23 déc. 1997 : Mrs. Hawkins Fairburn est en salle de travail depuis la veille. Ça a été long et douloureux, mais Bryleigh Cleo Hawkins Fairburn (préfère qu’on l’appelle Leigh parce que c’est plus court et facile à dire) vient au monde à 23h30. La petite va bien. Sa voix porte pour bien montrer à tout le monde qu’elle est vivante et en bonne santé.

1998 à déc. 2006 : Leigh a une enfance convenable à défaut de pouvoir dire parfaite. On aurait pu employer ce mot si ses parents ne l’avaient pas laissé un peu plus de côté pour leur fils aîné, Reyn. Cela aurait pu marquer une rupture très nette de la relation entre le frère et la soeur, mais pas du tout. Le peu de fois où un des parent lui accorde de l’attention, c’est quand sa mère a pris plusieurs fois de son temps pour lui expliquer pourquoi Reyn passait plus de temps avec leur père que Leigh. C’est l’héritier, tu comprends ? C’est grâce à lui que la famille Fairburn va pouvoir continuer de briller. Héritage, enjeux politique, finance et tout le reste, c’est un peu trop pour le cerveau d’une enfant. Par contre, ce que Leigh comprend et retient c’est que Reyn est important. La petite réfléchit longtemps à ce que ça peut signifier pour elle et c’est à six ans qu’elle décide, poings serrés et après des remontrances faites à Reyn par leur père, qu’elle ferait tout pour le protéger et tout pour qu’il réussisse à faire la fierté de la famille.
C’est Reyn le maillon fort de la famille. Elle interagit beaucoup plus avec lui après cette révélation, lui montre ses dessins (ratés) et lui demande de lui lire des histoires quand il n’est pas accaparé par des leçons. L’affection qu’elle porte pour Reyn grandit de jour en jour.

23 déc. 2006 : Leigh a huit ans. Huit ans. Elle est nerveuse, ses mains sont moites et elle a le cœur qui bat à mille à l’heure. Elle va avoir droit à sa cérémonie, elle va devoir toucher l’artefact de la famille et ainsi gagner son pouvoir. Et si ça ne fonctionnait pas ? Et si l’artefact la mettait de côté lui aussi ? Elle cherche Reyn du regard, le trouve et puise dans leur échange silencieux une force qui lui fait bouger les jambes et la fait avancer jusqu’à l’artefact de la famille, un buste de femme, ancêtre des Fairburn s’étant sacrifiée pour assurer que la magie reste dans la lignée. Sa main tremble avant de la poser sur la joue de mémé (c’est ainsi qu’ils l’appellent). Une seconde s’écoule sans que rien ne se passe, faisant monter les larmes aux yeux de Leigh. C’est bon, c’est foutu, elle n’est pas choisie. Et puis… des picotements au bout des doigts, une sensation de chaleur dans tout le corps et Leigh sait qu’au final, ça a réussi. Pour autant, elle ne sait pas encore quel don lui a été donné. Elle lâche la respiration qu’elle retenait et se concentre une nouvelle fois (comme elle a vu Reyn le faire quand ça a été son tour).
Puis, instinctivement, elle s’approche de la mare du jardin. Elle entend quelque chose qui l’appelle, une mélodie. C’est ce qu’elle répond à sa mère quand elle lui demande où elle part. Leigh s’agenouille et suspend ses mains en coupe au-dessus de l’eau. Sans la toucher. Elle ferme les yeux et s’imagine une flaque dans le creux de ses paumes réunies. En ouvrant les yeux, elle remarque que son imagination a rendu les choses réelles.
Elle sait qu’elle peut désormais manipuler l’eau.

2007 à 2010 : C’est toute une période où Leigh tente de comprendre son pouvoir. Au départ, elle ne l’aime pas, elle le trouve très peu utile (surtout face à Reyn qui peut manipuler la flore comme il l’entend). Puis elle apprend à le comprendre, l’apprivoiser. Ça l’amuse de se dire que, comme elle, il est plutôt calme. Qu’il réagit aussi un peu à ses émotions parfois. Elle le sent remuer quand elle est à proximité de son père et qu’il s’en prend verbalement à Reyn. Elle arrive à voir l’exact moment où comme elle, il cède et lui donne l’énergie nécessaire pour se lever et intervenir dans le but d’apaiser Fairburn senior. Elle dit à Reyn, un jour, qu’elle sera toujours le support dont il a besoin. Peut-être que son aîné ne comprend pas, mais il sourit et passe une main dans ses cheveux. Ça rend Leigh heureuse de se dire qu’elle peut lui être utile.

Dans ces années-là, Reagan vient occasionnellement voir la famille. Elle le connaît de loin puisqu’elle le voit depuis l’enfance. Et pour une fois, on a enfin eu la patience de lui expliquer qui il était et ce qu’il représentait pour la famille. Son cerveau comprend qu’il est un potentiel danger et/ou une menace pour Reyn. Si auparavant, elle avait un peu peur de lui, maintenant qu’elle a un pouvoir et lorsqu’elle sait qu’il vient, Leigh se met en haut des escaliers et elle l’observe, les sourcils légèrement froncés, une moue sur le visage qui peut faire penser que Reagan n’est pas le bienvenu. Elle a toujours l’air de dire “vas-y, tente un truc pour voir ?”. Mais on ne va pas se mentir, une gamine comme elle ne fait pas le poids face à Reagan. Elle est juste en confiance parce qu’elle sait qu’elle peut utiliser son pouvoir pour se défendre.

2012 : Leigh a toujours apprécié lire des livres. Avec les années, elle a laissé de côté les romances et les histoires fantastiques pour des genres inattendus : les romans policiers, les mystères irrésolus et les histoires d'épouvante. Ce n'est pas tant le fait de rester quinze jours sans dormir qui lui plaisait (peu pratique quand on a cours le lendemain), mais c'était le petit frisson d'imaginer les scènes ou de se questionner sur son environnement. Puis, c'est enfin quelque chose qu'elle peut s'approprier aussi. Son refuge (un peu étrange). L'apothéose, pourtant, vient quand elle tombe sur un livre qui recense des histoires sordides du passé. Elle aimerait pouvoir partager ses pensées là-dessus : un blog ? Non. Son style est beaucoup trop reconnaissable. Un feed Momento ? Mh ça veut dire avoir des photos à chaque fois et c'est trop compliqué. Suffit qu'elle se loupe sur une photo et elle serait découverte. Alors pourquoi pas un podcast ? Elle n'a juste qu'à modifier très légèrement sa voix pour qu'elle passe totalement inaperçue. Des recherches de nom plus tard et In the Shadow voit le jour. La voilà lancée sans trop d'espoir qu'on l'écoute mais au moins elle aura eu le mérite de créer quelque chose par elle-même. Et ça, Leigh en est plutôt fière.

entre 2012 et 2015 : Leigh n’a pas les mêmes soucis que Reyn. Elle ne subit pas la pression de leur père qui en attend toujours plus de son aîné. Cette attitude l’excède au plus au point. En grandissant, elle a élaboré plusieurs tactiques pour détourner l’attention de leur père de Reyn. Les méthodes ne sont pas toujours efficaces à 100%, mais quand elles fonctionnent, ça laisse un peu de répit à l’aîné.

Avec le temps, Leigh s'est fait un petit groupe d’amis. Très restreint parce qu’elle n’est pas du genre à aller vers les autres et aussi parce qu’on n’arrête pas de lui poser sans arrêt des questions sur son frère. Pas que ça l’embête de parler de lui, au contraire, c’est juste que c’est son frère. Ses secrets, elle n’a pas à les partager avec les autres. Alors elle ne s’entoure que de personnes qui veulent vraiment la connaître elle et pas juste par intérêt. Après deux-trois personnes comme ça, elle a appris la leçon, ça évite les désillusions amicales trop violentes.
C’est à cette époque, aussi, que Leigh comprend que la confiance qu’elle peut porter aux autres n’est pas toujours une bonne chose. Elle se méfie, se renferme. Jusqu’à sa rencontre avec Layla : elle est jolie, elle a un sourire rassurant et réconfortant. Elles passent beaucoup de temps ensemble, s’embrassent, se découvrent et s’aiment avant de se rendre compte qu’être amies, ça leur convient mieux. C’est probablement la seule histoire qui s’est bien terminée pour Leigh. Les autres ont été des catastrophes qu’elle a préféré enterrer très loin dans ses souvenirs.

Elle suit des cours de management et de botanique, mais ça ne lui plaît pas. Elle le fait juste pour faire plaisir à sa mère, pour qu’elle ait, elle aussi, un pied dans le business familial. Sa mère la voit bien travailler dans une de leur boutique d’élixir voire en tenir une plus tard. Mais ça ne séduit pas la jeune femme qui rêve de pousser un peu plus loin son podcast.

période du 02 au 07 janv. 2017 : ((cw : séquestration sous-entendue, enlèvement)) Elle se souvient d’avoir trop poussé sur son pouvoir pour les maintenir en vie autant que possible. Ils mangeaient peu, mais au moins ils pouvaient boire autant que possible. Elle se souvient de Reyn et de la peur dans son regard. Elle se souvient avoir murmuré des paroles rassurantes alors qu’elle était terrorisée elle-même. Elle se souvient du traitement de leurs ravisseurs. Elle se souvient de l’odeur atroce de l’endroit où ils étaient retenus. Elle se souvient de Reagan aussi clairement que possible. Elle se souvient de la dernière once de force qui lui restait, partir dans son pouvoir pour blesser la personne qui l’a surpris (Reagan). Elle se souvient de ça avant de sombrer dans l’inconscience. Son corps trop faible qui lâche sans savoir si Reyn va bien. Il doit aller bien. Faites qu’il aille bien.

10 janv. 2017 : ((cw : ptsd, anxiété)) Leigh a très peu de souvenirs de ces quelques jours. Les médecins ont dit qu’elle souffrait de stress post-traumatique et d’une perte de mémoire associée à ça. On lui a dit de ne pas trop forcer parce que ça joue sur sa santé (migraines effroyables qui la laissent sans énergie). Mais Leigh veut se souvenir, elle veut comprendre ce qu’il s’est passé pendant leur enlèvement. Le retour à la réalité et la sortie de l’hôpital sont compliqués pour elle. Sur le retour jusqu’à la maison, elle garde le silence jusqu’à atteindre son lit où elle s’écroule et garde le regard fixé sur le mur d’en face. On lui a dit que Reyn est dans sa chambre si elle veut. Mais Leigh ne bouge pas. Elle voudrait se lever et aller jusqu’à son lit pour s’assurer qu’il va bien, mais elle n’en a pas la force. La solitude lui va bien.

mi janv. 2017 à de nos jours : ((cw : ptsd, anxiété)) Rien ne s’est vraiment arrangé. Reyn a perdu la mémoire (lui aussi, sauf que tous ses souvenirs sont bloqués. Tous). Leigh ne se souvient toujours pas des quelques jours de l’enlèvement. Et tout a l’air différent à la maison. Les parents sont satisfaits de la nouvelle attitude de Reyn : il semble plus calme, plus en adéquation avec ce qui l’attend. Et ça frustre Leigh. Chaque jour un peu plus. Chaque jour avec plus d'ardeur. La calme jeune femme qu’elle était a laissé sa place à quelqu’un de bien plus agité. La seule chose qui l’apaise : son podcast. Mais elle doit faire attention à se focaliser uniquement sur les histoires des autres, pas la sienne. Sinon… sinon…
Elle souffre d’un blocage, le syndrome de la page blanche, qui dure plusieurs semaines. Elle rassure ses auditeurs avec un billet d’humeur un peu particulier. Reyn est toujours le souci numéro un dans sa tête et elle n’arrive plus à faire de la place au reste. Alors elle tente le tout pour le tout et elle va voir Reagan, ce demi grand-frère qu’on lui a appris à ne pas apprécier. Après tout, c’est lui qui les a sauvés. Elle a besoin de renouer avec lui. Surtout quand elle a l’impression d’être en décalage avec tout le monde. Quand elle voit à quel point Reyn semble épanoui avec Karma (l’ami de Reyn puis son copain. Un garçon qu’elle a appris à apprécier sous couvert de fais pas de mal à mon frère, sinon…). A quel point tout semble bien aller dans la famille Fairburn. Ça consume Leigh.
Elle traîne plus avec Reagan, va même jusqu’à aller jusqu’à son travail pour discuter avec lui, fouiner… l’aider un peu malgré elle (mais que voulez-vous, quand on a un podcast true crime/horror, on fouine plus facilement) et essayer de se souvenir : elle a besoin de savoir, de comprendre. Elle colle aussi beaucoup Aeri, proche de Karma et de Reyn, devient la relou de service qui a besoin de toujours poser les mêmes questions, les mêmes inquiétudes. Leigh en vient même à considérer Aeri comme une amie, un peu malgré elle. Faut dire que provoquer les rencontres, au bout d’un moment, c’est plus vraiment inconscient. Puis, à la maison, Leigh change aussi : elle est plus impulsive, moins mesurée dans ses propos comme si elle cherchait à provoquer quelque chose… une réaction… de la part de qui ? Probablement de Reyn. Sa soudaine résilience inquiète Leigh. Le fait qu’elle soit la seule à vivre avec leurs souvenirs lui fait peur : et s’ils étaient incapable d’en créer des nouveaux ? Et si elle ne pouvait plus le protéger comme avant ?

MISC :
Elle a mis en pause ses études après son enlèvement, elle a eu besoin de se remettre et même si ça a déçu sa mère, ça lui a permis de remonter un peu // Leigh déteste toujours autant ses cours, mais elle se doit de les reprendre. Cependant, elle est beaucoup moins assidue, elle sèche plus volontiers. On fait passer ça pour des caprices alors que c’est simplement parce qu’elle a besoin de respirer. Elle a l’impression que l’odeur, qui se trouvait là où Reyn et elle étaient, la suit et ça lui provoque des crises d’anxiété. // Leigh n’a jamais fait trop d’excès : elle n’aime pas l’alcool, elle n’a jamais éprouvé le besoin de fumer ou de consommer de la drogue et elle n’est jamais à l’aise en soirée. A comprendre qu’on qualifie volontiers la Fairburn de nerd. Si on le siffle parfois comme une moquerie, Leigh ne le prend jamais mal puisque c’est ce qu’elle est. // Si on la lance dans un sujet qui la passionne, elle peut sortir tout un discours dessus. Discours qui peut durer des heures parce que lorsqu’elle arrive à susciter l’intérêt chez les autres, elle ne s’arrête plus. Faut dire qu’on l’a très peu écouté par le passé (à part Reyn). // Malgré tout, Leigh s’intéresse un peu au business de la famille. Surtout le résultat final : qu’est-ce qui fait qu’un élixir fonctionne ? Comprendre le fonctionnement des choses peut la tenir éveillée pendant un moment (et elle a du mal à accepter le non mais c’est magique). // Il y a longtemps, Leigh a écrit des fanfictions. Elles ne sont plus trouvables parce que, jugées illisibles et incompréhensibles, Leigh les a supprimées. Elle les conserve sur son ordinateur, dans un dossier bien planqué dans d’autres dossiers et nommé d’une manière si random que c’est quasi impossible de comprendre ce que ça contient. Prémices de son besoin de raconter des histoires. // On lui a déjà demandé à faire une IRL avec les personnes qui écoutent son podcast, la seule réponse qu’elle a fourni c’est : entretenir un peu de mystère, c’est là la beauté de In the Shadow, non ? (formulation polie pour dire non) // Le pseudo qu’elle utilise est très kitsch, mais elle a fait exprès : Lady S. pour Lady Shadow. Jusqu’à présent, personne n’a réussi à découvrir sa réelle identité. // Elle a écopé de quelques cicatrices très fines sur les jambes et les mains, devenues blanches avec le temps. Restes de ces quelques jours enfermés en 2017. Son regard les évite autant qu’il les cherche. Et si en se concentrant dessus les souvenirs revenaient ? Sauf qu’à part lui déclencher des crises d’anxiété, ça n’a rien fait revenir. Elle suppose également que le blocage de son pouvoir vient aussi des conséquences de leur enlèvement. Elle n’a plus osé l’utiliser depuis, lui semble être totalement cassé (comme elle) ou très peu efficace.