Hey, at least in my mind
I'm feeling like I'm the hero that saves me
There I hold my head high
Get everything right, delusional maybe

T’aimes pas descendre à Ketterdam, Cobalt. T’aimes jamais passer les grilles de la basse-ville, par peur qu’un jour elle se referme derrière toi et que tu puisses plus jamais retourner sur tes pas. C’est égoïste c’est sûr mais tu préfères être là-bas, dans une sécurité toute relative même si elle t’as pas tant protégé la première fois - mais tu préférais te mentir à toi-même, te dire que si tu n’allais pas trop dans la basse-ville ça serait suffisant. Au final, ça t’as empêché du tout de foutre de nouveau les mains dans la merde, Cobalt, de t’y enfoncer jusqu’au cou. Mais qu’est-ce que tu peux faire d’autre ? Tu veux lui offrir un truc dont il aurait jamais pu rêver et que toi tu pourrais lui donner, si seulement t’y mettais un peu d’efforts. Alors tu prends ton courage à deux mains, tu fais ce qu’on te demande et tu te mets plus en danger qu’avant parce que t’as trouvé une raison qui vaut le coup de le faire, et de pas rester terrer dans ton lit, terrorisé de ce qui pourrait t’arriver. T’as plus le droit de le faire ça, maintenant que t’as quelqu’un d’autre que toi à sauver.

C’est pour ça qu’aujourd’hui t’y es allé, dans ce quartier dont les reflets violets te rappellent des mauvais souvenirs quand ils se rapprochent trop du rouge. C’est l’Ordre qui proposait une mission dans le coin et t’avais quelque chose à couvrir là-bas, évidemment, toi le pacifieur, Dreamer corrompu dans cette forêt qui portent le nom de ton don. Il en passe du trafic par là-bas et t’es la personne idéal pour que ça se passe comme prévu, même si tu peux pas en vendre toi-même ; qu’est-ce que tu pourrais t’en faire de la thune comme ça pourtant, mais tes rêves sont trop reconnaissables pour avoir la moindre valeur illégale tant on remonterait vite leur piste.

Tu viens d’empocher une nouvelle liasse en essayant d’ignorer le sentiment de malaise que ça te donnait quand même à chaque fois - alors que t’essayes toujours de te convaincre que c’est pas si grave, qu’il y en a d’autres qui le font, que ça tue personne - parce que tu le sais bien, que ce que tu fais c’est mal, que tu profites largement de ta situation. Mais c’est pas parce que t’en a conscience que ça t’arrêtes, ça l’a jamais fait et maintenant la raison que t’as de le faire est un argument qui a lui seul vaudra toujours plus que tout les autres. Et tant pis si c’est pas très romantique ; il a pas besoin de savoir par quel moyen tu seras arrivé là.

Et puis, t’entends quelque chose de doux. Comme un chant qui te rappellerait un peu sa voix, parce que maintenant tout ce qui est tendre est affilié à lui, dans ta tête. Et tu ne te rends pas compte, Cobalt, que ce ne sont pas vraiment les mots de Priam, que tu es en train de t’enfoncer de plus en plus dans ces bois qui t’attirent au moins autant qu’ils veulent ta mort. Tu ne sens pas le glyphe dans ta nuque qui commencent à te démanger, à te brûler, à saigner un peu sans doute. T’es déjà parti loin dans des rêves qui te semblent bien agréables par rapport à ceux que tu fais fuis d’habitude.

C’est une voix stridente qui t’en tire et te ramène à la réalité. Un cri qui ressemble un peu trop au tien quand tu perds le contrôle, sauf que tu n’as pas assez mal à la gorge pour que ça proviennent vraiment de tes lèvres ; et quand il se prolonge, t’es bien obligé de te protéger les tympans avec tes mains, couvrant du même coup la voix hypnotique que tu suivais sans t’en rendre compte.

Maintenant, tes yeux sont écarquillés et tu ressens tout un peu trop bien, la souffrance t'assaille de partout.  T’as mal aux côtes comme si tu t’étais pris un coup, t’as mal au dos parce qu’il a rencontré l’arbre derrière avec un peu trop de brutalité. T’as mal dans le cou et quand tu passes ta main derrière tu te rends compte que ta marque est brûlante, et peut-être brillante aussi sauf que tu peux pas le voir pour en être sûr. Tes sens sont en alerte et tu prends soudain conscience du danger, de ce que t’as failli faire, et de la fille trop jeune qui est écroulée à côté de toi, pantelante et épuisée ; sans doute celle qui a hurlé.

-Shit…

T’entends même pas ta propre voix quand t’aboies de douleur et de surprise et de soulagement à la fois. Si ton instinct t'arrache les entrailles, ton ouïe semble pour l’instant en incapacité de fonctionner - mais ça t’empêche pas de sentir le danger approcher. Tu saurais pas comment l'expliquer mais t'en es certain, ce qui t'a entraîné jusqu’ici n’est pas loin, et quoi que ça puisse bien être ça compte bien réclamer sa ou ses proies. T’en a entendu des légendes à propos de cet endroit, surtout au sein des Ordres, et de ce dont tu te souviens, t’as vraiment pas envie de t’attarder dans le coin. Tu forces, Cobalt, sur ta gorge suppliciée en repoussant comme tu peux le pouvoir incontrôlable qui s’y est logé aussi, et tant pis si tu ne sais pas exactement comment ça sort.

-We need to go, NOW !

Tu l’attrapes par la main et quand tu te rends compte qu’elle traîne un peu, déjà trop fatiguée par l’énergie qu’à dû lui demander son rugissement, t’hésites pas vraiment avant de l’attraper et de la jeter sur ton épaule pour aller plus vite. Tu cours, Cobalt, tu sais pas où tu vas mais tu cours loin de cette chose qui vous menace, loin de la sortie peut-être, loin de tout sans doute. Tu cours jusqu’à ce que l’adrénaline retombe et que tu t’effondres au sol en la reposant aussi doucement que tu le peux par terre, et que tes poumons de fumeur intensif crient grâce au point que même le Fléau que tu portes puisse plus en tirer la moindre énergie. T’as plus la moindre force mais au moins, t’entends de nouveau. Comme ça tu pourras entendre si elle t’insulte de l’avoir trimballé comme ça, et tu lui en voudrais pas, même si toi tu la remercies.

-Thanks, for uh, stopping me before. And sorry for the ride. Is everything alright ?

Y a un truc qui te parait un peu bizarre, une sensation que l’adolescente te donne que t’arrives pas trop à cerner, mais tu te dis que c’est juste parce qu’elle est comme toi, tu l'as bien vu- une banshee.