c'est tout une histoire qui coule dans ses veines ; le passé tumultueux, tardivement découvert, d'une mère à la langue liée par les mensonges, dont les choix appelaient au drame. adopter ce patronyme n'a rien eu d'anodin : il est une quête d'absolution évidente pour des griffes mains souillées de sang.  

passé si lointain qu'il semblerait issu d'une précédente existence — naissance à ketterdam pour mieux courir les rues de velaris, jusqu'à en sombrer dans les bas-fonds. c'était à quelques minutes de l'arrivée d'un autre, de cette moitié d'elle-même qui lui a temporairement été arrachée. elle est la cadette d'un duo, river, la seconde parcelle d'un « tout » indissociable.

talismans et malédictions, remèdes et poisons se croisent dans la mystérieuse petite échoppe dépourvue de nom qui borde un coin de forêt entre midrias et ketterdam. lovée à l'orée de butcher road, presque invisibles aux passants empressés, elle ne se révèle qu'à ceux et celles qui ont besoin d'elle : broyés par la détresse, consumés par la rage ou en proie à toute autre intense émotion. son emplacement se dévoile dans un murmure : approche, oui, juste ici… viens à moi… appels presque inaudibles quoique irrésistible et, en toile de fond, la curieuse sensation d'être attiré·e par une force mystique.

musicienne entre formules, fioles, bocaux de formol et étranges objets de son cabinet de curiosités, le comptoir se couvre de partitions. à l'oreille de river, tout est musique : du vent au bruissements des pas incertains de nouveau clients, en passant par la caresse feutrée du crayon sur le papier. c'est en toute discrétion qu'elle incarne diamond parmi les rolling quartz, compositrice et chanteuse, sous les traits d'un avatar sulfureux au caractère trouble.

elle est avec moi. décale, susurre-t-elle si souvent, un bras autour de la taille de neige stormwild qu'elle attire contre elle. menton qui trouve appui dans le pli de sa clavicule, le défi dans les yeux — et juste ainsi l'ego des mâles se rassure : ce n'est pas que neige ne s'intéresse pas à eux, elle n'est juste pas de ce bord là, semble crier leur regard arrogant. et river de lever les yeux si haut au ciel qu'il s'en perdent presque dans leurs orbites, dédain évident pour une gent imbue d'elle-même. les rumeurs disent qu'elle n'est ni une femme à hommes ni une femme à femmes, qu'elle est juste celle de neige, et bien qu'elles ne soient pas tout à fait vrai, river n'a jamais clairement démenties.

elle aurait pu revenir sous le nom d'ackerman, aurait pu baigner dans le faste et résider dans une demeure familiale secondaire aux côtés de son précieux jumeaux. mais c'est comme une ombre qu'elle se glisse à ses côtés, silhouette mystère qui ne se montre qu'à lui, pour mieux disparaître quand s'effilochent les heures. sa place est à zaun, à rôder où règnent les monstres, où s'allongent les ombres, où s'éteignent les questions indiscrètes.

les caducées sur ses paumes se parent d'une douce lueur à mesure que ses phalanges s'animent, pétrissant les membres endoloris — ou quand elle y appose les lèvres. elle se spécialise dans les maux invisibles, river, les maux que l'on dédaigne, les maux que l'on ignore ; regard alerte, prompt à percevoir où les corps compensent, où le soulagement s'impose. son dédain pour traiter  à mains nues les plaies ouvertes l'a poussée à s'améliorer dans la concoction de potions de soins. y infuser sa propre magie de gifted leur confère une efficacité toute particulière, bien que gourmande en énergie.

on les nomme arpenteurs car, de famille, ils se faufilent au cœur des rêves et les parcourent comme les pages d'un livre. c'est là leur trait commun : au-delà, les aptitudes s'éparpillent pour glaner un semblant d'unicité. si son jumeau consume le bonheur en créant des cauchemars, river structure des rêves à profondeur variable. un pouvoir ni bon ni mauvais, tout en nuances de gris — à pouvoir stabiliser les songes d'un·e insomniaque pour l'y retenir ou piéger une cible en l'abandonnant aux fins fonds de son subconscient ; à pouvoir dérober des idées (bien que l'interprétation des rêves soit souvent délicate et complexe) ou en implanter. c'est dans un périmètre précis que son pouvoir fait effet, la plongeant en méditation, tandis que son esprit se dérobe à son corps de chair pour s'incruster dans le subconscient d'autrui. la posture la laisse vulnérable le temps de ses errances, en plus de lui coûter : les migraines sont fréquentes et si intenses qu'aucun son, lumière ou mouvement ne lui est alors supportable. pour tous les rêves qu'elle explore et façonne, elle a elle-même perdu l'aptitude d'en faire elle-même — devenue alors dépendante de la sensation de s'égarer dans les élucubrations de l'esprit d'autrui.