who has the biggest ?



Finalement, elle s’était laissée convaincre.
Cette fête au Port de Midrias, elle y avait mis les pieds.
Le nom du responsable, il n’était pas difficile à trouver si on la connaissait un minimum.
La seule personne capable de la convaincre de refermer un livre depuis la chambre où elle prévoyait de rester enfermée pour une bonne partie de la journée, voir la journée entière, portait le doux prénom de Soàan.
Son soleil
Et surtout le séducteur
Est-ce qu’il lui arrivait des fois de refuser des choses à son petit frère ?
Il suffisait qu’il fasse sa petite moue. Il suffisait qu’il y ajoute ce petit ton de voix particulier. Et elle finissait, dans un soupir, par baisser ses premières défenses.


C’était ce qu’elle lui avait demandé ce jour-là.
Une réponse positive avait refermé un bouquin. Elle s’était préparée. Elle était sortie de cette antre au sentiment si sécurisant pour suivre son jumeau direction cette foire sur le port.
Si ça pouvait lui faire plaisir.
C’était toujours l’argument magique.
Le bonheur de Soàan, c’était sans aucun doute ce qui comptait le plus pour elle.

Elle lui avait payé une barbe à papa. Quelques attractions calme. Du papotage…
… parce qu’aussi étonnant que celà puisse paraître, oui, elle parlait avec son petit frère. Elle tenait une conversation sans protester. Et il lui arrivait même ce truc particulier qu’elle avait désormais sur ses lèvres en lui tendant le gobelet d’une boisson fraiche avant de laisser sa main passer d’un geste affectueux dans ses cheveux.
Il avait raison Soàan. Ce n’était pas si terrible.
Dans le fond, il avait souvent raison.


Jusqu’à ce qu’une voix prononce le prénom de son frère d’un ton joyeux, jusqu’à ce qu’un petit groupe les rejoigne… des amis de son cadet. Des amis pour lesquels elle avait finalement dit… « Je vais rentrer. » … par peur qu’un frère se prive de passer du temps avec eux pour rester avec elle.
Soàan le savait… trop de compagnie, ce n’était définitivement pas son truc.
« Non vraiment, je suis fatiguée. T’en fais pas. Reste avec tes amis. » seconde insistance. Ou bien c’était déjà la troisième ? « Je t’assure. » elle atteindrait cinq facilement. Peut-être même dix « Je peux rentrer tout seule. Je suis grande. » mais elle avait finit par obtenir gain de cause et par adresser un dernier signe de la main à son frère en le regardant s’éloigner.

Ce n’était pas si mal.
Mais c’était bien assez comme efforts.
Même si, finalement, elle avait passé une bonne après-midi. La perspective de socialiser désormais provoquait en elle le manque de son livre.
Attendrie, inattentive, occupée à voir la silhouette de son frère s’effacer, qu’est-ce qui avait détourné son attention au point de ne pas le sentir venir… ?

Fiancée désormais. Pas vraiment ravie du choix familial. Elle avait développé ce don pour éviter le promis avec un talent déconcertant. Une facilité si simple qu’on avait presque envie d’accuser la lune sur son front de développer en elle un certain sixième sens.
Comme des picotements sur sa nuque…
… qui, cette fois-ci, lui avaient fait faux-bond.
Parce que quand elle s’était retournée pour prendre le chemin de la maison, elle était tombée nez à nez avec Kieran Sköll.

Luana Aiwenor ne jurait jamais.
Alors elle n’avait pas juré.
Pourtant, c’était presque le mot merde qu’on avait pu lire sur son visage quand son regard avait croisé celui d’un Sköll.
Sourire abandonné. Expression blasée retrouvée. Le regard avait rapidement bifurqué pour trouver les issus de secours… comme s’il ne l’avait pas remarqué. Comme s’il ne s’était pas mis dans son dos pour lui pourrir la vie.
Oui, elle ne jurait jamais.
Mais dans ses pensées, un second juron était venu.

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Ce n’était pas le genre d’endroit où on l’attendait. C’était trop festif. Trop vivant. Il y avait la foule, les rires - ces gens indécemment heureux - ;  la cacophonie électronique des machines et autres bidules futiles ; les hurlements, entre joie et terreur, qui fusaient à chaque manège ; les odeurs de nourritures, alléchante et écœurante à la fois ; les lumières, dès que le jour baissait un peu, qui clignotaient agressivement à chaque carrefour. Non, il n’y allait certainement pas pour son plaisir personnel.
Quoique.
La jeune femme montrait un stand au relent sucré, le ton claironnant. Il retint un haut-le-cœur. « Si ça te fait plaisir. » Il lui adressa un sourire doux et elle lui répondit par une exclamation de joie. Quelle gamine. Quand elle eut rejoint le stand en trois bonds ridicules, la Loup laissa échapper un soupir. Quelle perte de temps. Il était fautif, toutefois. Ce n’était pas vraiment par charité qu’il avait amené cette fille sur le port de Midrias, où la fête foraine battait son plein. Jeune actrice, soi-disant prometteuse - elle n’avait pour l’instant que le jolie minois avant le talent -, elle s’était si facilement jetée dans la gueule du Loup que celui-ci n’en éprouvait même plus d’appétit. De toute façon, ces quelques heures passées avec elle l'avaient déjà lassé. Elle n’avait rien d’une femme et même sa piètre morale se sentirait mal de profiter d’un esprit si puéril. Le Sköll se contenterait donc de l’avoir pour partenaire à l’écran et pour le reste….
… Il n’aurait qu’à évoquer la carte de ses fiançailles.

Et voilà que le destin s’amusait à faire voler cette carte, juste sous son nez. De qui se moquait-il ? Pour une fois, pas du Sköll. On aurait même pu croire qu’il était de mèche avec la Bête.
Il l’avait repéré de loin. Sa silhouette slalomant entre les corps qui exultaient de joie. Kieran n’avait pas besoin de voir son visage pour savoir qu’elle ne partageait pas leur allégresse. Il n’imaginait aucun sourire sur ses lèvres car il n’en avait jamais vu. Quel étrange endroit pour elle, songea-t-il. Si lui-même n’y était pas à sa place, il faisait au moins illusion. Mais elle…
Un air marin se leva, emportant avec lui les senteurs de la mer et toutes celles de la fête. Au milieu de cette tempête odorante, il eut l’impression de saisir une fragrance différente. Fleurie. Envoutante. Nuance de jasmin et de fleur d’oranger. D’autres fleurs qu’il n’aurait pas su nommer mais qu’il reconnaissait toutefois…
C’est son parfum à elle.

Ses fines courbes s’éloignaient, menaçaient de disparaître dans la foule. Il n’entendait même plus sa partenaire du jour, piailler des paroles si ennuyantes. Alors, poliment, il la quitta. Un mensonge si bien servi qui ne sut néanmoins pas effacer la déception sur les traits de la jeune fille. Il promit de la retrouver bientôt, aux studios mais le temps, présentement, lui manquait. Un dernier sourire pour l’en convaincre, une dernière caresse, brève, sur la pommette, pour achever de se faire pardonner ; et le Loup s’évapora.

Il crût d’abord qu'il ne la retrouverait pas. Il l’avait quitté des yeux quelques secondes - de trop. Mais, se laissant porter par le flot humain, esquivant les regards adorateurs qui pourraient ralentir sa course, il finit par la retrouver. Là, immobile, entre deux chemins. Il lui sembla qu’elle disait au revoir. Elle n’était donc pas venue seule ?
Mais elle l’était à présent.
Tout du moins, jusqu’à ce qu’elle se retourne et croise le regard de son tendre fiancé.
« Quelle fabuleuse coïncidence… » Etait-ce un sourire qu’il avait vu s’évanouir à la commissure de ses lèvres ? Avait-il rêvé ? « Bonjour Luana. » Les siennes, en revanche, s’étaient étirées en une large esquisse, polie, charmeuse. A présent qu’elle était tout près de lui, son parfum se fit plus insolent, enivrant avec assurance son nez de loup. Il inspira, sans retenue. « Je n’aurais jamais imaginé te croiser ici… Mais c’est une agréable surprise. » Lueur mutine aux fond des yeux, il ne pouvait s’empêcher de se questionner… tout en se réjouissant de ce nouvel intérêt que lui offrait cette journée. « Permets-moi de t’accompagner un peu pour profiter de la fête avec toi. » Oh, mais bien sûr, il n’ignorait pas ce regard qui l’en défendait. Pourtant, il prenait bien ce droit… N’était-elle pas sa chère fiancée ?

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Il avait quelque chose… comment dire ? D’agaçant sur le visage. Ou sur les lèvres. Peut-être un “je ne sais quoi” d’inné dans son attitude.
Elle l’avait déjà pensé. La pensée lui revenait à nouveau. Et elle le ferait malheureusement d’autres fois… parce que son chemin ne s’éloignait jamais suffisament de celui de Kieran Sköll… de toute évidence.
« … »
Une fabuleuse coïncidence oui. Si fabuleuse qu’elle lui avait retiré toute sa bonne humeur en un simple regard croisé.
Pourquoi fallait-il qu’il soit là ?
Juste question… qui ne trouvait sa réponse que dans une dose trop forte de malchance sans doute.
Qu’importe les raisons de sa présence ici, il pouvait retourner à ses occupations sans heurter sa sensibilité.
Voilà ce qu’elle avait pensé face à ce sourire un peu trop ravi sur ses lèvres.
Ils n’étaient pas obligés de se saluer…


Oui, même s’ils étaient fiancés.
Ils n’avaient pas à se parler, échanger, sympathiser. Ils pouvaient s’éviter, et ce serait parfait.
Elle le savait bien que ce serait grotesque pour des fiançailles non ?
« Bonjour Kieran. » au moins, elle était polie « Au revoir Kieran. » Qui ne tentait rien n’avait rien c’était ça ?
Mais elle ne pensait tout de même pas que ça allait marcher ?

Qu’elle le permette de l’accompagner…
« Non. » son père ne serait pas content. Il aurait assisté à la scène, il se serait même permis de la réprimander.
Il fallait qu’elle fasse des efforts… pour ce mariage. Qu’elle soit un minimum… autre chose qu’elle ?
C’était un peu ça l’idée. Elle n’avait pas vraiment une personnalité dont on était fan, son père y compris apparemment « Je comptais rentrer chez moi maintenant. » au moins, elle ne mentait pas.

Mais c’était toujours interdit ?
En quelque sorte. Il fallait se forcer un peu. Sociabiliser avec lui.
Combien de mots est-ce qu’elle lui avait dit depuis qu’elle s’était retournée sur lui ?
Douze.
Et c’était un chiffre tout à fait honorable.
Il avait envie de s’amuser.
Elle n’avait pas envie d’être son jouet.

Elle était persuadée qu’il serait trouvé d’autres sources d’amusement. Les “coïncidences” et les agréables “surprises” offraient une quantité tout à fait correct de choix aujourd’hui. De la plus stupide à la presque correcte qui savait épeler son nom presque sans faire aucune faute. Il y en avait même sans doute quelques intelligentes et dignes d’intérêt dans le lot.
De quoi lui faire penser qu’il était toujours temps de demander à son oncle un changement de fiancée.
Si on lui avait demandé son avis sur le sujet, elle aurait été même prête à dépenser un peu de son temps pour dresser une liste de candidates potentielles.

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Il était certain que si la jolie Aiwenor avait eu vent de la présence de son fiancé à la fête, celle-ci n’y aurait pas mis les pieds. Peut-être aurait-elle dû consulter les cartes ce matin… Mais le destin s’était montré moqueur, jetant la pauvre voyante dans la gueule du Loup. Et celui-ci ne se défaisait pas de son insupportable sourire.
Pas même quand la fiancée lui disait aussi vite au revoir qu’elle n’avait eu le temps de dire bonjour. Kieran arqua un sourcil et ne réprima qu’à peine un rire : « Allons, allons, Luana. Ne me dis pas au revoir si vite. » C’est qu’elle pouvait se montrer vraiment drôle quand elle voulait. Quoiqu’il préférait qu’elle ne mène pas sa plaisanterie jusqu’au bout.

Aussi, la Bête prit les devants. Poliment, certes ;  mais bien sûr son invitation excluait le “non”... que la gifted lui avait quand même servi. Si rapide. Kieran ne se démonta pas. Le rictus collé aux babines, il se décala légèrement sur le côté. Si l’on pouvait croire qu’il l’invitait à poursuivre sa route tel que Luana le souhaitait, il ne faisait que la lui barrer habilement. Evidemment, il ne comptait pas la laisser partir.  « Déjà ? Mais c’est maintenant que la fête devient intéressante. » Uniquement parce qu’elle était là. Mais il pouvait étoffer son point de vue si elle voulait. Il glissa une main dans son dos, exerçant une pression légère mais assez ferme pour l’inciter à avancer dans sa direction. Il désigna l’allée centrale en direction de la mer : « Savais-tu que depuis la jetée, là-bas, on a un point de vue imprenable sur le coucher du soleil ? » Le genre de spectacle romantique qui plaisait aux demoiselles. Toutefois, son petit doigt lui soufflait qu’il fallait bien plus que ce genre de clichés pour appâter Luana Aiwenor dans ses filets.  « De plus, à la nuit tombée, les lumières rendent la fête beaucoup plus attractives… » Mais toujours bien moins que la délicate fleur des glaces qu’il tenait au creux de sa paume.  « Laisse-moi au moins t’offrir quelque chose à boire ou à manger, » conclut-il d’un ton doux, presque compréhensif.  « Je suis sérieux quand je parle de fabuleuse coïncidence… Ca me ferait vraiment plaisir de passer un peu de temps avec toi, Luana. » Dans son regard, une lueur pétillante s’était mise à scintiller. Il savait que sa fiancée l’évitait et qu’elle n’avait aucune envie de l’accompagner pendant la fête…. raison de plus pour saisir à deux mains cette occasion.  « Allez, dis-moi : qu’est-ce qui te ferait plaisir ? Il y a peut-être des choses que tu n’as pas encore eu le temps de voir ou gouter ici. » Nous connaissions tous déjà le point numéro un sur la liste d’envie de l’Aiwenor : que le Sköll lui fiche la paix.

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Pénible pas si petite créature que ça un fiancé.
Tout particulièrement le sien.
On lui avait choisit le modèle nuisances… pensée un peu dure à avoir, et pourtant… il trouvait toujours le moyen de la vérifier.
Comme maintenant. Avec son insistance malgré ses mots qui n’incluaient pas l’option négociation.
Soupir retenu mais regard qui ne s’était pas moins porté vers une issu de secours que l’homme avait bouché.
Permission non accordée par sa voix que cette main dans le bas de son dos, main qui l’engageait à suivre une direction qu’elle n’avait nullement envie de suivre.
Clairement, il y avait un soucis de compréhension.
Son fiancé et elle ne parlaient pas la même langue

« Oui. Déjà. » la fête ne devenait pas intéssante, elle devenait simplement pénible.
Même quand il lui faisait des propositions ô combien clichées qu’il avait dû trouver dans des scénarios de films ?
« Je savais que le soleil se couchait chaque soir oui. » merci Luana… et pour les lumières « Et j’ai aussi l’électricité chez moi. » les Aiwenor ne s’éclairaient plus à la bougie depuis pas mal de générations.

Terrible ton plat qui n’invitait même pas la plaisanterie.
Terrible ton qui ne laissait pas vraiment deviner de sarcasme.
Mais la fête, c’était terminé pour elle.
Elle en avait profité avec Soàan, maintenant elle voulait simplement rentrer pour se plonger dans un bon roman.
Perdre une heure ou deux à l’ennui profond… non merci.
Pourtant, il le faudrait bien un jour non ? Apprendre à le connaître ?

« Je n’ai pas plus faim que soif. » les mots semblaient clairs… pourtant, elle avait l’impression qu’ils sonneraient encore trop complèxe pour le cerveau de son fiancé… visiblement du genre borné.
Soupir retenu pour la deuxième fois, main prise par le poignet et retiré du bas de son dos, son regard s’était au moins relevé vers un autre.
Il fallait lui dire les choses avec fermeté
Choisir des mots simples, compréhensibles.
Privilégier les phrases courtes.

« Non. »

C’était peut-être un poil trop court ça non ?
De plus, n’étions-nous pas dans un mot inconnu pour le Sköll.
La négation, il semblait avoir bien du mal à la comprendre.
Etait-il si pénible avec les autres ?
Ou était-elle une petite veinarde pour avoir le droit à l’une de ses pires versions ?

« Je vais rentrer chez moi. »

Est-ce que ce serait aussi simple que ça ?
... pas sûr... les pages de son roman n'avaient pas semblé se rapprocher pour autant.

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Nouveau rire qui fila entre les babines du Sköll. Luana était sans pitié. Chacune de ses rétorques claquait comme une langue agacée sur un palais. Et agacée, la jolie gifted ne devait pas l’être qu’un peu face à l’insistance de son fiancé. Cela n’était toutefois pas une donnée que l’homme souhaita prendre en compte, préférant y voir un défi pimenté plutôt que de se mettre à la place de sa fiancée. Qu’elle ne voulût pas de lui - pour l’instant - n’était pas un problème. Comme il l’avait signifié à une certaine Lovàas : ce n’était qu’une question de temps. Bien sûr, le délai en question était clairement le plus long qu’il expérimentait de toute sa carrière de menteur séducteur.  ❝ Bien sûr. Je me doutais qu’il en faudrait un peu plus pour te convaincre. ❞ Il riait silencieusement, son rictus amusé et piqué à la fois vissé sur les lèvres. Il eut un léger mouvement de tête, sec, comme s’il comptait les points d’un match imaginaire. Et clairement, Luana avait ouvert le score.
Étrangement, Kieran ne trouvait pas repoussant ce ton monocorde qu’elle semblait s’efforcer à employer. A moins qu’il ne s’agisse bel et bien de sa façon de parler et dans ce cas… il trouvait ça encore plus intéressant. Car contrairement aux apparences - et aux plus ou moins justes déductions de la voyante -, elle avait tapé dans l’oeil du Loup bien des mois auparavant. Sa présence qu’elle s’évertuait à effacer au milieu de la foule mondaine… mais qui avait pourtant frappé le Sköll. Il y avait quelque chose chez elle qui piquait son intérêt. Quelque chose qu’il ne pouvait ni expliquer, ni exprimer. C’était comme un instinct qui gronde dans le ventre et qui lui disait d’aller vers elle. Aussi, quand il fallut lui trouver une fiancée fortunée et magique et que la jeune Aiwenor fut évoquée, Kieran lui-même approuva bien vite ce choix… quand bien même il n’était pas question pour lui de s’enfermer dans les affres du mariage.

Et ce désir n’aurait su être réfréné par les réponses négatives - et claires ! - de la jeune femme. ❝ Allons, Luana. On a toujours de la place pour quelque chose. ❞ Une barbe à papa, un bubble tea… qu’importe la sucrerie ; rien n’était trop cher payer pour voler un peu de temps avec la Aiwenor. Et il aurait même largement donné celui perdue avec sa précédente partenaire pour quelques heures de plus avec sa future femme. Luana était infiniment plus intéressante. Malgré sa forte tête.
Kieran leva les yeux au ciel, un sourire à demi-agacé sur le coin de la bouche. Mais pas assez pour renoncer. ❝ Coriace. Tu ne me facilites vraiment pas la tâche. ❞ Mais n’était-ce pas ce frisson de frustration qu’elle lui faisait éprouver qui le motivait à revenir à la charge ? La voracité du Sköll était discutable sur bien des points. L’homme toutefois n’était pas encore prêt à remettre ces futiles préoccupations en question.
Aussi se saisit-il délicatement d’une main - qui ne voulait pas être attrapée - et la retint dans la sienne, par une douce - mais ferme - pression. Il perçut sa peau froide et s’inquiéta de son état par cette belle soirée d’été qui n’avait rien de frais, en dehors de l’air marin qui caressait parfois gracieusement leur visage. ❝ Tu as froid ? ❞  Un regard sur sa prise lui évoqua également cette réflexion : ses mains sont si petites ; si frêles… Il pourrait la briser.

❝ Ne t’en fais. Je ne te volerais pas longtemps, promis. ❞
Et cela fut la seule concession qu’il lui accorda. A nouveau, le “non” n’était pas entendu. La volonté de regagner ses pénates également. Pauvre Aiwenor, vendue à l'égoïste Bête.
Il tenait toujours sa main - si elle ne le lui avait pas repris, quoiqu’il n’avait pas l’intention de la lâcher - et fit un premier pas dans la direction opposée à la sortie pour la ramener au coeur de la fête. Et mieux la piéger entre ses griffes. ❝ Avec qui étais-tu venue ? ❞ Simple curiosité. Simples renseignements. Qui avait le pouvoir d’emmener Luana là où Kieran Sköll devait la kidnapper ?

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Un peu plus pour la convaincre. Oui.
Beaucoup plus pour la coinvaincre.
En réalité, existait-il un plaidoyer que le Sköll pouvait prononcer pour la convaincre ?
… pas vraiment… les seuls mots qu’elle espérait entendre de sa bouche étaient un rêve bien trop doux qu’il ne semblait pas vouloir lui accorder.
Quel dommage.
Et quelle pénible créature ?
Malgré sa froideur et son manque d’expression habituel, son sourcil s’était arqué. La confiance d’un meilleur plaidoyer la laissait de toute évidence sceptique.
Comme ses fiançailles ?
Franchement, elle n’avait pas été convaincu, elle ne l’était pas plus aujourd’hui, et elle ne le serait pas davantage demain. Qu’on la fiance avec Kieran Sköll ressemblait au début d’une mauvaise blague à laquelle il était impossible de trouver une chute drôle…
« Un peu ? » scepticisme évident, question qui n’attendait pas de réponse et à nouveau elle regardait avec envie le chemin de la liberté.

Si elle avait pu choisir elle-même l’heureux élu, qui aurait-elle choisi ?
Sans doute personne.
La réflexion était une perte de temps quand on n’avait pas vraiment le choix, et elle n’était pas vraiment convaincue par le mariage et ses possibilités de trouver un fiancé qui pourrait lui correspondre.
Ou plutôt d’en trouver un à qui elle correspondrait ?
Hum… ce truc, ce n’était pas pour elle… mais c’était un argument irrecevable.
Kieran Sköll était, de toute évidence, encore moins pour elle…
Qui avait pu avoir l’idée de les associer ?
Une personne avec un cerveau pas vraiment fonctionnel… c’était la première réponse qui lui venait.

« Non. » est-ce qu’il lui arrivait de dire oui ? « Pas dans mon cas. » son cas. Celui qui ne voulait pas passer plus de temps ici. Celui qui mourait d’envie de rentrer pour embrasser la solitude. Au-dessus d’un livre pour commencer.
En quoi c’était difficile à comprendre ?


Un pénible personnage qui choisissait de la définir de l’adjectif coriace plutôt que de considérer son manque d’envie.
Est-ce qu’ils ne parlaient pas la même langue ?
Clairement pas.
« Quelle tâche ? » quelle était la nature de cette opération qui l’empêchait de rentrer chez elle ?
N’avait-il pas mieux à faire ?
Forcément. Il avait forcément mieux à faire.
Et pourtant, il lui avait pris la main, comme si, jusque-là, elle ne s’était pas montrée suffisamment claire.
Froncement de sourcils qui vient abîmer le masque terne… sa bouche s’était ouverte pour protester, mais la question était venue la surprendre… Froid ?

« Non. » pourtant sa réponse était restée la même… quoique… après réflexion… « Si je dis oui, j’ai le droit de rentrer chez moi ? » alors oui ?
Elle n’avait pas froid.
Elle était juste toujours froide… d’aussi loin qu’elle s’en souvienne… un véritable glaçon.
La chaleur, la lumière, toutes ces choses agréables, c’était Soàan qui les avait eues à la naissance… lui, il avait toujours les mains chaudes… même son sourire avait la saveur d’une douce chaleur…

« Mais je préfère rentrer tout de suite. » souhait manifesté à nouveau d’une main qui avait tenté de s’évader.
Pas longtemps, c’était déjà trop… le moment serait forcément pénible à passer. Pénible et long. Les secondes deviendraient des minutes, les minutes des heures… et pourtant la sortie de secours s’éloignait.
Elle aurait dû rester avec Soàan…
Même si elle n’aurait pas été à l’aise de le gêner… voilà maintenant qu’elle avait l’impression d’être punie…
... ou ne pas sortir du tout
Pourtant, cette idée… elle y répondait en pensant qu’elle avait eu l’air de faire plaisir à son cadet… cadet, dont on lui demandait de décliner l’identité.
« ça ne te regarde pas. » un plaisir de faire la conversation avec toi Luana. Un véritable plaisir.
C’était ta manière à toi de bouder pour cette scandaleuse prise d’otage ?
… il aurait pu l’écouter… dans le fond, en refusant, elle lui rendait service aussi.
Deux fiancés qui s’ennuieraient, voilà ce qu’ils seraient dans quelques secondes.