une carte d'un ailleurs que tu ne sais pas identifier, les mêmes cartes. celles qui appellent à l'ivresse de l'inconnu. pourquoi est-ce qu'on reste coincé ici ? et t'oses, jan, lever ton menton jusqu'à planter l'inquisition d'un regard dans celui embrumé par la cigarette du capitaine. t'as beau être dehors, tu te sens enfermé à scruter les mêmes paysages.