close your eyes
and listen carefully








chapter i putain de poiscaille, qu'elle entend sur son passage à l'orphelinat. de ceux qui savent qui elle est, de ceux qui savent ce qu'elle est. de ceux qui connaissent sa nature shymer, de ceux qui ont peur qu'elle ne les contamine. on connaît bien les fléaux, pourtant, à zaun.

zaun. là où elle a été recrachée, à ses deux ans — sans qu'on ne sache rien d'autre. apparition étrange, au beau milieu d'une rue sale, soudaine, sans crier gare. on a cherché les parents, on a cherché des oncles et des tantes. un peu — sans se donner trop de mal non plus. c'était zaun, après tout.

à défaut d'avoir des ascendants qui se manifestent et un nom de famille attestée, c'est ça qu'elle est devenue : la poiscaille de hopetown asylum. gamine elle ne s'en sortait pas trop bien avec les pactes, et ne parvenait généralement qu'à passer ceux lui permettant d'avoir des jambes. alors elle était en permanence cet hybride étrange : elle marchait, oui, mais avec des écailles, et des branchies, et des prunelles anormales, et souvent les mains palmées, ce qui rendait chaque geste un peu plus maladroit.

c'est un type qu'elle aimait bien, son premier crush, qui l'a dit le premier : cette fille, elle pue le poisson ! elle ne sait pas si c'est vrai. elle ne sait pas sa propre odeur. peut-être ramène t-elle dans son sillage une effluve de sel, d'algues mourantes, de vagues fracassantes, de rochers qui blessent les pieds, de sable qui cache les coquillages, de monstres marins que l'on ne connaît pas car jamais, encore, l'homme n'est parvenu à descendre au fin fond des profondeurs.
toujours est-il que le bruit s'est propagé. voilà le poisson ! c'était elle, le poisson.
jusqu'à rencontrer maxine, nino, yukio, sawan, nova.

chapter ii (nova) six, ils sont un groupe de six. depuis qu'ils ont sorti la sorcière du grenier, cette étrange sorcière qui était la légende vivante de l'orphelinat — jusqu'à ce qu'ils soient allés y fourrer leurs nez, en haut, tout en haut, derrière les planches en bois. une sorcière ! la sorcière de hopetown asylum. beaucoup mieux que le poisson, comme surnom.

are you a witch? is it true that you steal people's voice?
rose s'en souvient comme si c'était hier. la sorcière démasquée, beaucoup plus jeune qu'elle ne l'aurait cru, et à qui elle avait effrontément demandé : "are you a witch? is it true that you steal people's voice?" elle avait toujours eu peur pour sa voix, depuis ses premiers pas à l'orphelinat, quand des grands lui avait dit qu'elle ressemblait comme deux gouttes d'eau à cette héroïne de conte, rousse comme elle, venue des mers comme elle, et à qui ont volait la voix en échange de deux misérables jambes. ma voix ! elle aussi, du haut de ses quatre ans, six ans, huit ans, dix ans, luttait pour le privilège de garder ses jambes et de rester sur la terre. ariel disaient les grands, d'un air de conspirateur, elle s'appelait comme ça. elle marchait mais elle ne parlait pas ! et ils chuchotaient, devant la mine déconfite et apeurée de rose. je parie qu'elle avait un autre nom... peut-être bien rose... et à ce moment-là toujours elle hurlait.

mais bref. toujours est-il que la sorcière lui avait promis de ne pas lui voler sa voix, et de ne pas la transformer en cochon, et même qu'elle lui avait dit qu'elle pouvait rendre les rêves réalité.

chapter iii il lui était alors venu à l'esprit qu'elle n'avait pas de rêve. pas encore. pas comme nova, qui voulait à tout prix retrouver sa famille, et savait de source sûre que sa famille serait belle et aimante et vivante. rosie ne pensait pas avoir de famille, elle était une orpheline de zaun, c'est à dire un petit coquillage parmi toute une plage, ou encore une goutte parmi tout l'océan, ou encore un corail parmi toute la barrière, bref, elle était une gamine sans rien de zaun, comme il y en avait pléthore d'autres.
oh.
si, finalement, elle avait un rêve.
sortir d'ici.
ils sont jeunes, face à la boite d'allumettes. jeunes pour les maltraitances qu'ils ont subies. jeunes pour être si mal nourris. jeunes pour être abandonnés. jeunes devant le tas de matelas, de vieux draps rêches, d'oreillers si plats d'avoir été tant utilisés. quatorze ans à peine, elle a le coeur qui palpite, les branchies sur son cou qui lui font mal, les jambes flageolantes conservées grâce à un dernier pacte. le dernier pacte avant de partir. le dernier pacte avant d'être libres.
elle se souvient du moment où ils se sont aperçus que nova avait disparu. de la décontenance de la peur de l'abandon encore. elle se souvient avoir pensé ils l'ont tuée ! c'est sur. ils l'ont tuée. on leur fera payer.
elle se souvient de la réapparition de nova, cinq ans plus tard, si étrange, qui bizarrement faisait écho avec elle, elle qui ne se souvenait pas si bien d'avoir aussi disparu, et—
toutes les pensées et les émotions se mélangent quand elle jette l'allumette sur le tas.
quand chacun d'entre eux jette l'allumette sur le tas.
qui brule, brule, brule.

chapter iv
do you realize? it burned. everything burned. lui souffle parfois une voix interne. it was our only option, qu'elle se répond. the only thing to do. we had nothing. nothing but nightmares. ils ont trouvé cette cabane, en fuyant. cette cabane branlante où ils ont passé une première nuit à moitié sous la pluie. "we really need to fix the roof", qu'elle avait fait remarquer. "cause we're staying here, right? we're staying?" dans cette cabane branlante et tout aussi abandonnée qu'eux. "it has potential." qu'elle avait alors tenté de positiver. la liberté ne lui était pas encore montée à la tête. la liberté ne l'avait pas encore prise d'assaut et grisée. elle avait peur, et froid, et ses bras enroulaient ses genoux repliés contre elle, et ses cheveux roux emmêlés protégeaient son visage.
le lendemain matin, aux premiers rayons du soleil, elle avait vu combien elle avait eu raison. oui. du potentiel. il y a du potentiel. alors ils avaient tout reconstruit. planche après planche, ajout après ajout. ils avaient volé des marteaux et des clous. nova avait rêvé un petit pont vers une extension. rose avait planté au sol quelques graines de tomates, et des pieds de menthe qui s'étaient mis à se multiplier, à tout coloniser et à embaumer.
c'était donc ça qu'elle sentait, leur cabane. la menthe et le frais et la liberté.

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red roses
fucking red roses

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1987 — naissance de son grand frère cobalt.

2001 — 2 septembre naissance de naïade à midrias. cette dernière est nommée ainsi en raison de sa nature shymer (monstre marin/sirène). les gênes shymer remontent à ses grands-parents maternels — heureusement pour lui, cobalt n'en a pas écopé.

2003 — octobre 2 ans naïade est enlevée par la chasse sauvage à midrias, dans la maison des hopkins. juste sous leur nez : disparue. les parents la recherchent, ou peut-être font-ils seulement mine de la rechercher, car peut-être qu'une partie d'eux est soulagée de ne plus avoir un bébé shymer sur les bras. cobalt, en revanche, ressent le manque lancinant.

2008 — 7 ans (chronologiquement/réellement, si la chasse sauvage ne l'avait pas enlevée) // 2 ans (physiquement et mentalement, prenant en compte son enlèvement par la chasse sauvage).
— naïade est recrachée par la chasse sauvage au beau milieu de zaun (endroit aléatoire).
— ayant été poursuivie, bien qu'elle n'en ait aucun souvenir, elle porte en elle la malédiction de la banshee. elle ne voit pas le tatouage caractéristique, ce petit sablier qui s'est installé sur sa nuque, tout comme il s'installera sur celle de cobalt en 2010.
— les autorités recherchent sa famille pour la forme, sans vraiment essayer. elle est rapidement transférée dans l'un des orphelinats de la ville, hopetown asylum. faute de connaître son prénom, on la renomme rose.

2010 — 9 ans // 4 ans la chasse sauvage est encore aux trousses de rose ; à défaut de parvenir à la rattraper, elle s'en prend à ses proches, et notamment à son grand-frère cobalt qui est enlevé pendant dix ans.

2012 — 11 ans // 6 ans rencontre avec nova, la sorcière de hopetown asylum, retenue prisonnière dans le grenier pour son don de dreamer. le petit groupe d'orphelins se forme autour d'elle (nova, maxine, nino, sawan, yukio).

2015 — 14 ans // 9 ans disparition de nova, elle aussi enlevée par la chasse sauvage. les orphelins ne le savent pas ; ils pensent à tord que l'orphelinat, malheureusement connu pour ses mauvais traitements, est responsable. rose s'imagine sa nova morte des mains du personnel ; toutes les années qui suivent, elle nourrit pour hopetown asylum une haine sans fin et sans fond.

2020 — 19 ans // 14 ans nova revient miraculeusement, recrachée par la chasse sauvage.
— elle ne le sait pas, mais son frère est lui aussi recraché par la chasse sauvage cette année-là.
— fuite de l'orphelinat avec son groupe d'amis (nova, maxine, sawan, yukio, nino). ils incendient l'un des bâtiments pour se faire la malle en profitant de la confusion générale.
— se retrouvent sans rien. habitent dans un coin perdu de zaun, hors ville, dans des cabanes faites manuellement de bric à brac, dans un dénuement presque total. ils volent pour survivre.

2022 — 21 ans // 16 ans maxine disparaît, officiellement attrapée par des zurks aux abords du fold sous les yeux de rose ; officieusement attrapée par la chasse sauvage. nova disparaît (une nouvelle fois) en partant à la recherche de maxine. sa disparition reste inexpliquée, bien qu'elle ait en réalité été récupérée par la chasse.
— ces deux disparitions peinent énormément le petit groupe d'orphelins, qui est réduit à quatre au lieu de six. double peine : l'hiver est particulièrement froid et apporte avec lui les seadandas, monstres de glace humanoïdes. grâce à un contact de yukio (isaïah), improvisé leader du petit groupe depuis la disparition de nova, ils parviennent à squatter une maison de ketterdam, où ils sont plus au chaud et plus en sécurité que dans les cabanes de zaun ; plus proches du mur, aussi.