Lost and Found



Zaun. Quartier oublié, abandonné. Apparence des bas-fonds. Endroit où il se sentait plus à son aise qu’on aurait pu penser. Entre les âmes délaissées. Mais il ne trainait par ici que lorsqu’il en avait une raison, car l’ombre du quartier pouvait rapidement devenir étouffante pour celui qui ne voulait que sa liberté. Zaun lui donnait un sentiment d’enfermement lorsqu’il y restait cloitré trop longtemps. Les gens qui y habitaient n’étaient pas de ceux à le faire fuir. Peut-être était-il devenu indifférent au danger et à la pauvreté qui l’entourait lorsqu’il descendait jusqu’ici. Lui qui avait grandi en se promenant aux abords de ce quartier, et qui avait continué d’évoluer parmi les échanges suspects et illégaux. Endroit qui n’avait d’effrayant que l’accoutumance qu’il y ressentait. Mais son appartenance était ailleurs. Au-delà des murs, au-delà des nuages. Sur un navire. Et une fois son travail effectué sous les regards troubles, il pourrait retourner vers le large et admirer la beauté de ce ciel qu’il adorait tant.

Cependant, l’heure n’était pas encore là pour effectuer la demande et il se montrait d’une patience brusque. Qui voulait s’occuper l’esprit pour ne pas se rappeler qu’il se devait d’attendre. Lui qui n’aimait pas tourner sans rien faire. Dans l’attente d’une simple rencontre, d’un rendez-vous. Pour se désennuyer, pour se divertir, il se promenait entre les étals installés. Déambulant parmi les rues, parmi les marchands. Sans intention apparente autre que de passer le temps jusqu’à l’échange auquel il devait participer.

Les produits étalés, il passait d’une démarche lente. Regard désintéressé pour la plupart des babioles qu’on lui présentait, pour la plupart des mots qui se voulaient flatteurs. Tous dans l’espoir de le voir débourser quelques sous. Puis, une table qui s’étendait devant lui où il prit une seconde de plus. Intéressante, particulière. Thème qui ne semblait pas solitaire. Plusieurs propositions, des breloques en tout genre, présentation simple. Il s’était arrêté juste quelques secondes, le temps d’observer rapidement. Penser qu’il reprendrait rapidement sa route, sans s’attarder davantage jusqu’à ce que son regard tombe sur un objet particulier. Une petite boîte en bois qui attira son attention. Pointe de surprise. Et la main qui fouillait sa poche automatiquement. Là où la sienne n’était plus depuis quelques semaines. Depuis qu’il l’avait égarée alors qu’il y faisait normalement si attention. Il savait quand cela avait dû se produire, mais il n’avait pas réussi à retracer le chemin pour la retrouver par la suite.

Et si la couleur était différente, si les bordures semblaient agrémentées, le sentiment de familiarité était intense. En s’approchant, en l’observant attentivement. La même forme exactement. La même entaille en bas à droite qu’il avait causée par inadvertance. Il n’y avait aucune hésitation dans son regard lorsqu’il laissa échapper : « C’est à moi. » Le murmure d’abord plus pour lui-même. Pour affirmer cette impression que c’était bel et bien le cas. Son regard se posait par la suite sur le vendeur. Un homme qui se présentait avec un large sourire. « Cette boîte. Où est-ce que tu l’as trouvé ? » Question pour chercher à ressortir la vérité, à savoir s’il avait raison. Était-ce bien la sienne ? Il en était presque certain.  

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Mars 2023 ↠ Redwood Road

with / @Nerian Foale Comme à son habitude, Atlas se lève avec le soleil. Les matins sont si tranquilles qu’il ne peut résister à leur appel, même au prix de moins d’heures de sommeil. Après l’ingestion d’un grand vers d’eau tiède et d’un morceau de pain en guise de déjeuner, le marchant quitte le bâtiment des Simes tandis que le soleil n’est toujours pas visible à travers le béton des immeubles. Ses pas le conduise vers les rues encombrées d’ordures, fouinant avec intérêt dans les déchets. Cette partie du quartier est particulièrement polluée, l’un des dépotoirs de Velaris étant à proximité. Faisant attention lorsqu’il insère ses mains dans les sacs de plastique afin d’éviter les objets coupants ou les seringues usagés, Atlas a l’habitude désormais d’exécuter de telles recherches. Il n’éprouve aucune honte non plus. Les ordures des uns peuvent réellement faire le bonheur des autres, y compris le sien. Le jeune trentenaire est donc assez surpris de déterrer sous quelques sacs de bouteilles de plastique une petite boîte en bois. Malheureusement, elle est fissurée en son centre, ce qui explique probablement pourquoi son propriétaire d’origine s’en est débarrassé. En la sortant des déchets, Atlas constate les belles gravures dans le bois, signe que la boîte a été faite à la main. Quel dommage de se départir d’un aussi bel objet. Le Zaunard glisse la boîte dans son sac à dos où se trouve déjà quelques morceaux de tissus et de métaux. Doucement, il rentre chez sa famille afin de pouvoir inspecter plus attentivement l’état de ses trouvailles. Dévissant le couvercle, Atlas parvient à ouvrir la boîte sans risque d’aggraver les fissures. Quelle n’est pas sa surprise de découvrir à l’intérieur un pendentif en parfait état. Il lui serait aisé de se rendre à Ketterdam pour trouver un acheteur potentiel pour cet objet qui doit valeur très certainement un petit montant. Sauf que l’argent n’est aucunement quelque chose qui l’intéresse. Ainsi, Atlas décide de conserver le pendentif séparément pour l’instant, l’emballant avec soin dans un bout de tissu protecteur. Pour l’heure, il se concentre sur la boîte qu’il répare avec de la colle à bois. Une fois le tout séché, il commence à sabler l’extérieur en entier, faisant attention de ne pas endommager les gravures. Il décide d’ajouter des bordures afin de solidifier encore plus la surface. En appliquant un vernis coloré sur la boîte, les craquelures de la fissure ont presque complètement disparue déjà. Satisfait, Atlas décide de ne pas en faire plus outre de mettre une charnière neuve.

Le lendemain, le Simes se dirige à son coin de vente habituel à Redwood Road. Il est enchanté, comme toujours, de préparer sa table. Minutieusement, chaque objet restauré trouve une place, y compris la boîte fraîchement améliorée. Il n’y a personne qui s’arrête pour acheter aujourd’hui, il semblerait. Cela ne le décourage aucunement, lui qui est heureux avec cette simple activité de marchant errant. Au final, un homme s’arrête à sa table et Atlas souris. « Bonjour monsieur, est-ce que quelque chose vous intéresse? » Sa voix chantonne tandis que son cœur est enjoué par l’idée d’un client potentiel. Le vendeur attend la réaction de Nerian, surpris par l’affirmation qui est d’abord murmurée. Lorsque leur regard se croise, Atlas sent sa gêne d’introverti lui chatouiller l’estomac. Mais sa passion pour ses objets est réellement ce qui lui permet de sortir de sa coquille, y compris à cet instant. « Elle vous appartient, vous dites? » Atlas demande d’abord, enthousiasmé par l’idée qu’il a permis ces retrouvailles. Sans plus de question ou d’hésitation, le vendeur s’empare de la boîte et la tend au pirate. « Je l’ai trouvé la veille à proximité du dépotoir à l’est du quartier. Elle était fissurée, donc je l’ai réparé et je lui ai donné un petit coup de fraîcheur pour la rajeunir. Prenez-la, je ne vous chargerait évidemment pas pour reprendre ce qui est vôtre. » Atlas continue de sourire, très sérieux en offrant en retour la boîte à son propriétaire. Pas besoin de davantage pour le convaincre, y compris s’il s’agit d’une ruse pour avoir un objet gratuitement. Dans son enchantement, toutefois, il oubli complètement l'existence du pendentif.

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L’étonnement premier qui s’était affiché sur son visage d’être tombé sur cet objet commençait à s’estomper avec les minutes. Mais son regard se balançait toujours entre la boîte et le vendeur. Celui-ci qui lui faisait face souriant. Probablement heureux de le voir s’intéresser à sa marchandise. Et si la table se montrait intéressante en soit, c’était bien ce seul article qui l’avait retenu plus longtemps que prévu, qui avait aussi apporté une touche d’espoir dans son regard. Ce qui lui arrivait si rarement à Nerian. Espérer quelque chose. Comme si tout ce qui pouvait être bien en ce monde n’avait pas sa place dans sa vie. Comme s’il ne s’attendait qu’au malheur de s’acharner sans arrêt jusqu’à la fin. Il n’avait pu nier la déception et la frustration qu’il avait ressenties de l’avoir égarée. Petite boîte précieuse qui gardait en son centre un souvenir qu’il ne souhaitait pas perdre. Il l’avait cherchée, il s’était questionné. Avant d’abandonner, car la possibilité de la retrouver s’amenuisait avec les heures qui s’étaient écoulées. Mais maintenant, une nouvelle chance se présentait à lui. Celle de retrouver son bien auquel il tenait tant.

À sa surprise, le marchand se montra de suite très ouvert à lui redonner. À ne pas lui charger, même. Aucune preuve ne semblait nécessaire pour celui qui marchandait et le pirate ne put empêcher une pensée de traverser son esprit : que son état complétait bien cette personnalité. Il pouvait manquer de quoi se tenir soigné s’il redonnait à la première personne venue ce qu’il disait lui appartenir. Vérité dans le cas de Nerian, et contentement de pouvoir la ravoir sans débattre, mais c’était beaucoup moins amusant ainsi, il ne pouvait cacher que ça rendait les choses un peu ennuyeuses. Même s’il était bien heureux de retrouver sa possession. Et comment le marchand pouvait-il s’en sortir ainsi ? Incompréhension réelle pour celui qui faisait passer sa propre personne avant tout. Comme toujours. Comment du fin fond de Zaun pouvait-il rencontrer un homme au sourire lumineux ? Quelque part, il n’y croyait pas. C’était une arnaque probablement. Rapidement, c’était la solution qui s’était offerte à lui devant cette réaction. Raison qui lui avait paru la plus logique, la plus facile.

Silencieux, il attrapa la boîte d’une délicatesse qui lui échappait normalement. Vie rude de matelot qui avait fait de lui quelqu’un de brusque. Force obligatoire, et provocations qu’il venait chercher si facilement. Mais une douceur pour cet objet qui avait une signification spéciale. Les mots qui quittèrent ses lèvres alors se voulurent farouches. « Juste comme ça ? Pourquoi tu me la redonnerais comme ça, sans rien en retour ? » Méfiance, sourcil qui se fronçait sous l’incompréhension et l’impossibilité de croire en cette bonté simple chez les gens. Car ça n’existait pas. Pas pour un visage inconnu. Nerian, si loin de pouvoir même l’accepter. Lui dont la noirceur se voulait sa vérité. Mais il la serra contre lui. Refus de la perdre de nouveau, de la voir lui être enlevée. Regard jugeant celui qui lui faisait face avec incrédulité. « Merci, j’imagine ? » Puis, il prit le temps de l’ouvrir, de vérifier son état qui avait été amélioré par le vendeur, clairement. Son regard se posa au fond de la boîte. Vide. Rien. Une certaine panique qui s’empara alors de lui, qui se transcrit dans ses gestes qui cherchèrent frénétiquement quelque chose qui n’était de toute évidence plus là. « Il y avait un pendentif dans la boîte. Non ? Quand tu l’as trouvé, il y avait rien dedans ? » Regard contrarié qu’il avait relevé. Si près de l’avoir à nouveau, voilà l’espoir qui s’effondrait. Était-ce une autre boîte ? S’était-il trompé ? L’avait-il réellement perdu ? Soudainement, c’était la déception qui se déversa en lui. Amertume et mépris devant une attente qui de nouveau se retrouvait en miette.  

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Mars 2023 ↠ Redwood Road

with / @Nerian Foale Quel bonheur d’avoir un client potentiel devant lui. Surtout qu’à voir son intérêt pour cette boîte nouvelle à son inventaire de boutique, c’est encourageant. Atlas croit qu’il y a des chances qu’une vente se conclue. Au final, cette personne affirme que la boîte lui appartient. L’argument lui semble logique et tout à fait plausible. Comme le trentenaire est incapable de concevoir de vendre un objet volé, c’est sans aucune hésitation qu’il rend la boîte à son propriétaire. Cela semble être tout, le marchand n’ayant aucune envie matérialiste qui pourrait le retenir de donner l’objet. Boîte qui est d’ailleurs transmise à cet instant à Nerian, ce qui rend Atlas joyeux naturellement. Un peu comme s’il venait de faire une vente, mais sans l’argent. Qu’importe, cela ne l’intéresse nullement de mettre la main sur des billets ou de la monnaies, en autant que la boîte soit avec quelqu’un qui en prendra soin. Le pirate se questionne toutefois sur la décision du plus vieux. Rien ne peut lui arracher son sourire et sa bienveillance, qu’il continue d’arborer même à cet instant. « Je vous fait confiance, monsieur. Si vous me dites que c’est votre boîte, alors elle est vôtre. Ça me fait plaisir qu’elle soit de retour avec vous. » Surtout qu’elle a été réparée et solidifiée, donc il n’y aura plus de danger si on l’échappe. « Évidemment. » Il répond au merci confus du matelot. Puis, en le voyant ouvrir la boîte, la réaction de son client le prend par surprise. Atlas comprend ce qui se passe en même temps où Nerian lui parle du pendentif. Le restaurateur d’objets hoche donc frénétiquement la tête avant même que l’autre homme termine de parler. « Tout à fait, il y avait un pendentif à l’intérieur lorsque je l’ai trouvé. Heureusement, intact. Je l’ai donc soigneusement mis dans un morceau de tissu le temps de terminer mes réparations sur la boîte. Attendez, je vous le redonne également. »

Atlas fait signe à Nerian de s’approcher afin de passer de l’autre côté de la table, dans l’arrière boutique, si l’on veut. À cet endroit, il y a de nombreux objets pêle-mêle ainsi qu’un banc de fortune afin que le vendeur puisse se reposer de temps à autre. Il ouvre son sac de transport et commence à fouiller à l’intérieur. Pendant cette opération, Atlas se montre curieux, ouvert à la conversation. « Le pendentif est vraiment magnifique. Je n’ai pas pu en déchiffrer les inscriptions comme je ne sais pas lire. Mais j’avais bien sentie qu’il s’agissait de quelque chose de personnel. Heureusement que vous m’avez rappeler son existence, ça m’était complètement sortie de l’esprit. » Sincère, comme à son habitude, le sourire du marchand est réellement chaleureux. Il lui tarde de découvrir l’expression sur le visage du pirate lorsqu’il pourra retrouver en sa possession le pendentif également. Atteignant le fond de son sac, Atlas fronce légèrement les sourcils. « Je me montre trop empressé. Attendez, je vais sortir le contenu un par un, ça sera plus simple pour le retrouver. » Ainsi, il exécute ce qu’il vient de dire précisément, posant au sol les choses une à la fois, bien qu’elles ne soient pas ce qu’il recherche. Il s’agit surtout de trucs à restaurer, d’objets qui visiblement ont besoin d’un peu d’amour. Il y a surtout un soin qui est apporté à chacun d’eux, bien que plusieurs les considéreraient comme des ordures. Atlas traite chaque chose précieusement, on peut le voir à comment il les manipule et à l’emballage autour de la majorité des objets. Des morceaux de tissus recyclés qui servent ainsi à protéger les fruits de son bonheur. L’opération commence à prendre un certain temps, mais cela ne change en rien les pratiques du Simes qui éprouve visiblement de la fierté dans son travail. Avec un peu de patience, il pourra tomber sur le pendentif et le rendre à Nerian.

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Espoir qui serpentait. Beaucoup trop pour sa sanité. De haut en bas. Lui donnant l’impression une seconde qu’il approchait du but et la suivante que tout se dérobait à lui. Boîte retrouvée avec un certain plaisir, mais ce n’était pas réellement celle-ci qui faisait son bonheur. C’était plutôt ce qui se cachait à l’intérieur. Car au fond, le contenant n’avait d’importance que la protection qu’il apportait au contenu. Mais ce qu’elle renfermait habituellement s’en trouvait absent. C’était une boîte qui perdait son intérêt à ses yeux. Et dont l’audace de se présenter à lui rendait le pirate mécontent, furieux. Le marchand qui se montrait ouvert, d’une gentillesse à ridiculiser tant elle devait lui valoir des pertes. Malgré les commentaires de Nerian et l’incompréhension qu’il affichait sans honte, son sourire ne tarissait pas à l’homme. Présentant si facilement ses pensées naïves que le matelot s’en trouvait déstabiliser. Il n’aimait pas l’accepter non plus, cette gentillesse. Car elle était non désirée. Illogique pour lui. Méfiance qui ne faisait que s’envenimer. Cependant, la possibilité de retrouver son pendentif pointait de nouveau le bout de son nez lorsque sous ses mots grondants d’une colère mêlée à une touche de désespoir, le vendeur lui avait dit qu’il y avait bien eu un tel objet dans la boîte. Qu’il l’avait mis de côté, qu’il allait lui rendre. Et si son apparente naïveté dérangeait Nerian, il n’allait pas refuser cette opportunité. Nouvelle chance qu’il devait saisir et il suivit l’homme derrière son étal. Sans hésitation aucune. Avec la pensée qu’il retrouverait rapidement son bien et pourrait reprendre son chemin sans un regard en arrière. Mais le destin ne souhaitait apparemment pas lui rendre la tâche facile.

Il y avait toujours un obstacle après son premier pas vers le but. C’était enrageant. Le sac se vidait sans offrir ce précieux pendentif à la vue. Les commentaires auxquels il ne réagit pas vraiment emplissaient l’air, mais Nerian gardait le regard rivé sur les différents objets. La beauté du pendentif lui importait peu. Ça aurait pu être un simple collier de billes qu’il aurait eu autant de valeur aux yeux du marin des airs. La mention des inscriptions ensuite. Pointe de tristesse dans le regard. Quelques lettres seulement qui étaient gravées, qui ne voulaient pas dire grand-chose pour ceux qui ne savaient pas. Mais pour lui, cela voulait tout dire. Le fond du sac atteint sans la trouvaille. Et le manège qui recommençait alors. Il ne put empêcher le soupir — plainte audible — de quitter ses lèvres. Espoir désespoir. Et les mains qui repoussaient ses mèches rebelles d’un air énervé. Chaque fois, tout semblait voler en éclats. Dans sa tête, ça tournait à vive allure. Entre les émotions, les déceptions. Les réactions qui s’enchainaient et il n’en avait que faire de l’air piteux de l’homme. Il aurait pu lui en vouloir — pour différentes raisons toutes plus illogiques les unes que les autres — mais ce n’était pas réellement sa faute. Nerian était celui à l’avoir égaré. Mais la colère parfois se fichait bien de la logique. Pour l’instant cependant, plus que la colère, c’était l’amertume et l’écœurement qu’il ressentait. D’être si près de l’avoir à nouveau sans que ça aboutisse. « Pourquoi c’est si chiant. C’est vraiment une journée de merde. » Qu’il marmonnait pour lui-même. Mais c’était tout l’hiver qui lui hérissait l’humeur en vérité. « Semblerait que tu l’aies plus. Bon, on s’en fiche. C’était un peu en vain comme espoir de toute façon. » Le soupir de nouveau. Une main contre la tempe comme si la montagne russe d’émotions disparates qu’il avait ressentie lui avait donné un mal de crâne. « J’ai vraiment espéré l’avoir retrouvé. C’est tout c’qui m’reste de lui. J’aurais jamais dû le perdre. » Et le voici qui marmonnait de nouveau. Plus pour lui-même que pour le vendeur. Car il ne voulait pas réellement partager de ses pensées avec l’inconnu. Mais il ne pouvait empêcher son désespoir de se déverser. Surtout parce qu’il y avait vraiment cru l’espace d’un moment. Et à tous les coups, il se disait que ça lui apprendra. L’espoir ne donnait jamais rien d’autre que la déception.

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Mars 2023 ↠ Redwood Road

with / @Nerian Foale Bien organisé, Atlas connaît son inventaire. Il sait ce qu’il a, ce qu’il n’a pas et qui lui manque ou encore ce qu’il n’a plus parce qu’il l’a vendu, par exemple. Puisque son emploi de vendeur ambulant est son principal hobby et que le jeune homme y consacre la majorité de ses journées, sa mémoire est assez infaillible en ce qui concerne sa marchandise. Terminant de vider son sac avec précaution, l’objet de ses recherches ne s’y trouve au final aucunement. Absolument pas découragé, le restaurateur ouvre la bouche pour parler sauf que le pirate le devance afin d’exprimer son désespoir. Atlas secoue la tête négativement, loin de se laisser déranger par si peu. « Je suis certain de l’avoir, monsieur. Je croyais l’avoir mis dans mon sac, mais comme il n’y est pas, je sais que c’est parce que le pendentif est demeuré à mon atelier. » Le marchand se met donc à ranger les objets à leur place dans le sac, observant en même temps Nerian qui continue de se laisser emporter par de mauvaises émotions. Cela attriste Atlas qui aurait sincèrement voulu lui rendre immédiatement son bien afin de lui éviter tous ces tourments. « Cela arrive malheureusement de perdre quelque chose ou quelqu’un auquel on tient. Vous ne devriez pas être si sévère envers vous-même. Tenez, je vous l’offre. » Sortie de nulle part apparemment, voilà qu’un biscuit sucré fait par sa sœur est tendue au pirate. Il en avait dans la poche de son sac pour la journée, voilà pourquoi. C’est une bien maigre consolation, mais c’est un cadeau qu’il espère pourra apaiser momentanément son interlocuteur. Le sourire bienveillant d’Atlas ne le quitte pas, soucieux du bien-être du pirate. « Voici ce que je vous propose. Surveillez la boutique pour moi le temps que je retourne à mon atelier et vous ramène votre pendentif. C’est la moindre des choses. Cela ne me prendra tout au plus une demi-heure, le temps de l’aller-retour. Assoyez-vous confortablement. Il y a d’autres biscuits dans cette poche là. » L’aîné lui indique, révélant ouvertement tous ses secrets. « Je vous promet de faire au plus vite. » Atlas est sur le point de lui laisser littéralement tout ce qu’il possède outre les vêtements qu’il porte actuellement. Tous ses objets restaurés, sa plus grande fierté. Une confiance immense qu’il offre à Nerian sans même le connaître. Tout cela puisqu’il sent que l’autre homme a besoin de retrouver sans tarder le pendentif.

Ainsi, Atlas ne lui laisse pas vraiment le choix, se mettant sans tarder en route afin de rentrer à l’immeuble des Simes. Laissant absolument tout derrière, cela accélère sa progression puisqu’il a d’habitude un chariot d’objets à transporter sur son chemin du retour. Motivé, voilà que le brun commence même à jogger afin de gagner du temps. Lorsqu’il arrive chez lui, il ne reprend son souffle que lorsqu’il pénètre dans sa chambre. Scrutant d’abord ses matériaux du regard, le Zaunard commence à fouiller dans ce qu’il a mis de côté dans son atelier. Au final, il trouve ce qu’il recherche. Un énorme sourire fend son visage alors qu’il ouvre le morceau de tissu pour révéler le pendentif retrouvé la veille. Avant de repartir, Atlas s’arrête en cuisine pour voir s’il reste des biscuits. Malheureusement, les enfants les ont tous dévorés, ce qui est tout à fait normal comme ils sont délicieux, malgré leur simplicité. Le vendeur glisse le pendentif dans sa poche et entreprend le chemin du retour vers Redwood Road. Son inquiétude est à zéro, n’ayant pas peur qu’en revenant à son étal quelque chose manque ou que tout soit détruit. Il fait confiance en Nerian et ce pour des raisons que bien des gens ne pourraient pas comprendre. On pourrait appeler cela de la naïveté. Atlas préfère demeurer positif et voir la vie comme ce qu’elle est, non comme l’un des scénarios apocalyptiques qu’on pourrait se faire. Au final, le vendeur revient vers sa table, tout souriant. Sortant de sa poche un morceau de tissu qui sert d’emballage, il le tend au pirate sans un "je vous l’avais dis" qui lui semble inutile. Atlas lui en avait fait la promesse, c’est donc normal de la respecter.

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Désespoir. Le soupir sur les lèvres. De se sentir démuni. Avoir l’impression qu’on se jouait de lui. Pour l’énerver, pour lui prouver que l’espoir n’avait pas sa place dans la vie d’une personne comme lui. Qu’il ne le méritait pas. Qu’il ne le mériterait jamais. La perte de ce bien le blessait bien plus qu’il ne voulait l’admettre. Ce trésor était quelque chose auquel il s’accrochait. Peut-être trop maintenant qu’il y réfléchissait. Un passé qu’il voulait pourtant laisser derrière. Car sans cesse, ça lui rappelait cette certitude de ne jamais le revoir. Pourtant, il s’accrochait à ce souhait silencieux. Qui vivait quelque part au fond de lui sans qu’il ne veuille l’avouer. Des souvenirs. C’était tout ce qui lui restait de sa petite étoile. De ce petit frère qu’il n’avait pu protéger, qu’il n’avait pu défendre. Et encore aujourd’hui, son cœur saignait sous cette vérité. Première marque dans cette pierre qui avait élu domicile dans sa poitrine. Mémoire qu’il lui rappelait pourquoi il avait pris ces décisions. C’était si facile de les perdre. Ceux à qui il accordait une simple place dans sa vie. Le choix de ne plus le faire, de ne plus être blessé. Préférer repousser les autres plutôt que d’accorder la chance de souffrir à nouveau. Mais ce pendentif qu’il gardait. Comme un rappel douloureux et le souvenir doux d’un sourire qu’il ne voulait jamais oublier tout à la fois.

Alors que la déprime l’envahissait, que les mots entendus ne soulageaient pas ses sentiments, il fut surpris du biscuit soudainement tendu. Il l’attrapa, comme une réaction involontaire sous l’étonnement. Puis, l’incompréhension sur la suite. Proposition de retourner à son atelier pour chercher le pendentif, qu’il était certain de l’avoir laissé là-bas. Et ça se passa si vite, trop vite. Nerian n’eut pas réellement le temps de réagir que déjà le marchand s’éloignait. Mais… comment pouvait-il lui laisser toute sa marchandise et partir comme ça ? C’était une mauvaise blague en fait ? Il ne comprenait pas, dépassé par les agissements de cet homme qui lui semblait à l’opposer total des siens.  

Les minutes commencèrent à s’accumuler et il se demanda s’il ne devait pas juste partir. Abandonner l’étal et continuer son chemin. Car au fond, est-ce qu’attendre ici avait la moindre logique ? Ça ne faisait aucun sens pour lui. Que cet inconnu tente de l’aider à ce point à retrouver ce qu’il avait perdu. Ça ne devrait avoir aucune importance pour lui, pourquoi avait-il essayé de le rassurer chaque fois que Nerian avait sombré dans son désespoir ? Son regard tomba sur le biscuit qui reposait toujours dans sa paume. Méfiance qui existait toujours auprès de ceux qui habitaient Zaun. Aussi naïf pouvait sembler le vendeur. Mais au bout d’une quinzaine de minutes, il finit par croquer dans la sucrerie. Plus par lassitude et par réflexe, que par réelle envie. Il s’étonna cependant du goût agréable qui fondit sur sa langue. Et dans l’attente, dans le silence, un nouveau biscuit trouva sa bouche. Pris dans la pochette que lui avait pointée le marchand. Il se prit alors à observer les objets étalés. Chacun des articles présentés sur la table. Curiosité de l’ennui. Et le voilà qui attrapait les créations, les manipulant pour les observer de plus près. Travail souvent minutieux. Matériaux entretenus, ou remise à neuf. Un petit étal qui présentait des merveilles qui auraient pu attirer l’œil dans une boutique de la haute ville. Ces trucs à la mode vintage qu’on vendait pour trop cher. Mais qui se retrouvait perdu dans les fonds de Zaun, avec un homme définitivement trop gentil pour son propre bien.

Au bout d’une demi-heure enfin, le vendeur apparaissait de nouveau près de lui, de retour de sa course. Avant même que Nerian n’ait vraiment décidé de quitter. Peut-être parce qu’il avait été réellement pris dans son observation — admiration qu’il n’avouera jamais — de la table devant lui. L’article qu’il déposait maintenant pour se relever. Faire face à celui qui lui avait promis le retour de son bien. Il sentit alors le pendentif glisser entre ses doigts. Le soulagement qu’il ressentit alors qu’il commençait à désespérer pour de bon fut comme une vague déferlant sur lui. Lui qui se trouvait prêt à se convaincre qu’il allait abandonner pour de bon. C’était comme si la pression était redescendue d’un coup. « Wow. J’peux pas croire que t’es de retour avec. Qu’on l’a retrouvé. Je… Merci. » Il s’accroupit d’un coup, une main qui se portait à son visage pour empêcher les émotions de le secouer. Larmes qui auraient coulé s’il se laissait aller. Mais il voulait tout retenir, se cacher. L’indifférence était ce qu’il préférait afficher, ce qu’il préférait prétendre. Il refusait de montrer que ça le touchait au fond. Et comme il ne voulait pas que la conversation tourne vers lui, il trouva n’importe quoi à dire pour changer le sujet. « Personne est passé pendant ton absence. C’est toi qui fais tout ça ? » La tête se tournait vers la table, vers les articles. Question qui voulait créer une nouvelle discussion, qui s’éloignerait de ses sentiments à lui et du pendentif. Le temps qu’il se reprenne et continue sa route.