"fuck." son coeur bat la chamade, plus affolé que jamais. elle aimerait contacter yukio, ou ce grand sauveur de nino — ou sarkan, peut-être. appeler à l'aide ces frères et ce pacifieur qui l'ont déjà tirée de situations critiques de nombreuses fois, leur dire que quelque chose ne va pas. quelque chose ne tourne pas rond, elle le sait, elle le sent, c'est dans son souffle affolé et dans la brulure que lui provoque son étrange tatouage en forme de sablier.

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elle était venue vérifier l'état de leurs cabanes abandonnées, à présent qu'ils squattaient une maison de ketterdam (une formidable demeure, dirait-elle, car rien ne lui semblait plus beau que d'avoir des escaliers menant à des chambres ainsi qu'un chauffage pour l'hiver, ou du moins une bonne isolation). ils avaient tenté de les retaper, ces cabanes, après l'attaque des seadandas — un peu en vain. elle était ressortie de là le moral miné par les débris qui jonchaient encore le sol, aux côtés de leurs souvenirs oubliés, et de ce feu mort depuis longtemps autour duquel ils se réunissaient à six, puis à cinq, puis à quatre.

c'est alors qu'elle l'avait sentie, cette chose dans l'air, cette chose anormale, une odeur de chevaux mais aussi de putréfaction, avant d'entendre le martèlement d'une dizaine de sabots et d'apercevoir, au loin, des silhouettes squelettiques.

elle ne savait toujours pas ce qu'elle était (une banshee),
mais elle savait qu'elle devait courir.

courir à en perdre haleine jusqu'à, sous l'emprise de la panique la plus totale, s'enfoncer stupidement dans le fold. ne pas regarder derrière soi, à peine regarder devant, avoir envie de hurler mais garder son souffle pour cavaler, toujours plus loin, toujours plus vite. au bout de quelques minutes de course effrénée les cavaliers s'étaient inexorablement rapprochés, et à vrai dire elle ne savait même pas comment elle avait tenu jusque là. c'est alors qu'elle les avait aperçus : ces bâtiments fantomatiques, implantés dans la brume du fold comme des plantes vénéneuses qui survivraient partout. ils étaient menaçants, mais somme toute moins menaçants que la troupe qui la poursuivait et elle s'était engouffrée dans les rues désertes, abandonnées et délabrées de cette ville dont elle avait toujours entendu parler sans jamais oser s'y aventurer. c'est que cet ancien quartier huppé était, à zaun, un incontournable : une promesse de sensations fortes pour les riches de midrias et celestia, une interrogation éternelle pour les chercheurs, une ombre planant sur la ville habitée pour rappeler que toujours ils perdraient contre le fold, et enfin une mort certaine pour les gamins comme elle, aussi débrouillards et vifs soient-ils.

avant même d'avoir réalisé les risques qu'elle prenait, elle était entrée se cacher dans une bâtisse plus grande que les autres — immensément glauque. une succession de couloirs blancs parsemés de chariots abandonnés, des portes entrouvertes battant au vent ou poussées par des monstres, des restes d'objects médicaux renversés au sol. son instinct de survie l'avait poussée à se saisir du meilleur scalpel qu'elle avait pu trouver. elle n'entendait plus les sabots de la chausse sauvage.

elle les avait semés, probablement — miraculeusement, encore une fois. mais la peur l'empêchait encore d'être rationnelle et de sortir, quand bien même elle était consciente que rester trop longtemps dans la clinique abandonnée était un très mauvais calcul. elle s'était cachée sous un lit, lui-même caché derrière d'autres lits, et avait attendu que son souffle erratique accepte de se calmer. accroupie avec son scalpel à la main, réalisant peu à peu le désespoir de sa situation : elle ne sortirait pas d'ici vivante. un coup d'oeil plein d'espoir à son vieux téléphone offert par sarkan, mais l'espoir déclina bien vite : pas de signal.

PAS DE SIGNAL.

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elle en est à vouloir pleurer lorsqu'elle entend un horrible bruit : à l'autre bout de l'immense dortoir, quelqu'un ou quelque chose vient de pousser la porte. please be human, qu'elle implore mentalement les dragons, avant de réaliser que même un humain, ici, pourrait potentiellement être un danger. un humain ou une chose humanoïde, comme les squelettes qui la poursuivaient encore quelques temps auparavant. alors sa prise se raffermit autour du scalpel, qu'elle brandit en guise de défense, la main moite mais le regard ferme. "get out." il est grand, l'homme en face d'elle, grand et armé. taillé pour se battre, et probablement habitué. et, loin de penser qu'il est ici pour se réfugier de la même chose qu'elle, elle voit en lui une menace supplémentaire : celle d'un mercenaire. "get out." le ton est courageux, la posture aussi, et le scalpel serré fort entre ses doigts. "i'm not planning on dying here." qu'elle insiste, tremblante mais farouche au milieu des lits abandonnés.